Hacker

La semaine dernière, l’administration fédérale, ainsi que plusieurs sites officiels suisses, ont été la cible d’un grand nombre de cyberattaques. Derrière ces agressions se trouvaient, selon toute vraisemblance, des « hackers » proches du Kremlin qui cherchaient à contrarier le discours du président ukrainien Volodymyr Zelensky, par vidéo, devant le parlement helvétique. Ils ne sont pas parvenus à leurs fins, mais l’alerte a été chaude !
Bien que rejeté par l’Académie française, le mot « hacker », emprunté au jargon informatique anglais, est largement passé dans notre langage courant pour désigner un pirate qui trompe les protections de nos ordinateurs par amusement, malveillance, vengeance politique ou dans l’espoir d’en tirer un profit. Ce terme est parfois francisé en « hackeur » ou « hackeuse ». « Hacker » est un dérivé du verbe « to hack », avéré en anglais dès le XVe siècle dans le sens de « hacher » ou de « couper en morceaux ». Le substantif « hacker » désignait quant à lui un hachoir ou un coupeur, une personne dont la profession est de couper, par exemple des tissus.
Dans les années 1950, les membres d’un club de modélisme ferroviaire du prestigieux Massachusetts Institute of Technology (MIT) détournèrent un système de téléphonie pour créer une maquette. Ils se donnèrent le nom de « hackers ». Dans l’argot de ce groupe, les « hacks » étaient des blagues destinées à démontrer leur aptitude et leur intelligence techniques. A cette époque, les premiers ordinateurs faisant leur apparition au MIT, le terme « hacker » prit progressivement le sens de virtuose de l’informatique.
De nos jours, dans le jargon des informaticiens, ce sens positif cohabite toujours avec celui de « pirate informatique » malveillant. Les « gentils hackers », qui se conforment à des règles éthiques, organisent régulièrement des « hackathon », des épreuves pendant lesquelles ils tentent collectivement ou individuellement de répondre à des défis technologiques, par exemple pour colmater les failles qui favorisent les cyberattaques. On estime à plus de 6000 milliards de francs le coût des attaques des « méchants hackers » dans le monde, chaque année.
Les puristes, emmenés par l’Académie, proposent depuis longtemps de remplacer tous les mots du charabia informatique anglo-américain par des termes choisis dans la langue de Molière. Ils estiment, par exemple, que « spaming » peut-être remplacé avantageusement par « arrosage » ; que « filoutage » ou « hameçonnage » sont plus corrects et mieux appropriés que « phishing » et qu’un « hacker » est tout simplement un « fouineur ».
Si les francophones du Canada, intransigeants dans la défense du français, sont sensibles à ces formulations, pour ceux du Vieux Continent, la bataille semble bien perdue !