Patrimoines
« Un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle ». Ce proverbe, attribué à un défenseur de la tradition orale africaine, est une reformulation de son discours donné à l’Unesco en 1960. Aujourd’hui, il prend encore une fois du sens.
L’événement qui a secoué Oron en fin de semaine passée est bien plus qu’un incendie. C’est d’abord la disparition d’un éminent personnage. François Jan a vécu et fait vivre la région comme bien peu peuvent se targuer de l’avoir fait. Sa douceur et son air de ne pas y toucher n’avaient d’égal que l’attention qu’il portait à tous. N’oubliant jamais un visage, il était aussi la mémoire vivante d’Oron. Des photos et des anecdotes, il avait tant vécu qu’il est impossible aujourd’hui que d’aucuns de nous, habitants d’Oron et plus, ne se souviennent de l’avoir croisé à un moment ou un autre de notre vie. Il a aussi été un acteur incontournable de la vie sociale et économique et la ville et ses alentours savent qu’ils lui doivent beaucoup.
Le bâtiment réduit en cendres était le sien, mais c’était aussi une ancienne maison de maître classée au patrimoine. Son niveau de classement interdit l’altération de la façade, même le feu l’avait compris ! Il ne reste maintenant qu’une coquille calcinée à laquelle il va bientôt falloir redonner une vie intérieure.
Marie et Nicolas animaient cette bâtisse avec la passion des poètes. Certes, l’intérieur de leur librairie n’est que désolation et leur moral est dévasté, mais il y a obligation. Déjà les jours rallongent, un printemps va bientôt renaître et ce lieu de culture ne deviendra pas un lieu de pèlerinage pour la Toussaint. La renaissance est nécessaire et voulue par bon nombre de nos concitoyens et au-delà.
Une bibliothèque vivante a disparu et une librairie a été anéantie, le temps de l’écriture commence.
Arvid Ellefsplass