Opinion
Consommation d’alcool et risques pour la santé : Le « Lancet » corrige !
Une nouvelle étude du Lancet nuance sérieusement ses conclusions de 2018
Dr J.-C. Estoppey, Médecin de famille et vigneron | On se souvient qu’une étude du «Lancet» en 2018 avait fait grand bruit, concluant que la consommation d’alcool était dangereuse dès la première goutte.
J’avais (cf https://www.bilan.ch/opinions/jean-charles-estoppey/dangers-de-lalcool-encore-uneetude-inapplicable-a-la-suisse…) largement contesté ces conclusions, notamment parce que cette compilation d’études avait ciblé des populations très diverses, aux habitudes de consommation complètement différentes sans différencier le vin, la bière ou les alcools forts. Donc une étude inapplicable pour la Suisse qui consomme relativement plus de vin. Les auteurs admettaient dans leurs conclusions qu’une de leurs faiblesses était justement qu’ils ne savaient pas comment les gens consomment ces doses moyennes calculées.
En cette année 2022 est parue dans le même « Lancet » une nouvelle compilation de nombreuses études concernant le risque pour la santé de la consommation d’alcool, mais cette fois centrée sur l’âge et la localisation des diverses populations dans le monde. Et cette fois les conclusions sont plus nuancées, même si des éléments primordiaux dans cette évaluation du risque n’ont toujours pas été pris en compte, comme indiqué par les auteurs, comme la façon de consommer et le type d’alcool notamment. Voici les conclusions de cette étude telles que reprises et traduites du « Lancet » : « En conclusion, la relation entre la consommation modérée d’alcool et la santé est complexe et va continuer à susciter une grande controverse dans la littérature scientifique.
Etant donné que les données disponibles suggèrent que de faibles niveaux de consommation d’alcool sont associés à un risque plus faible de certaines maladies et à un risque accru pour d’autres, les recommandations en matière de consommation d’alcool devraient tenir compte du profil épidémiologique complet, qui inclut l’incidence des maladies au sein des populations.
… Enfin, étant donné que la majorité de la population mondiale qui consomme des quantités nocives d’alcool est constituée de jeunes adultes et principalement de jeunes hommes, il est important, afin de minimiser les problèmes de santé dus à la consommation d’alcool, de donner la priorité aux interventions ciblant ces groupes démographiques. »
De mon point de vue, et après m’être penché de façon détaillée aussi bien sur l’étude publiée en 2018 que sur celle présentée ci-dessus de 2022, il manque toujours des éléments essentiels pour l’appréciation correcte de la dangerosité de la consommation
d’alcool :
• Sous quelle forme cet alcool est consommé (spiritueux, vin, bière)
• Comment il est bu (consommation régulière modérée de vin versus alcoolisation massive le week-end).
Ma conclusion reste la même : boire en une fois une quantité importante d’alcool et avoir un accident ou un coma éthylique reste à l’évidence un danger majeur. Alors que consommer chaque jour 1,2, voire 3 dl de vin n’a au pire aucune conséquence négative sur la santé et probablement même un effet positif concernant certaines maladies (cardio-vasculaires en tous cas). Tant que ces aspects n’auront pas été pris en compte, on restera dans des généralités peu pertinentes en termes de santé publique.