La petite histoire des mots
Catholique
Georges Pop | La nouvelle est presque passée inaperçue, elle n’en constitue pas moins une petite révolution: la semaine dernière, le pape François a nommé la Française Nathalie Becquart à la fonction de sous-secrétaire du Synode des évêques. Elle est la première femme à accéder à ce poste et devient la première femme à avoir le droit de vote dans ce cénacle chargé d’examiner les grandes questions doctrinales de l’Eglise catholique. Voilà qui nous amène à l’adjectif « catholique » qui nous vient du grec « katholikos » et signifie « universel ». Dans la littérature latine, ce terme n’a jamais été remplacé par son équivalent latin, « universalis ». Il a simplement été transcrit en « catholicus », de la langue d’Homère à celle de Virgile. Dès l’aube du christianisme, ce mot fut utilisé par divers auteurs chrétiens pour distinguer les communautés qu’ils jugeaient conformes aux dogmes de l’« Eglise universelle », face à l’émergence de nombreuses sectes se réclamant du Christ. Le terme apparait en vieux français sous la forme « catoliche » au XIIIe siècle, puis sous la forme « catolicque » dès le début du siècle suivant. Mais ce n’est qu’avec l’émergence de la Réforme, sous l’impulsion de Martin Luther, Ulrich Zwingli et Jean Calvin, notamment, au XVIe siècle, que les chrétiens restant soumis à l’autorité du Souverain pontife en ont généralisé l’usage, afin de se distinguer des protestants. Il est cocasse de relever que ce sont les milieux hostiles à la Réforme qui, par dérision, utilisèrent les premiers le mot « protestant » pour se moquer des princes-électeurs du Saint-Empire romain germanique qui avaient « protesté » contre l’injonction de l’empereur Charles Quint de se soumettre à l’Eglise romaine. Malgré son acception initialement péjorative, cet adjectif fut progressivement adopté, comme substantif, par les adeptes de la Réforme pour se désigner eux-mêmes. Il invoquèrent le fait que, pris dans son acception littéraire, « protester » signifie « exprimer avec force et certitude que quelque chose est vrai ». Ce sens subsiste d’ailleurs, de nos jours, dans l’expression « protester de son innocence ». Pendant les guerres de religions, les protestants furent aussi désignés, par les catholiques, sous les vocables « huguenots » et « parpaillots ». Le mot « huguenot » est sans doute apparu à Genève, vers 1525, par une altération du mot allemand « Eidgenossen » qui désignait les Confédérés et signifie « camarades liés par un serment ». Il est passé en France, dès le milieu du XVIe siècle. Attesté chez Rabelais dès 1535, le mot « parpaillot », quant à lui, est vraisemblablement issu de l’italien « parpagglione » qui veut dire « papillon »; peut-être par allusion à l’infidélité des protestants qui « butinaient » d’une église à l’autre ou parce qu’ils finissaient sur le bûcher, à la façon d’un papillon de nuit qui se brûle les ailes en s’approchant de la flamme d’une bougie. Les catholiques furent, de leur côté, taxés de « papistes » par les protestants pour affirmer la tyrannie pontificale et dénoncer la vénération dont le pape était l’objet. Terminons, dans un esprit apaisé, par cette savoureuse citation du regretté chanteur français Mouloudji qui, parlant de lui, avait déclaré: « Catholique par ma mère, musulman par mon père, un peu juif par mon fils… et athée grâce à Dieu ».