Pully – Pourquoi est-il si complexe de créer plus de crèches ?
Petite enfance chapitre 2 sur 2
Voilà dix jours qu’une équipe du parti socialiste a lancé une pétition pour soulager les familles attendant une place d’accueil pour leur enfant. Mais alors, pourquoi est-ce si difficile d’augmenter le nombre de structures d’accueil publiques ? Réponse avec Jean-Marc Chevallaz, municipal en charge de la jeunesse et des affaires sociales depuis 2016 à Pully.
Le Courrier : Aujourd’hui, quel est le taux de couverture d’accueil de jour de la petite enfance à Pully ?
En préambule, je tiens à préciser que nous parlons de l’accueil collectif de jour préscolaire, plus particulièrement en nurserie-garderie. Il est fréquent que les gens confondent les accueils pré et parascolaires. Pour revenir au taux de couverture, il s’agit d’un élément théorique et délicat à interpréter.
En effet, selon le rapport de la Fondation de l’Enfance et de la Jeunesse, nous avons accueilli 329 enfants durant l’année 2022 pour 150 places auxquelles, si nous ajoutons la liste d’attente de 326, correspondrait à un besoin théorique d’environ 150 places supplémentaires. Le taux de couverture théorique s’établirait donc à 50 % (150/300) pour des places qui ne sont pas occupées à 100 %.
Si l’on part du postulat que les parents vont intensifier leur activité professionnelle ou que les places offertes ne répondent pas aux besoins actuels, cela pourrait induire la nécessité de prendre en compte qu’une place est occupée par 1.3 enfant (taux figurant dans le préavis 13-2022) soit un besoin de créer au moins 250 places supplémentaires. Le taux de couverture théorique serait dès lors de 37.5 % (150/400).
Ou, si l’on prend le nombre d’enfants de 0 à 4 ans au 31 décembre 2022 soit de 1013 et qu’on le compare au nombre de places soit 150, alors le taux est de 15 % (ou de 19 % dès octobre). Mais là, on introduit un biais important puisque tous les enfants n’occupent pas une place, car cela dépend du choix d’organisation des parents.
Pour information, dans le cadre de l’analyse des besoins pour les enfants âgés entre 0 et 4 ans menée en 2016, le nombre de places nécessaires avait été estimé pour un taux de couverture moyen de référence fixé à 25 % à l’horizon 2022.
A cela s’ajoute le constat fait ces dernières années, à savoir que plus nous ouvrons de places plus la demande augmente. Il n’en demeure pas moins, le fait est clair, qu’il manque au minimum 250 places.
Un autre élément mérite d’être relevé, à savoir que nous avons des structures privées sur le territoire de la commune de Pully, dont le nombre de places n’est pas pris en compte dans la statistique. Les structures privées viennent en renfort de l’offre communale, mais, il ne faut pas l’oublier, comme indiqué précédemment, que tous les parents ne désirent pas mettre leur enfant dans une structure publique. Les structures privées ont donc un rôle important à jouer dans la diversité de l’offre.
Pour terminer, il ne faut pas oublier, non plus, l’offre en accueil familial de jour (mamans de jour) vers laquelle les parents peuvent se tourner.
En juin de l’année dernière, le Conseil communal de Pully acceptait la création d’une nouvelle garderie de 44 places pour début 2023, cette nouvelle structure d’accueil a-t-elle ouvert ses portes depuis ?
Les délais de construction doivent s’adapter à plusieurs facteurs, dont la disponibilité des matériaux, les délais de procédure, les problématiques importantes de pénurie de personnel qualifié. La structure, appelée Le p’tit Loft, dotée de 44 places, sera ouverte d’ici la fin du mois d’octobre 2023.
Hormis ce projet au chemin du Montillier 3, à quand remonte la dernière ouverture d’une garderie à Pully ?
La dernière garderie ouverte est celle des Boverattes, appelée La Canopée, d’une capacité de 29 places autorisées, ouverte en janvier 2021.
Le Parti socialiste a lancé une pétition pour créer 200 places de plus afin de désengorger les listes d’attente à l’horizon 2026. Selon vous, ce projet est-il réalisable ou utopiste ?
Le nombre de 200 places indiqué dans la pétition est utopiste à l’horizon 2026.
Bien que les pétitionnaires soient remplis d’une bonne intention afin de soutenir les efforts de la commune, et je les remercie, cela crée un espoir à court terme chez certains parents que j’ai rencontrés. Mon rôle politique est d’être transparent et factuel.
A ce titre, je vous confirme que nous analysons chaque opportunité.
De manière générale, pourquoi est-ce si compliqué de créer de nouvelles garderies ?
Les éléments sont faciles à comprendre, leur mise en commun au même moment est complexe. Il s’agit au départ de la disponibilité des locaux (surface, accès, répartition, etc.), des architectes (élaboration du projet avec ses contraintes légales), du personnel éducatif (formé et en quantité suffisante) et non-éducatif (administration, intendance, etc.). A cela s’ajoutent les délais de réalisation des plans de quartiers dans lesquels nous avons demandé la mise à disposition de surfaces pour des structures d’accueil. A ce titre, plusieurs plans de quartiers font l’objet de recours de voisins ou d’une volonté de non-entrée en matière par certains membres du Conseil communal. Nous sentons un ras-le-bol de la construction sur notre commune et de son impact sur les infrastructures de la ville. Et pour terminer, la capacité à financer ces projets par la Ville de Pully et l’acception finale des préavis par le Conseil communal en sont les éléments déterminants.
L’exécutif souhaite créer 170 places supplémentaires, quels sont les délais pour la réalisation de ces dernières ?
En l’état, un délai ne peut pas être articulé précisément, car cela dépend des facteurs cités précédemment. Nous souhaiterions une création de places d’ici 2028, car l’espoir de 2026 s’amenuise vu les difficultés rencontrées.
Dans les grandes lignes, comment seront créées ces 170 places de plus ?
Des places seront créées au fur et à mesure des disponibilités de surfaces dont ma direction est en recherche permanente, du personnel éducatif disponible et des moyens financiers. Je profite de faire un appel aux généreux propriétaires prêts à nous mettre à
disposition des surfaces à des coûts très raisonnables. Les locaux sont la première étape d’un projet.
Sur la base de projets en cours ou à venir, nous envisageons à moyen terme 49 places (projet réduit par le Conseil communal) dans le projet Chamblandes-Dessous (ECA), 81 places dans le projet Guillemin 9-11 auxquelles s’ajoutent à très court terme les 44 places d’ici octobre soit un total de 174 places.
Que sera-t-il dédié à l’enfance dans le plan de quartier Clergère Nord ?
Nous sommes au tout début du projet, la répartition et l’affectation des surfaces ne sont pas définies. La question de surfaces pour l’accueil de jour sera traitée le moment venu.
En tant que municipal en charge du dossier et président de l’association Entraide familiale vaudoise, que devrait-il être entrepris dans votre commune pour répondre aux familles dans le besoin ?
En tant que président de l’Entraide familiale vaudoise (EFV), association faîtière cantonale, je ne vais pas dire aux communes ce qu’elles doivent faire ; à chacun sa place et ses responsabilités. Nous sommes là pour accompagner nos associations dont les activités sont variées. Certaines sont encore actives en faveur de la petite enfance avec des services de garderies, haltes-jeux et jardins d’enfants, accueillantes en milieu familial.
Historiquement, plusieurs de nos associations ont géré bénévolement des structures d’accueil pendant de nombreuses années, seul le personnel éducatif était salarié. Vu l’explosion des demandes de garde, il n’était plus supportable aux structures bénévoles de fonctionner, la professionnalisation de la gestion est devenue indispensable. Elles se sont donc tournées vers les communes afin de reprendre la
gestion des structures.
Depuis l’application de la nouvelle loi sur l’accueil de jour de l’enfant (LAJE en 2006), nous assistons à une modification structurelle de l’enfance avec la constitution de réseaux sur tout le canton de Vaud, les entraides familiales se trouvant ainsi en phase d’adaptation. Il faut rappeler que dès la création de la Fondation pour l’Accueil de jour des enfants (FAJE), l’EFV possède un siège de droit à sa Chambre consultative grâce au travail reconnu effectué par les membres de notre association.
En résumé, nous accompagnons les structures d’entraide familiale de notre association et les soutenons, si besoin, dans les relations avec les communes, car le dialogue est primordial.