La petite histoire des mots
Groenland

Il ne se passe presque plus un jour sans que la nouvelle administration américaine, Donald Trump en tête, ne répète que les Etats-Unis veulent annexer le Groenland, un territoire autonome danois, pour des raisons de sécurité. Les séjours sur l’île d’émissaires de la Maison Blanche se succèdent, notamment dans la grande base militaire américaine qui s’y trouve, au grand dam de la quasi-totalité des habitants de l’île. Eux aspirent à terme à l’indépendance et ne semblent guère disposés à passer sous la domination américaine.
Le nom Groenland (Grønland en danois), donné par les Occidentaux à cette île, la plus vaste de la planète, a très vraisemblablement été imaginé par le chef viking d’origine norvégienne Eiríkr Rauð, surnommé Eric le Rouge, en raison de la couleur rousse de ses cheveux et de sa barbe. Banni d’Islande pour meurtre, après un conflit avec un voisin qu’il tua par vengeance, il serait arrivé à l’extrême-sud de l’île vers la fin du Xe siècle, avec sa famille, quelques compagnons et un petit groupe d’esclaves. En vieux norrois, la langue scandinave médiévale, Il donna à cette terre le nom de « Grœnland », autrement dit « Terre verte », un mot composé de « grœnn » (vert) et de « land » (terre).
Il est vrai que dans un passé géologique pas si lointain, les glaces qui recouvraient l’île avaient fondu. Le Groenland s’était alors paré d’une toundra verdoyante. Etait-il encore couvert de végétation lorsque Eric Le Rouge et ses compagnons y débarquèrent ? C’est peu probable ! Un certain nombre d’historiens estiment qu’Eric le Rouge a choisi ce nom séduisant pour attirer de nouveaux colons. A travers les siècles, les colons scandinaves n’y auraient jamais cependant dépassé le nombre de 2 à 3 milles.
Parti du Groenland, et suivant la route de navigateurs qui l’auraient précédé, le fils d’Eric le Rouge, Leif Erikson (en norrois Leifr Eiríksson), est le premier Européen connu à avoir posé le pied en Amérique du Nord continentale. Au cours de ses expéditions, il aurait successivement débarqué sur l’île de Baffin, sur les rives de l’actuel Labrador, puis sur la côte de l’actuelle Nouvelle-Ecosse qu’il nomma Vinland (Pays du Vin) après y avoir vu de vignes sauvages.
Le Groenland a sans doute été habité pendant les 4500 dernières années, et peut-être plus, par des peuples de l’Arctique, aujourd’hui disparus. On estime que les peuples inuits qui y vivent actuellement, distincts des Amérindiens, sont arrivés au XIIIe siècle, sans doute du Canada. Depuis la fin du XXe siècle, en français, le terme « Inuit » a remplacé celui d’ « Esquimaux », jugé péjoratif car vraisemblablement issu du mot « excommunicati » (excommuniés), utilisé jadis par les jésuites pour désigner ces populations non chrétiennes, réticentes à se convertir. En inuktitut, une des principales langues inuit du Canada, « Inuit » veut dire « gens » ou « humains ».
Pour les moins de 60’000 Inuits qui l’habitent, le Groenland porte le nom de « Kalaallit Nunaat » ce qui signifie « terre du peuple ». Ces fiers Groenlandais vont-ils un jour accepter l’argent du milliardaire new-yorkais pour troquer leur drapeau rouge et blanc, symbolisant les glaces, la mer et le soleil, pour la bannière étoilée ? Dans l’immédiat , cela semble peu probable…