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« Anniversaire aux éclats sublimes » au Théâtre du Jorat
Six anniversaires pour le prix d’un, c’est ce que proposera le Théâtre du Jorat ce dimanche 18 juin. L’occasion d’y découvrir, entre autres surprises, une nouvelle œuvre de Valentin Villard.
Quiconque s’est attelé ne serait-ce qu’une fois à l’organisation d’une grande fête d’anniversaire sait quelle complexité revêt un pareil événement. De la constitution de la liste des invités au choix des menus, de la location des lieux à l’imagination d’un programme d’activités, on arrive bien souvent au moment-clef dans un état d’épuisement avancé. Vous les avez vécus, ces moments de stress, de fatigue, de contrôle ? Eh bien, le Théâtre du Jorat, lui, a pris la décision de les vivre au sextuple. Les objets de fête en lien direct avec l’institution méziéroise ne manquent de fait pas en cette année 2023 et permettent d’envisager ce jubilé en six-pack.
C’est d’abord une sommité du théâtre vaudois qui verra ses cent cinquante ans fêtés dignement. C’est en effet au mois de mai 1873 que René Morax est venu au monde. C’est avec lui que le Théâtre romand a pris son « t » majuscule, s’éloignant peu à peu de son amateurisme et de ses accueils de productions d’outre-Jura pour se constituer un répertoire patrimonial. C’est sous son impulsion, surtout, qu’est né le Théâtre du Jorat, bâtiment à l’architecture unique, inauguré le 7 mai 1908 avec La Dime, deuxième pièce du même Morax, déjà présentée cinq ans plus tôt dans les hangars méziérois des tramways du Lausanne-Moudon. Une figure dont la mort, survenue il y a maintenant soixante ans, donnera à la direction actuelle l’occasion d’un double anniversaire mémorable.
Aliénor, Le Roi David, La Servante d’Evolène, Davel , voilà autant d’œuvres de ce dramaturge patrimonial qui auront marqué la Grange Sublime. C’est d’ailleurs en lien avec cette dernière œuvre qu’apparaissent les troisième et quatrième volets de cet anniversaire aux éclats multiples : les cent ans de la création du spectacle de Morax en hommage au héros vaudois par excellence, et les trois cents ans de la mort de ce même Davel. Après l’hommage qui lui a été rendu en 2019 par René Zahnd et Christian Favre sous forme d’opéra et en attendant celui dirigé par Nathalie Pfeiffer à Cully cet été, la Grange Sublime intégrera également le natif de Morrens dans la liste de ses prestigieux jubilaires.
Une liste à laquelle se joindra aussi l’un des compagnons de route de Morax, le compositeur Gustave Doret, avec lequel le dramaturge vaudois a souvent collaboré, notamment sur Aliénor ou La Nuit des Quatre temps. Celui qui reste également connu pour avoir mis en musique deux Fêtes des vignerons, en 1905 et en 1927, y verra commémorés les huitante ans de sa mort.
Reste un dernier invité à la table d’honneur de ces éclats sublimes. Et c’est un peu plus près du Léman que la direction du Jorat a décidé d’aller chercher ce dernier élément. Le chœur Pro Arte, fondé en 1947 sous le nom de chœur des Jeunes par André Charlet, autre figure majeure du monde des arts en Suisse romande, fêtera en effet ses trois quarts de siècles à cette même occasion. Dirigée d’une main de maître depuis vingt ans par Pascal Mayer, l’ensemble y interprétera Natures une toute nouvelle œuvre du jeune compositeur lausannois Valentin Villard librettisée par Stéphane Blok et Blaise Hofmann, qui sera précédée d’extraits d’œuvres de Gustave Doret et d’Arthur Honegger (autre compagnon de route de Morax).
Qu’attendre alors de ces festivités ? Peut-être quelques regards vers un passé glorieux à travers quelques notes d’un avenir enchanteur. Façon de rendre hommage à ce lieu où l’imaginaire et la poésie règnent en maîtres depuis plus de cent ans et auquel ces quelques vers de René Morax, issus de Nocturnes et prélude, son premier recueil de vers publié en 1900, semblent aujourd’hui faire écho :
« Beaux songes, plus légers qu’un rire ou qu’un soupir
Dites la litanie et l’antique prière,
Grave comme un refrain de chanson populaire,
Mariez l’espérance au chant du souvenir !
Beaux songes qui naissez quand expire le jour
Pèlerins de la nuit, conquérants pacifiques,
Construisez dans le bleu les palais magnifiques
Où je pourrai loger ma peine et mon amour. »