Viticulture – Les vendanges 2025, passer entre les gouttes pour récolter le fruit d’un an de travail


Ça y est, les caissettes à raisins sont lavées, les bacs rangés et l’effervescence des vendanges a laissé place au travail en cave. Même s’il est encore trop tôt pour l’affirmer, le millésime 2025 semble prometteur. Avec un été sec, peu de maladies ou de pourritures et malgré les pluies des dernières semaines, qui ont précipité le début des vendanges, toutes les conditions sont réunies pour avoir quelque chose de joli.
L’année 2025 aura été marquante pour les professionnels de la vigne, entre un été à la limite de la sécheresse et une fin de saison pluvieuse. Chez les Frères Rogivue, à Chexbres, les vendanges ont débuté avec le Pinot Noir et d’autres spécialités, comme l’explique François Rogivue : « On a commencé rapidement avec des amis de la famille, en petite équipe, on a ramassé tout ce qui était plus sensible. Notre grande chance, c’est que 75 % de notre domaine c’est du Chasselas et il faut lui laisser ça, pour moi c’est le roi des cépages, parce qu’il tient vraiment bien par rapport à la pourriture ».
Cette pluie aura joué avec les nerfs de nos vignerons, les yeux rivés sur la centrale météo, il a fallu s’organiser au jour le jour et décider de vendanger ou non : « si on n’allait pas vendanger ce n’était pas trop grave. Mais on va pour une ou deux heures, il y a quand même les bacs à presser et on doit s’occuper du raisin. Mais dans l’ensemble, on n’a pas fait beaucoup plus longtemps que prévu, comme il y avait moins de tri, ça allait beaucoup plus vite », mentionne François Rogivue.
A Treytorrens en Dézaley, Benjamin Chevalley est globalement satisfait de ses vendanges. « C’est dix jours qui sont très intenses, mais la qualité est présente, on était entre 80 et 82 degrés Oechsle en Dézaley (échelle qui permet de déterminer la quantité de sucre et d’eau contenue dans le raisin avant la fermentation). Même si je suis un peu surpris de la quantité, il y a un peu moins que prévu ».

Et maintenant que se passe-t-il ?
Parce que oui, même si c’est le point culminant de l’année viticole, les vendanges ne sont pas l’unique travail des vignerons. Maintenant que le raisin fermente dans les caves, les vignerons, comme Geoffrey Neyroud s’activent encore dans les vignes : « Actuellement on est occupé à faire des minages, c’est-à-dire qu’on va arracher la vigne et on va replanter derrière. Cela nous permet de modifier un peu la structure sur certaines parcelles. On pourra aussi mécaniser un maximum et simplifier l’accès et le travail, comme c’étaient encore des vignes en gobelets ».
Pour les autres travaux, Benoît Rogivue explique qu’ils vont « attendre les premiers froids pour que la sève retombe dans les racines et on pourra commencer les travaux de prétaillage et de taille. Mais actuellement on va surtout se concentrer sur la cave. »
A la cave, il s’agit maintenant de faire tout ce qui est vinification, élevage et suivi, pour éviter toute déviation. Il y a aussi une grosse partie de nettoyage à faire, car après les vendanges, il faut désinfecter et nettoyer les caissettes et les pressoirs.
Un millésime 2025 prometteur

A Corseaux, Geoffrey Neyroud, jeune vigneron-tâcheron pense que le millésime 2025 sera bon vis-à-vis de l’état sanitaire du raisin : « Chez nous on a eu des bons sondages, jusqu’à 87 degrés Oechsle pour les Chasselas ce qui est très bien. Pour les rouges, il y a eu beaucoup de couleurs, c’est une belle année à rouge. Globalement c’est une bonne année ».
Sentiment partagé à Chexbres par François Rogivue, « s’il fallait choisir un mot pour décrire l’année 2025, c’est équilibre. Après, il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Mais on est sur quelque chose de joli, avec une belle aromatique présente. Pour le moment on n’a pas encore de cuves qui ont fini leur première fermentation, mais on est assez contents lorsque l’on déguste ».
Une « nouvelle » génération optimiste sur l’avenir
Pour Benjamin Chevalley, 23e génération au Domaine de la Chenalettaz, il est important de s’adapter à ces changements : « vous voyez, vous venez à l’heure de l’apéro pour discuter et je vous propose un verre, mais comme vous avez le sport après, vous avez refusé. C’est une autre génération, qui consomme différemment et il faut se réinventer. Il faut essayer plein de choses, mais surtout bien les commercialiser ». Il y a aussi la question de l’œnotourisme qui se pose pour ce domaine, qui jouit d’une très belle vue sur le Léman et Lavaux. « Actuellement, on fait très peu d’œnotourisme mais on remarque qu’il y a un potentiel avec le nombre de personnes qui se promènent dans les vignes ».
Chez François et Benoît Rogivue, ils se sentent chanceux d’être deux, « on a cette chance de pouvoir se reposer l’un sur l’autre et de se remotiver l’un, l’autre. Et on est aussi reconnaissant du travail qui a été fait en amont par notre grand-papa, notre papa et notre oncle. Je suis optimiste par rapport à la consommation, car c’est une crise européenne et certains pays font face à d’autres défis que nous. En Suisse, on a quelques atouts dans notre manche, qui sont la proximité avec la clientèle, l’endroit et la qualité des vins. Comme dans d’autres secteurs, il faut réussir à allier la tradition avec l’innovation », mentionne François Rogivue.
Idée partagée par Benjamin Chevalley : « il faut se réinventer et prendre les bonnes décisions. J’ai aussi repris le domaine car je veux pérenniser l’endroit. Mais finalement quand on y pense, la difficulté de notre métier c’est de se dire qu’on a dix ans d’expérience mais on a fait que dix fois du vin. Et je me suis beaucoup trop investi dans ce domaine pour tout lâcher du jour au lendemain et partir ».
Finalement, même si personne n’a de solution miracle, on sent, en échangeant avec ces professionnels que ce sont des métiers de passions et qu’aucun d’eux ne se verrait faire autre chose, comme le relate Geoffrey Neyroud : « Je ne me vois pas faire autre chose que vigneron. C’était une belle année à travailler, avec un état sanitaire bon. Je signerais pour dix ans avec une année comme celle-là ».