La petite histoire des mots
Arme
Le matériel de guerre suisse se vend moins bien. Les exportations d’armes produites par l’industrie militaire ont reculé de 27 % en 2023, par rapport à 2022. Certains s’en inquiètent, comme les politiciens et les entreprises actives dans ce secteur qui voient dans cette évolution un lien avec le refus de Berne de livrer des chars Leopard 1. D’autres s’en réjouissent, comme le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA).
Dans l’univers des armes, on parle d’ « armes d’épaule » pour désigner celles qui sont tenues à l’épaule pendant le tir. C’est le cas des carabines militaires, des fusils d’assaut, de certaines mitrailleuses ou encore des lances roquettes. Pendant les marches ou les défilés, ces armes sont portées sur l’épaule, comme c’était le cas jadis des mousquets, des lances, des hallebardes ou des arbalètes. Il suffit de voir la célèbre statue de Guillaume Tell à Altdorf, en tenue de guerrier, l’arbalète à l’épaule, le bras posé sur l’épaule de son fils qui tient lui-même fermement la main de son père tout en le regardant avec admiration.
Pourquoi insister sur les épaules, alors qu’il est question ici de l’étymologie du mot « arme » ? Tout simplement parce que, à l’origine, la notion d’arme était liée à la protection de cette région morphologique du corps humain, se situant à la jonction du tronc avec le membre supérieur. En français, « arme » nous vient en effet des termes latins « arma », qui avait le même sens, et « armo » qui désignait tous les outils servant à se défendre. Or ces deux mots sont liés à « armus » qui veut dire « épaule » ou « bras ».
Selon les linguistes, le mot latin « armus » est sans doute lui-même issu d’une ancienne racine indoeuropéenne signifiant proprement « jointure ». Nous la retrouvons d’ailleurs dans l’allemand « Arm » et dans l’anglais « arm », deux mots qui désignent le « bras ». Le substantif « armus » dérive, quant à lu, i du verbe « armare », qui signifie « se couvrir les épaules » pour se protéger, au moyen d’une cuirasse ou d’un bouclier, par exemple. C’est ce verbe qui a donné « arma », que nous avons vu plus haut et qui, chez les Romains, désignaient plus particulièrement les armes défensives, d’où le mot « armure », qui est bien restée une « arme » purement défensive en français moderne.
Par ailleurs, « arma » ayant aussi le sens plus large d’outils ou d’instruments, le latin « armarium » nous a donné le mot « armoire », ce meuble qui sert à ranger toutes sortes de contenus. De même, le mot « armamenta » qui veut dire « armement » s’applique de nos jours encore à un navire, qu’il soit militaire ou civil, lorsqu’il est « armé » par un « armateur ».
L’expression « passer l’arme à gauche », qui signifie mourir, nous vient du XVIIe siècle, lorsque les soldats devaient charger leur fusil. Ils le tenaient de la main gauche, afin de pouvoir utiliser leur main droite. Cependant charger ces fusils à poudre prenait beaucoup de temps, laissant les soldats très vulnérables. Un grand nombre d’entre eux étaient tués en chargeant leur arme. En outre, lors des funérailles avec les honneurs militaires, les soldats passaient leur arme à gauche, canon vers le sol, en signe de deuil et de respect envers ceux qui étaient tombés.