Une brève histoire de Saint-Nicolas et du Père Noël
Chaque mois de décembre, les deux personnages se succèdent, et parfois se confondent, chez les enfants notamment, en dépit d’une manifeste dissemblance : le premier est plutôt efflanqué, austère, coiffé d’une mitre et tenant une crosse, alors que le second, replet et joufflu, affiche une mine rougeaude et réjouie, sous son bonnet ou son capuchon rouge écarlate. Il existe pourtant bien un lien entre Saint-Nicolas et le Père Noël, le second étant une sorte d’avatar imaginaire du premier qui, lui, a bel et bien existé.

Nicolas de Myre était un évêque grec qui vécut en Lycie, une province de l’Empire romain d’Orient, située dans le sud de la Turquie actuelle, entre le IIIe et le IVe siècle après JC. De lui, on sait peu de choses, sinon qu’il détruisit le temple d’Artémis à Patare, la ville où il résidait ; qu’il fut persécuté et torturé pour sa foi, et qu’il distribua généreusement une bonne partie de sa fortune aux pauvres. Certains chroniqueurs, qui vécurent les siècles suivants, lui attribuèrent aussi le sauvetage de trois condamnés à mort qu’il aurait arraché de l’échafaud.
Sa réputation de bienfaiteur des enfants serait le fruit d’un malentendu. Les fresquistes byzantins qui, bien après sa mort, illustrèrent son intervention en faveur des condamnés, le représentèrent hiérarchiquement beaucoup plus grand que ses protégés. Au Moyen-Âge, des chroniqueurs chrétiens en déduisirent naïvement que le saint homme avait sauvé une bande gamins. Ainsi naquit la légende selon laquelle Nicolas aurait ressuscité des enfants, découpés en morceaux, non par un bourreau, mais par un boucher qui, au fil des siècles, prit les traits de notre sombre père fouettard.
Après la Réforme, allergiques à tous les saints, les huguenots hollandais remplacèrent cette figure chrétienne, devenue très populaire, par un personnage semi-laïc qu’ils baptisèrent « Sinter Klaas », une déformation de Saint-Nicolas. Passé au Nouveau Monde avec les émigrés protestants, le bonhomme se mêla à d’autres traditions, nordiques notamment, avec leur lot de fées, de lutins et de rennes pour aboutir à « Santa Klaus », alias notre Père Noël.
A l’origine, le personnage avait davantage la physionomie d’un lutin que d’un bon vivant grassouillet et couperosé. On doit sa dégaine et ses vêtements actuels à l’illustrateur américain Haddon Sunblom qui, en 1931, l’a imaginé avec sa barbe caractéristique, son habit rouge et ses grosses bottes, pour le faire figurer dans des publicités de Noël de la firme Coca-Cola. C’est à cette boisson gazeuse mondialisée qu’il doit d’être passé dans la postérité et l’imaginaire des enfants sous cette forme joviale et polaire.
Quant aux restes du corps du vrai Saint-Nicolas qui reposaient en Lycie, alors que les Ottomans menaçaient l’Empire byzantin, ils furent emportés par des marins italiens. Ils reposent aujourd’hui à la basilique San Nicola de Bari. Quelques fragments de la relique, dont un humérus, furent également cédés à la cathédrale Saint-Nicolas de Fribourg, durant la Renaissance.
De nos jours, le saint méditerranéen fait chaque année sa traditionnelle tournée le jour de sa fête, le 6 décembre, pour le plus grand bonheur des petits et des grands, flanqué de son inséparable Père fouettard. Et il est invariablement suivi par son successeur boréal, la nuit du Réveillon de Noël.
Faites-lui bon accueil et… Joyeux Noël !