Journée de la femme
Retour sur la manifestation du 8 mars
Monique Misiego | Jusqu’au dernier moment, elles ont attendu leur autorisation. Après la décision du Conseil fédéral d’annuler tout rassemblement de 1000 personnes à cause du coronavirus, le collectif vaudois s’est tout d’abord demandé s’il ne fallait pas tout annuler. Mais il en faut plus pour les abattre. L’idée vint assez vite de séparer la manifestation et de diriger certains groupes vers d’autres lieux de Lausanne comme la Palud, la place de l’Europe, la Riponne bien sûr et Saint-Laurent. L’idée ne fut pas si mauvaise, les groupes de parole se déplaçant sur les différents sites pour lire les revendications. Ce fut une belle journée. Le soleil étant de la partie, le contact est plus facile, on engage la conversation, on se dirige sur d’autres lieux. Tous les milieux féministes étaient représentés, comme le groupe retraite, qui se bat déjà pour lutter contre l’élévation de l’âge de la retraite pour les femmes. Les femmes migrantes aussi, avec des communautés étrangères, évoquant les violences faites aux femmes aux quatre coins du monde. Un échange téléphonique a d’ailleurs eu lieu avec des manifestantes de Cadix en Espagne, qui ont exprimé leurs revendications et les femmes présentes ont fait de même, chaque public applaudissant l’autre. Les écoféministes, les groupes LGBT, toutes ont pu exprimer leur ras le bol. On y parla aussi de Polanski, avec cette fameuse mascarade de cérémonie des César où Adèle Haennel s’est levée après l’annonce du prix attribué à ce personnage. A plusieurs reprises, les femmes ont dit « ça suffit, quand on n’est plus d’accord, on se lève, on se casse ». Une flashmob reprise des manifestantes chiliennes « El violador eres tu » fut dansée le samedi soir et le dimanche sur la place Riponne. Un moment intense et festif, malgré la dureté du sujet. Cette flashmob a d’ailleurs été reprise par presque tous les collectifs de la Grève en Romandie. Des collectifs en place dans plusieurs villes comme Vevey, Yverdon, Moudon, Orbe, Morges, ont organisé diverses actions en rapport aux revendications du collectif. Une majorité de jeunes femmes dans cette manifestation, contrairement au 14 juin dernier où toutes les générations étaient représentées. Mais aujourd’hui, on dénote un virement assez significatif. Elles ont pris conscience de leur corps, elles savent ce qu’elles n’accepteront plus, et ça c’est un changement. Il faudra que le patriarcat en prenne conscience, vous n’arrivez pas à les faire taire celles-là. Notre génération de féministes fut raillée, moquée, traitée d’hystériques, et seules les plus téméraires s’accrochaient, contre vents et marées. Ces femmes-là, je vous le dis, vous ne les délogerez pas de si tôt. Mieux vaut accepter cela de suite. Et leur accorder la place qu’elles revendiquent, à savoir la même que les hommes, ni plus ni moins. Les femmes d’aujourd’hui ne veulent pas le pouvoir, elles veulent simplement pouvoir.