Dans les vignes de Lavaux, l’heure de l’effeuillage
Depuis le mois de juin, les vignerons s’activent dans les vignes pour les effeuilles. Cette étape importante consiste à enlever une partie des feuilles entourant la zone de grappe, afin de favoriser leur développement. A mesure que les ceps se densifient, cette opération permet une meilleure aération et un ensoleillement optimal des raisins. Un geste discret mais essentiel pour la qualité des futurs crus.

Le principe de base de l’effeuillage est d’enlever les feuilles et les rebiots (départ de grappe secondaire qui pousse sur le même bois que la grappe principale) dans la zone de grappe afin de favoriser l’aération et de contenir au maximum les maladies, comme le mildiou et l’oïdium, qui peuvent survenir avec l’accumulation d’humidité. En effet, si l’on garde trop de feuilles sur le cep ou trop d’herbe dans la vigne, cela crée un climat humide propice aux champignons et à la pourriture.

L’autre enjeu des effeuilles est d’apporter suffisamment de Soleil pour avoir de la photosynthèse, qui va permettre au raisin de se charger en sucre, mais également d’amener de l’ombre pour éviter que le raisin attrape un « coup de Soleil ». Comme pour les autres travaux de la vigne, c’est un réel feeling qu’il faut avoir, comme l’explique Raymond Chappuis d’Arc-en-Vins : « Il faut du feeling, il faut se mettre à la place de la plante. Trop de soleil ce n’est pas bien pour nous non plus ».
Depuis quelques temps, l’effeuillage mécanique se développe dans la région de Lavaux, pour les parcelles qui le permettent. Pour cela, il faut attendre que les rebiots ressortent assez pour que l’on puisse enlever les feuilles sans aspirer la fleur.
Des mains expertes pour un travail de précision
Pour les effeuilles, la plupart des vignerons ont recours à de la main d’œuvre externe pour les aider. C’est le cas pour Raymond Chappuis, à Puidoux. Depuis de nombreuses années, il accueille la même équipe pour cette période assez chargée, entre effeuillage, palissage et autres travaux, « on a toujours la même équipe car ce sont des gens qui connaissent les travaux et les vignes ». D’ailleurs, ce sont souvent les femmes qui s’occupent de la partie effeuillage, une tradition qui reste ancrée : « C’est un travail manuel, mais qui demande de la finesse et elles sont quand même plus habiles », sourit Raymond Chappuis.
Quand la vigne dicte le tempo
Au début du mois de juin, les grappes étaient en pleine floraison, une fois terminée, on voit apparaître les petites baies, qui deviendront du raisin. Au début, les baies grossissent et prennent de l’eau, ce qui les rend très acides. A partir du mois d’août, elles vont se charger en sucre et la plante aura plus besoin de soleil que d’eau.

A l’instar des autres métiers de la terre, la nature dicte les journées du vigneron, comme l’explique Romain Bochud, vigneron indépendant pour Ponnaz & Fils à Cully : « Dès que ça commence à pousser, c’est la vigne et la météo qui dictent notre rythme. S’il y a une vague de froid et que la vigne ne pousse pas, après l’ébourgeonnage, on peut dire qu’on est à jour. Cette année, la vigne pousse bien et on a pas mal de travaux à faire en même temps ».
Pour le moment, la vigne semble bien se porter, comme le mentionne Romain Bochud : « L’année passée au même stade, avec plus ou moins les mêmes conditions, on voyait déjà des maladies et là, on n’en trouve pas beaucoup. On est déçu en bien ».
Sentiment partagé par Raymond Chappuis qui remarque toutefois « qu’il y a des irrégularités sur la vigne. Il y a quand même des bois qui sont plus grands et d’autres plus petits »
Epamprer, cisailler, palisser… le ballet des gestes viticoles
En dehors des effeuilles, les vignerons ont d’autres travaux à faire en même temps, liste non exhaustive :
- Epamprer : enlever les pampres, qui sont des rameaux ou pousses secondaires (non fructifères) qui se développent sur le tronc ou les bras du cep de vigne.
- Cisailler : couper les feuilles en haut pour contenir la pousse. Si c’est trop long, les bois risquent de se coucher avec le vent. A noter que la vigne est une plante grimpante et le cisaillage permet d’éviter l’effet « jungle ».
- Faucher l’herbe : cela permet d’aérer la vigne et de faciliter le passage entre les vignes.
- Palisser : mettre les bois dans les fils. Cela protège des coups de vents et des orages, ainsi les bois ne se cassent pas.
- Mettre les filets pour protéger les raisins contre les nuisibles.
Actuellement, c’est une période assez chargée pour les vignerons. Avec la nature personne ne peut aménager son agenda et quand tout pousse en même temps, il faut s’activer et être sur tous les fronts.