Peintures lumineuses et sculptures sur bois
A L’Estrée, à Ropraz, jusqu’au 29 mai
Pierre Jeanneret | La Fondation L’Estrée, à Ropraz, accueille, selon son habitude, conjointement deux expositions-vente fort différentes, et qui néanmoins se répondent. Le peintre Helmut Guth est né en Forêt-Noire en 1953. Il y travaille, ainsi qu’à Pully. Il a à son actif de nombreuses expositions personnelles, de l’année 2000 à nos jours. La première partie de l’exposition est consacrée à ses peintures de l’Antarctique : glaciers, icebergs se miroitant dans l’eau. On pourrait croire qu’il s’agit de photographies. Mais non! ce sont des peintures à l’huile, qui témoignent d’une extraordinaire virtuosité. L’artiste est très sensible aux lumières, qui donnent à ses figures de glace se reflétant dans l’océan bleu une sorte de pureté originelle. Même si son œuvre ne se veut pas explicitement militante, elle fait songer aux menaces qui pèsent sur l’écosystème à cause du réchauffement climatique, lequel voit s’effondrer des pans entiers de glace ! Il en va de même pour ses vues du Mont Rose à la blancheur immaculée et quasi virginale.
Si nous sommes un peu moins convaincus par ses toiles consacrées à Lavaux, à ses vignes et à ses pans de murs, car déjà vues ailleurs, on éprouve une véritable fascination devant ses fermes isolées du Pays de Vaud, que l’on croirait sorties de la Grande Plaine américaine, à l’époque de la Dépression des années trente. Maisons vides, aux volets fermés, sans nulle présence humaine… On remarquera la subtilité des cadrages, presque photographiques. Quant aux portraits, hyperréalistes, ils font songer aux toiles du peintre étasunien Edvard Hopper. De l’ensemble de l’œuvre d’Helmut Guth se dégage un sentiment d’étrangeté et de poésie.
Le sculpteur Jean-Paul Blais vit et est actif à Lausanne. Il a choisi de travailler le bois patiné, en ne retenant pour couleur que le noir. Mais un noir, si l’on ose dire, qui épouse plusieurs couleurs. Oeuvres abstraites, sobres à l’extrême, et qui invitent à la réflexion, voire à la rêverie. Entre ce travail sur bois au noir austère, mais subtil par son découpage, et les peintures toutes baignées de lumière d’Helmut Guth, se dégage une étrange parenté.
Les visiteurs pourront en profiter pour parcourir le petit village de Ropraz. Sa chapelle romane remonte au 12e siècle. Et dans le cimetière tout proche, celles et ceux qui le souhaitent ne
manqueront pas de s’incliner devant la tombe du grand poète et écrivain Jacques Chessex, qui nous a quittés en 2009.