Plan canicule difficile à appliquer sur les chantiers
Le monde de la construction n’est pas propice aux temps morts. Malgré les recommandations des syndicats et du canton, les ouvriers continuent de s’activer.
Texte et images Thomas Cramatte
MétéoSuisse n’en est pas à sa première alerte canicule. Si les températures élevées sont propices à la baignade, elles rendent le travail sur les chantiers plus exigeant et plus dangereux. Dès 34 degrés, le plan canicule recommande l’arrêt des activités physiques : « A partir de 30 degrés, le risque d’accident augmente, car le travail est plus pénible physiquement », communique Unia, le plus grand syndicat du pays. Les vagues de chaleur peuvent conduire à divers incidents comme une insolation, une déshydratation, des brûlures de la peau, ou même représenter des urgences médicales, comme un coup de chaleur. Tant d’éléments qui impliquent la responsabilité des employeurs : « Nous nous assurons d’avoir suffisamment d’eau à disposition sur les chantiers », transmet par téléphone Jacques-Henry Rouge, co-responsable d’une entreprise de charpente à Palézieux. La Fédération des entrepreneurs recommande de boire entre 3 et 6 litres d’eau par jour lors de forte chaleur.
Outre l’accès à l’or bleu, plusieurs entreprises du domaine ajustent leurs horaires de travail pour fuir le cagnard. C’est le cas de Jean-Pierre Ceppi, ferblantier installé à Lutry : « Nous commençons plus tôt le matin et profitons de la fraicheur de l’atelier l’après-midi ». Seul bémol, l’interdiction de faire du bruit durant les périodes de repos. En principe, les réglementations sur les décibels émises sont fixées par les ordonnances de police des Municipalités.
« Nous avons toujours entendu qu’il n’était pas possible de faire du bruit avant 8 heures. Il serait peut-être temps de revoir cette règle lors de canicule », suggère le ferblantier. L’ordonnance fédérale contre le bruit (émise en 1986), mentionne que les maîtres d’état peuvent, avec un permis de la Municipalité, effectuer des travaux durant les périodes de repos.
Domaine sous pression
« Si nous ne travaillons pas lorsqu’il fait très chaud, nous ne pourrions jamais respecter les délais », précise Jacques-Henry Rouge. Des retards qui se paient au prix fort, puisque les maîtres d’état sont contraints de verser des pénalités lors de retard des travaux, ce que l’on appelle : Pénalité de jours de retard. Un principe qui déplaît aux défenseurs des travailleurs : « Nous demandons la fin des pénalités sur les jours de retard. Car ainsi, les employeurs seraient plus enclins à interrompre les activités sur les chantiers en cas de fortes chaleurs », renseigne Virginie Pilault, porte-parole chez UNIA. Pour le syndicat, la température limite devrait être mieux définie dans la CCT.
Si le plan canicule du canton n’est pour l’heure qu’une recommandation, un employeur est dans l’obligation de prendre soin de ses collaborateurs : « Il s’agit d’une obligation légale », précise Jean-Pierre Ceppi. Les travailleurs, les premiers concernés, ne semblent pas tous vulnérables par rapport aux grosses chaleurs : « Pour nous, cette canicule n’est pas vraiment plus forte que les années précédentes », se remémore Carlos*. « Nous commençons à nous y habituer », poursuit ce dernier, non sans ironie.
*Nom d’emprunt