Opinion
Une Suisse libre de pesticides

Murielle Kathari Lauritzen, présidente des Vert.e.s Lavaux-Oron | Le 13 juin, nous voterons pour « Une Suisse libre de pesticides de synthèse ». Comme consommatrice et grand-maman avant tout, cette initiative m’interpelle particulièrement. La campagne est tendue et j’écoute les arguments des opposants. En traitant les initiants de tous les noms d’oiseaux, ils semblent oublier que les produits cultivés avec des pesticides de synthèse finissent dans notre assiette et qu’il ne s’agit donc pas de s’ingérer dans leurs affaires, mais de notre santé et de celle de nos familles et qu’à ce titre, nous sommes légitimes pour défendre nos droits à une alimentation exempte de produits toxiques. Sur les étals, les produits sont alléchants, mais nous empoisonnent petite dose autorisée après petite dose autorisée. Dans nos sols, les molécules de synthèse ont une durée de vie bien plus longue que le cycle de la culture pour laquelle elles sont utilisées. Pire, certaines de ces molécules en se dégradant se transforment et sont encore plus toxiques que les molécules d’origine. Les fabricants se gardent bien de rechercher ou de documenter publiquement les effets cocktail potentiels des différents pesticides de synthèse utilisés dans les champs, les vergers et le vignoble et leurs effets néfastes sur le vivant. Au vu des enjeux financiers, la logique actuelle qui prévaut dans notre société est respectée : le profit avant l’éthique. Les opposants ne savent pas comment nourrir la Suisse sans intrants chimiques et sans importations, par ailleurs soumises aux mêmes conditions. L’agrochimie mise sur un rendement légèrement moindre pour convaincre de sa nécessité. Pourtant des agriculteurs-trices bio avec d’autres pratiques et sans produits de synthèse obtiennent de bons rendements et maintiennent la fertilité du sol, contrairement à l’agriculture conventionnelle qui a toujours plus besoin d’intrants chimiques pour des rendements qui stagnent, voire baissent. C’est cette dépendance à l’industrie chimique qui fait perdre aux agriculteurs-trices le contrôle sur leur travail, pas les aspirations de leurs concitoyens à des produits sains. Nous n’avons pas besoin de pesticides de synthèse pour nourrir le pays, mais d’une recherche agronomique permettant d’améliorer des pratiques agricoles pérennes. Nous avons besoin davantage de cultures destinées à la consommation humaine, plutôt que fourragère et de moins de gaspillage. Une partie non négligeable de la production finit à la poubelle. C’est un comble de promouvoir une agriculture productiviste pour alimenter le gaspillage de précieuses ressources. Du champ à l’assiette (et à la poubelle), la route est longue et chaque acteur dans ce processus a sa part de responsabilité. Les prix actuellement bas des denrées alimentaires sont un leurre et nous payons la différence avec les dégâts collatéraux (effets sur la santé, pollutions) que l’agriculture industrielle et chimique provoque mais ne répare pas. Il est temps de changer et de payer le vrai prix au producteur-trice d’une alimentation saine et respectueuse de l’environnement. Quand ces produits ne seront plus l’exception, ils ne seront plus sujets à des marges abusives qui gonflent les prix artificiellement. C’est avec conviction que je voterai OUI à l’initiative. Un vote pour une agriculture de conservation et pas de destruction, un vote pour la santé de tous et de nos sols, un vote pour la sauvegarde de la biodiversité et des terres agricoles pour les générations futures.