Votations du 18 juin – Un taux d’imposition minimal pour les multinationales ?
L’objectif de ce texte est d’instaurer un taux d’imposition de 15 % minimum pour les entreprises réalisant un chiffre d’affaires de 750 millions d’euros par an (env. 730 mios Chfs). Un impôt minimal qui établit une sorte d’égalité fiscale mondiale, puisque ce projet vient tout droit de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique). Faisant partie des 140 pays membres, la Suisse est connue pour avoir des taux d’imposition favorables pour ce type de sociétés. Un avantage qui
perdra de son importance.
En cas de refus, les recettes fiscales de ces entreprises pourront être perçues par d’autres pays : « Si une de ces sociétés installées en Suisse est imposée à un taux inférieur à 15 %, la différence peut être saisie à l’étranger », détaille le site du Conseil fédéral. En cas d’acceptation, un impôt complémentaire sera installé pour atteindre le minimum de 15 %. « Ainsi, les recettes fiscales resteront en Suisse ».
Entre 1 et 2.5 milliards en plus
D’après l’administration fédérale des contributions, l’instauration de cet impôt au 1er janvier 2024 permettrait de générer entre 1 et 2.5 milliards de francs la première année. Les trois quarts de cette somme seront reversés aux cantons concernés, tandis que le quart restant reviendra à la Confédération. Toujours en termes d’estimation, la part encaissée sur ces multinationales pourrait atteindre trois milliards par année dès 2025.
Entretien avec Margarida Janeiro, conseillère communale à Bourg-en-Lavaux
D’après les derniers sondages, l’imposition minimale cantonale convainc autant la gauche que la droite. Pourquoi êtes-vous contre ?
Une plus grande imposition des très grandes entreprises, tout comme la lutte contre la concurrence entre cantons ou entre pays, sont des combats chers à la gauche car ceux-ci sont plus que nécessaires pour financer de manière juste des services publics, comme la mobilité, les crèches ou la santé. Malheureusement, la réforme actuelle est accompagnée d’un mécanisme qui compensera les cantons qui pratiquent aujourd’hui le dumping fiscal, qui faisaient tout pour attirer des grands groupes sans contrepartie à la population. Sous cette forme, la réforme ne résout pas, en réalité, la question de la concurrence fiscale qui existe entre cantons.
Pensez-vous que la répartition des recettes engendrées par cet impôt supplémentaire n’est pas profitable pour la population ?
Les cantons bénéficiaires des impôts supplémentaires n’ont pas encore tous annoncé l’utilisation qu’ils en feraient. Cependant, tout porte à croire qu’ils pourraient, comme à Zoug, profiter de cette hausse de revenus en diminuant les impôts, mécanisme qui, on le sait, favorise toujours les gros salaires et jamais la classe moyenne qui paie les pots cassés.
Pourquoi ?
Des cantons riches comme Zoug ou Bâle-Ville, qui ont jusqu’à présent largement profité de ce taux d’imposition excessivement bas, recevront plus d’argent par habitant que les autres cantons. Il faut au contraire profiter de cette réglementation internationale pour financer des prestations en faveur de la population et être solidaire des cantons moins bien lotis.
Selon vous, comment faut-il adapter ce texte pour le rendre profitable à la population et aux multinationales ?
Aujourd’hui, la priorité doit être mise sur les besoins de la population et non sur les besoins des multinationales. Nous vivons une crise du pouvoir d’achat avec la hausse des prix sur les produits de première nécessité, l’énergie, les primes d’assurance-maladie, les transports, etc. Les gens ont besoin de pouvoir souffler et ce texte-là ne sert pas ce but. En très peu de temps, plusieurs coupes dans les investissements ferroviaires ou dans les assurances sociales par exemple ont été annoncées par la Confédération. Pour couronner le tout, la conseillère fédérale PLR en charge des finances, Madame Keller-Sutter menace de faire des économies dans l’AVS ! On a demandé à la population de faire des efforts insensés pour « assainir les finances » alors que rien n’a jamais été demandé aux multinationales qui font des profits faramineux et ce en plus sur un bilan carbone désastreux. La réforme ne résout finalement aucun problème et, dans sa version actuelle, peut même en créer. Il est évident qu’il faut équilibrer la balance et faire des besoins de la population une priorité.