Voile – Coupe de l’America, suite et fin
La Coupe de l’America est sans doute l’événement sportif le plus important au monde, sinon le plus ancien. A ce titre, Le Courrier se devait d’y être présent.
Puig Women’s America’s Cup
La Puig Women’s America’s Cup, n’est pas qu’une réussite du point de vue de la voile, elle annonce aussi une nouvelle ère pour la voile d’élite féminine, ouvrant une voie lumineuse vers l’avenir de l’America’s Cup. Le programme est ambitieux, reconnaissant que les opportunités de naviguer sur des voiliers à foils de haute performance sont limitées et que le fossé des compétences doit être comblé. Grâce au soutien exceptionnel du sponsor principal, les éléments constitutifs de la Puig Women’s America’s Cup ont pu être assemblés et l’intérêt mondial suscité par l’événement a été encourageant.
L’équipe féminine d’Alinghi Red Bull Racing a disputé la toute première Women’s America’s Cup de l’histoire, qu’elle prépare depuis le début de l’année. Chacune a passé six mois de tests de sélection l’an dernier. Cette année, elles se sont entraînées aux côtés de l’équipe de l’America’s Cup et ont passé beaucoup de temps dans le simulateur, ont suivi des entraînements sur l’AC40 et des ateliers spécifiques sur la communication, la stratégie, les règles de courses et le travail d’équipe, mais elles n’ont pas accédé à la suite de la compétition. En finale, deux géants se sont affrontés, Luna Rossa Prada Pirelli Women’s Team et Athena Pathway – Women, les Italiennes remportant en finale cette première Coupe des dames contre les Britanniques.
37e America’s Cup Louis Vuitton
Jour 3, course 4. Port Vell est gigantesque. Chaque équipe a son site, souvent éloigné d’un autre. Une carte d’accréditation autorise des visites. Par exemple, les Néo-Zélandais sont fidèles à leur image, simples et accueillants. Je pénètre dans leur base, m’attarde et prends quelques photos. Alinghi exige une invitation. Dommage pour cette 4e course. Les Anglais sont des gentlemen. Ils proposent pour une date ultérieure une sortie sur un bateau d’accompagnement.
Dans Race Village, les fans néo-zélandais sont les plus nombreux, ils applaudissent à chaque virement de bord, mais saluent aussi la bonne manoeuvre chez l’adversaire. Cela dit, la course est de toute beauté, au milieu des fans et dans l’ambiance des teams.
La course 5 est annulée. Puis jour de repos. Un Kiwi me demande si les verres de la Coupe, laissés là, m’appartiennent. Je lui réponds qu’il peut les prendre comme souvenir. Comme tant d’autres, il accompagne le Defender, navigue, mais n’est pas rattaché à la structure. Ils sont des milliers dans son cas. Ils connaissent. Ils n’aiment pas trop les Anglais et sont sûrs, à 4 victoires à 0, de remporter cette Coupe. D’autres parlent déjà d’un retour ce vendredi, comme si tout allait se boucler jeudi par une victoire de 7 à 0. Parce que dans l’équipe du Defender, tout baigne : la structure, la finition, la technologie, le skipper, l’équipage, tout est parfait. C’est la culture de la voile à son comble.
Jour 4, courses 5 et 6. Une journée chaude et humide produit des brises thermiques du sud pour deux courses passionnantes qui voient INEOS Britannia remporter deux victoires consécutives. Le score est de 4 à 2 et stoppe l’élan des Kiwis. Pour la première fois en 90 ans, les Britanniques remportent deux courses dans une America’s Cup.
Jour 5, courses 7 et 8. L’équipe néo-zélandaise interprète la direction du vent et prend deux courses au Challenger of Record. Dans ces conditions de mer clémentes, Emirates Team New Zealand semble être un bateau différent, capable d’utiliser une hauteur de portance constante et d’accomplir des manœuvres rapides et fluides. Au Real Club Nautico Barcelona, le public est clairement acquis au Defender qui n’est plus qu’à une victoire pour conserver l’aiguière d’argent.
Jour 6, course 9. Un course, une seule, mais de quelle intensité ! D’abord retardée, elle est finalement lancée à 14h50. Le match race commence avant le départ, Ben Ainslie étant magistral. Le but n’est pas tant d’aller vite que de se trouver devant l’adversaire. Celui qui est devant contrôle, anticipe, vire quand l’autre vire, le couvre, le dévente et le précède à l’arrivée. Et c’est ce qui est arrivé, sauf que les Néo-Zélandais ont quasiment pris les commandes dès le départ. Les Britanniques sont bien revenus à deux reprises, une première fois à neuf mètres à la troisième bouée, mais reperdant aussitôt cet avantage.
La combinaison du brio de l’équipage et de la vitesse du bateau faisant la différence, Emirates Team New Zealand conclut un chapitre historique en remportant la 37e America’s Cup Louis Vuitton contre INEOS Britannia avec une avance de 37 secondes et en devenant la première équipe continue à remporter la Coupe de l’America trois fois de suite.
Peter Burling, Nathan Outteridge, Blair Tuke, Andy Maloney et les cyclistes montent sur le pont. Les Britanniques applaudissent l’équipage victorieux aussitôt entouré d’une armada de bateaux de spectateurs et de supporters. Champagne, bal d’hélicoptères, défilé de yachts, concert de cornes, tout y est ! A bord de Taihoro, les voiles sont rapidement amenées avant que le drapeau néo-zélandais ne soit hissé au-dessus d’une bannière portant les mots catalans : Moltes Gràcies Barcelona.
A quai, des milliers de personnes vêtues du noir des « Kiwis » saluent, eux aussi, l’exploit d’Emirates Team New Zealand. Le skipper Peter Burling tente d’expliquer ce que lui et son équipe viennent d’accomplir : « C’est un sentiment assez surréaliste, je n’arrive pas encore à l’assimiler. Dans l’America’s Cup, vous êtes tous prêts pour une longue bataille, mais le fait d’y parvenir aujourd’hui dans des conditions de navigation magnifiques, avec tant de gens qui nous encouragent, c’est incroyable ». Il ajoute : « Nous sommes extrêmement fiers. L’America’s Cup doit être l’un des trophées sportifs les plus difficiles à remporter au monde. De nombreux éléments doivent être réunis pour que tout fonctionne et maintenant que nous l’avons fait trois fois de suite, c’est incroyablement spécial ». Il mentionne également Ben Ainslie et son équipe : « Tout le mérite en revient à Ben et à INEOS Britannia, Je pense qu’ils ont mis en place un défi incroyable, ils nous ont poussés tout au long de la course, chacune a été une véritable bataille, et ils ont été des challengers extraordinaires ».
Sir Ben Ainslie, évidemment déçu, félicite Emirates Team New Zealand : « Nous avons affronté une des meilleures équipes de l’histoire de la Coupe, si ce n’est « la » meilleure. Et comme l’a dit un des nôtres, c’est le courage de continuer qui compte, et c’est ce qui nous attend. » En regardant vers l’avenir, Ainslie ajoute : « Nous n’en dirons jamais assez sur le fabuleux soutien que nous avons reçu, il est incroyable. Je n’ai jamais rien vécu de tel. En ce qui concerne l’avenir de l’équipe, nous nous sommes fixé comme objectif de gagner la Coupe, nous nous en sommes approchés et nous nous en rapprochons à chaque fois. Lorsque vous vous fixez un objectif, vous devez l’atteindre. Je pense que nous avons un groupe de personnes formidables, une équipe exceptionnelle et que nous pouvons passer à l’étape suivante. »
L’avenir de l’événement sera annoncé « en temps voulu », selon Grant Dalton, PDG de l’America’s Cup Event et d’Emirates Team New Zealand, la tradition voulant qu’un défi soit lancé dès que le bateau vainqueur aura franchi la ligne d’arrivée du dernier raid.