Motocyclisme – « Sur les longues lignes droites, j’ai le temps de me reposer »
Surdoué du guidon, Yann Damond file à toute allure vers le Grand Prix Moto. Agé de 19 ans seulement, il doit encore faire ses classes au championnat européen 600 Supersport, antichambre du championnat du monde.
Gérard Bucher | Intelligent, posé, déterminé, plutôt beau gosse, Yann Damond coche toutes les cases. Le gendre idéal en somme. Qu’il dompte sa Yamaha R6 à près de 270 km/heure n’y change rien. Bien au contraire. Il ajoute ce soupçon d’adrénaline à son CV qu’on ne peut que lui envier. Bien fait dans sa tête, il aurait pu tout aussi bien poursuivre des études à l’université, après avoir bouclé son gymnase en section biologie-chimie. Il a choisi une autre route, plus sinueuse. Un seul objectif : devenir le meilleur pilote de moto du monde.
Pour l’heure, Yann Damond évolue en Supersport, en championnat d’Europe. « Celui que vous suivez sur votre écran de télévision, explique-t-il, c’est le Moto GP ou Grand Prix Moto, qui se subdivise en trois catégories, Moto GP en 1000cc, Moto 2 en 600cc et Moto 3 en 300cc. On peut être champion du monde des deux côtés. Ce qui change, c’est que le Moto GP regroupe des prototypes, uniquement destinés à la piste, tandis que l’autre championnat du monde réunit des engins très proches des motos de série, que n’importe qui peut donc acheter à la base. En Superbike, il y a également des catégories : Superbike 1000cc, Supersport 600cc et Supersport 300cc. Pour ma part, je roule en 600cc, la catégorie que Dominique Aegerter a remportée en 2021. »
Déjà un petit génie
Ces deux dernières saisons, Yann Damond a surtout couru en Italie, au sein de circuits où il s’est immédiatement fait remarquer par son intelligence tactique et ses résultats. On parle déjà de lui comme d’un petit génie. Bien des portes lui semblent donc ouvertes.
« Le plus important pour les décideurs, souligne le Lutryen, c’est la régularité. Une première place ne suffit pas, si elle a été obtenue suite à une prise de risques inconsidérée. » Cette saison, Yann Damond vise prioritairement la première place du classement général de sa catégorie, laquelle comptera 6 étapes (Grobnik, Pannonia Ring, Brno, Grobnik, Slovakiaring, Grobnik) entre le 17 mai et le 20 octobre 2024. A chaque fois, deux courses d’une durée de 25 minutes environ figurent au programme du week-end. Yann Damond honorera cependant un premier rendez-vous, hors championnat, les 6 et 7 avril sur le circuit de Misano, sur la côte Adriatique.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, Yann Damond n’a pas constamment le nez dans le guidon. « J’ai six jours d’entraînement par semaine à la maison, détaille-t-il, car il faut se préparer physiquement. Trois jours durant, je suis des séances de cardio sur un vélo. Soit une heure et demie en longue durée pour faire la base du cœur, soit des entraînements fractionnés où je me mets devant une montée. Les trois autres jours sont destinés au renforcement musculaire. Je m’astreins encore à une heure de stretching et de mobilité par jour sous la houlette d’un coach. J’ai également un préparateur physique à ma disposition. » Autant dire que notre champion enfourche davantage son vélo que sa moto. Pour le reste, Yann Damond occupe son temps à rencontrer les sponsors et les journalistes, ainsi qu’à peaufiner son site internet. Hélène, sa compagne, l’aide sur ce dernier point.
Le motocross pour les réflexes
Habile comme un Singe, qu’il est forcément, Yann Damond ne manque pas une occasion de pratiquer le motocross chaque fois qu’il se trouve en Italie. « Sans faire de sauts bien évidemment, ajoute l’intéressé. Je profite du terrain que mon coach a aménagé pour l’occasion. Cela me permet d’améliorer mes réflexes. » Rien n’est donc laissé au hasard chez Yann Damond, jusqu’à son régime, drastique. Curieusement, le beurre de cacahuète est recommandé dans son cas. Chaque gramme compte néanmoins. Il pèse très exactement 63 kilos. Le but est de conserver des muscles aussi élastiques que possible.
Lorsqu’il enfile sa combinaison, qui doit bien faire 9 kilos, il n’oublie pas de remplir le petit réservoir d’eau qui l’accompagne dans le dos. Un tuyau lui permet de s’hydrater dans les lignes droites. « Là où on a le temps de se reposer », raconte-t-il sans forfanterie. A 270 km/heure tout de même.
Il faut encore savoir que l’essence ne se calcule pas au litre sur les courses, mais au poids. Pour être plus précis. On parle de 400 à 500g par tour. Un autre monde décidément.