Saint-Saphorin – Vendanges, entretenir la tradition de la pressée
Quand on parle de vendanges, il faut rappeler aux gens que c’est le moment le plus visible et le plus important pour le vigneron
Texte et photos Eric Moser | Samedi, les habitants de la commune viticole de Saint-Saphorin ont pu bénéficier d’un soleil radieux pour récolter le raisin de la vigne communale et assister à sa pressée. Une tradition que la Municipalité veut à tout prix conserver.
Depuis une dizaine d’années maintenant, la Municipalité de Saint-Saphorin organise la désormais traditionnelle pressée à la cave communale, comme nous l’apprend le syndic Gérard Vallélian. « Depuis quelques années, le marché a changé. De plus, ce n’est pas forcément le rôle d’une commune de faire de la promotion pour vendre des bouteilles. Cependant, la pressée est quelque chose à quoi nous tenons. Le raisin que nous récoltons sert à produire la réserve communale. Celle-ci est destinée aux habitants, aux officialités, aux restaurants ainsi qu’à quelques clients extérieurs ». La production annuelle est de 3000 à 4000 bouteilles.
Un vieux pressoir manié par des jeunes formés pour cela
Saint-Saphorin tient donc à cette tradition de la pressée annuelle qui permet, aux habitants de la commune de vivre un moment de partage et de convivialité, mais aussi et surtout, de faire fonctionner l’ancien pressoir officiel du lieu. « On parle de vieux pressoirs, mais tous ceux de la région ont été modernisés dans les années 50, après la guerre. Nous avons des jeunes qui ont été formés et qui savent s’en occuper ».
Toujours plus de demandes pour participer à la pressée
Samedi matin, c’est donc une vingtaine d’habitants, heureux élus, qui se sont donnés rendez-vous sur la place du village, pour cette journée de vendange, suivie du pressage. « Ce sont des gens de la commune, des amis qui viennent nous donner un coup de main. Ils viennent sur inscription. Le secrétariat communal en tient la liste et je dois dire qu’il y a une très longue liste d’attente, car tout le monde veut participer. Nous sommes cependant contraints de limiter le nombre de bénévoles. Quoique, ils ne sont pas tout à fait bénévoles dans la mesure où ils reçoivent trois bouteilles à la fin de leur labeur ». Comme nous l’explique Gérard Vallélian, il y a quelque temps, les habitants-vendangeurs étaient payés à la matinée jusqu’à ce que plusieurs d’entre eux déclarent qu’ils ne voulaient pas être rémunérés. « Nous avons de plus en plus de monde qui veut venir aider, et il faut bien constater que ce n’est pas pour l’argent ».
Saint-Saphorin, dernière commune à entretenir la tradition
La commune viticole tient à sa tradition et, à entendre son syndic on comprend vite pourquoi. « Saint-Saphorin est un village typiquement vigneron. Il n’y a plus que deux pressoirs qui fonctionnent, en plus de celui de la commune. Ce n’est pas glorieux pour un village vigneron. Nous essayons de garder cela (ndlr. la pressée traditionnelle). Dans les années 80, il y avait une dizaine de pressoirs qui fonctionnaient ici. Toutefois, ils appartenaient à des tellement petits domaines qu’ils ont disparu. Le domaine de la commune est également un petit domaine, mais nous gardons cette tradition et nous tenons à cela ». Ce d’autant plus que, comme nous l’apprend Gérard Vallélian, Saint-Saphorin est la dernière commune de Lavaux à organiser sa pressée annuelle.
Une journée dans la bonne humeur
Samedi, c’est donc à 7 heures du matin que les vendangeurs d’une journée se sont retrouvés sur la place du village afin de travailler la vigne dans la bonne humeur. Gérard Vallélian nous confiera, sur le ton de la plaisanterie que le programme de la journée n’avait pas pu être tenu. « Nous finirons quand nous finirons, parce que, bien évidemment, la mise en route a été difficile. Les 9 heures ont duré un peu long. Ensuite c’est bien allé un moment, mais là nos porteurs ont vu une différence de rythme et en ont déduit que l’apéro avait commencé ».
Les vignerons ont besoin que les clients aillent à leurs contacts
Si la Municipalité de Saint-Saphorin offre, avec cette pressée annuelle, à ses administrés la possibilité de passer un moment convivial (ndlr… la journée et la soirée de samedi se sont poursuivies par un apéritif suivi d’une raclette), il s’agissait aussi d’une occasion, pour Gérard Vallélian de passer un message. « Quand on parle de vendanges, il faut rappeler aux gens que c’est le moment le plus visible et le plus important pour le vigneron. Cependant le travail du vigneron se fait toute l’année. Il peut y avoir conflit d’utilisation des chemins viticoles. Il faut vraiment que les promeneurs, que l’on accueille volontiers, respectent leur présence sur les chemins et pas dans les vignes. Il faut aussi rappeler que la récompense du vigneron ce ne sont pas uniquement les vendanges, mais c’est le client qui vient acheter. On peut dire aux gens : Venez chez les vignerons quels qu’ils soient. Allez chez les vignerons. Ils proposent tous des caves ouvertes, des heures d’ouverture. Allez au contact direct au lieu d’aller acheter des vins dans les supermarchés. Rapprochez-vous des vignerons. Ce n’est pas toujours meilleur chez eux, mais c’est plus vrai, plus authentique et surtout plus sympa. Ce n’est pas vrai que pour le vin, mais aussi pour la viande, pour tout. Les gens de Lavaux ont la chance d’habiter dans une région viticole et d’être entourés de vignerons qui vivent de cela et qu’il faut faire vivre ».