Un rapport climatique qui passe presque inaperçu
Le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a publié son sixième rapport. Si la crise climatique est habituée des gros titres, ce dossier a été éclipsé par la guerre en Ukraine et le coronavirus.
Thomas Cramatte | Décliné en deux volets, ce sixième rapport dresse l’état actuel des connaissances sur le changement climatique : « Il crée ainsi la base des décisions politiques en matière de protection du climat, et d’adaptation à ce dernier », relève le site de météo suisse. Publié le 9 août de l’année dernière, la première version fait office d’alerte rouge en confirmant que le changement climatique touche toutes les régions du globe : « La température moyenne mondiale s’est réchauffée d’environ 1.1°C depuis le début de l’industrialisation », explique le rapport.
Le groupe d’experts climatiques des Nations Unies ne mâche pas ses mots : « Terrifiant, dévastateur, profondément inquiétant, le climat se réchauffe plus vite que prévu. Puisque le seuil critique de 1.5°C devrait être franchi vers 2030 déjà, soit dix ans plus tôt que les prédictions », alarme le GIEC en août dernier. Cette limite à ne pas dépasser avait été fixée en 2015 lors de l’accord de Paris sur le climat. « Les pays doivent continuer à développer les services qui seront nécessaires pour soutenir l’adaptation dans les secteurs sensibles au climat, tels que la santé, l’eau, l’agriculture, les énergies renouvelables et promouvoir des systèmes d’alerte qui réduisent les effets néfastes des événements extrêmes » transmet le docteur en facultés des sciences naturelles à Londres, Joeri Rogelj, à National Geographic.
En Suisse
Le réchauffement climatique continuera de s’intensifier, entraînant des vagues de chaleur plus violentes et des précipitations plus soutenues. Les impacts sur notre pays ont été examinés en détails par la Confédération via le National Centre for Climate Services (NCCS). Ce dernier se questionne sur le paysage suisse si nous continuons à produire trop de gaz à effet de serre. Plusieurs scénarios sont évoqués à l’horizon 2060 : des étés plus secs avec 25 % de moins de précipitations et une hausse jusqu’à 9 jours de la période de sécheresse. Des vagues de chaleur qui feront monter les températures de 2 à 5.5°C. Ainsi que des journées très chaudes plus nombreuses (+3 à +17 par an contre une aujourd’hui). Les hivers seront toujours chauds avec une accentuation de 3.5°C, élevant la limite de la neige et du zéro degré de 400 mètres à 600 mètres.
Pour éviter que ces prédictions deviennent réalité, le NCCS se veut rassurant. D’après ce dernier, une diminution rapide des gaz à effet de serre au niveau mondial pourrait réduire de moitié les impacts du changement climatique dans nos contrées. Lors de la COP26 en novembre dernier, La conseillère fédérale, Simonetta Sommaruga, avait publié sur Twitter : « Ce que décrit le rapport du GIEC, des ministres de pays touchés nous le décrivent de manière impressionnante. La Suisse s’engage pour une stratégie mondiale efficace ». Les experts sur le climat déclarent qu’une action rapide et globale est nécessaire pour espérer pouvoir encore gérer le changement climatique.
Dans son deuxième volet, les scientifiques du GIEC indiquent que la nature et l’être humain subissent déjà le dérèglement climatique : « Certaines maladies deviennent plus fréquentes et la sécurité alimentaire diminue. La moitié de la population du globe souffre régulièrement de pénuries d’eau aiguës », informe RTSInfo. Hormis l’impact sur la santé physique des populations, on note également l’extinction possible de 3 à 14 % des espèces terrestres. En cas d’un dépassement du seuil des +1.5°C, les experts prédisent que des milliards de personnes seront exposées à une augmentation des maladies et des morts prématurées.
Peu relayé dans la presse
Pour de nombreux lecteurs et internautes, les médias nationaux et européens n’ont pas suffisamment relayé ce sixième rapport du GIEC. La publication de la première version date du 9 août 2021, soit juste après l’entrée en vigueur du certificat Covid. Le deuxième volet a, quant à lui, été publié le 28 février dernier, c’est-à-dire quelques jours après l’offensive russe contre l’Ukraine.
Glacier Thwaites
Un immense bloc de glace de la taille de la Grande-Bretagne retient le glacier Thwaites en Antarctique. Surnommé « Glacier de l’apocalypse », ce dernier pourrait se détacher d’ici trois à cinq ans et entraîner une hausse de plusieurs mètres du niveau de la mer. Une élévation de l’eau estimée à trois mètres qui inquiète la communauté scientifique. Les récentes modélisations prouvent que la ligne de fond (point où le glacier repose sur la roche) recule au fur et à mesure que les courants marins se réchauffent. Selon le rapport du GIEC, ce scénario catastrophe entraînerait la fonte accélérée du Groenland et empêcherait la planification, le financement, et la mise en place de mesures de protection pour le vivant.