La petite histoire des mots
Tank

La nouvelle a provoqué la colère de la Russie de Vladimir Poutine qui entend poursuivre à tout prix sa guerre contre l’Ukraine : les Etats-Unis, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, ou encore le Canada, ont finalement promis de livrer des chars d’assaut, autrement dit des tanks, à l’armée ukrainienne, pour l’aider à repousser les assauts de l’armée russe et poursuivre sa reconquête des territoires perdus. Ce ne sont cependant pas les premiers chars d’assaut livrés à l’Ukraine depuis le début de la guerre. Au mois d’avril dernier, la Pologne et la République tchèque avait déjà fourni à Kiev des chars lourds d’origine soviétique.
Bien qu’il soit un peu vieilli, le terme « tank » a longtemps été préféré au mot composé « char d’assaut » pour désigner ce système d’arme mobile constitué d’un canon, de mitrailleuses et parfois d’un lance-flammes, montés sur un véhicule automobile blindé, le plus souvent chenillé, permettant à la fois de progresser sous le feu ennemi et de tirer. « Tank » et « char d’assaut » sont parfaitement synonymes et ont leur place dans les dictionnaires de la langue française. D’ailleurs, les soldats qui conduisent ce type de véhicule de combat sont toujours appelés des « tankistes » en bon français.
Les premiers « tanks », mis au point par les Britanniques, firent leurs apparitions sur le champ de bataille, lors de la Première Guerre mondiale. Le concept moderne de ce véhicule de combat fut imaginé par le colonel Ernest Dunlop Swinton, un tacticien militaire anglais, qui y voyait un moyen de percer les défenses allemandes, alors que la guerre des tranchées avait immobilisé les fronts et vouait à l’échec toute tentative d’offensive. Un prototype, appelé « Mother » (Mère), effectua ses premiers essais en février 1916. L’armée britannique en commanda aussitôt une centaine d’exemplaires sous la dénomination Mark I. Quelques mois plus tard, ils furent engagés dans la bataille de la Somme.
Afin de tromper l’ennemi et de garder le secret, les Britanniques pensèrent d’abord appeler ces véhicules « Water Carrier » (porteur d’eau), pour faire croire aux Allemands qu’il s’agissait d’engins autotractés destinés à ravitailler en eau les troupes déployées en Orient. C’est finalement le terme « tank », qui signifie « réservoir », qui fut choisi. Ce mot serait d’ailleurs d’origine indienne, les Britanniques, alors maîtres de l’Inde, ayant, selon toute vraisemblance, repris le terme « tānkũ » qui dans la langue gujarati, parlée principalement dans l’ouest de l’Inde, désigne une citerne souterraine.
Les Français qui ne tardèrent pas à produire leurs propres blindés, adoptèrent eux aussi le mot « tank » dès 1916, avant de lui préférer « char d’assaut », puis, dès les années soixante, « char de combat » pour les blindés les plus lourdement armés. Voilà pour l’origine du mot « tank » !
Terminons peut-être par cette citation, bien appropriée sans doute à la situation actuelle, de l’auteur-compositeur-interprète, poète et écrivain québécois Felix Leclerc : « Avec des armes, de la brutalité, des tanks et des bombes, il est facile de conquérir un pays pauvre. Ce qui est difficile, c’est de conquérir le peuple qui y vit ».