Exposition – Géa Augsbourg chantre de nos vignobles


L’artiste Géa Augsbourg (1902-1974) est une célébrité dans nos contrées. Ses dessins représentant les travaux viticoles, les outils de la viticulture, les caves, les clients des cafés en train de « pintoiller » sont époustouflants de virtuosité. Synthétiques, ils sont constitués de traits d’une grande netteté, proches de la caricature, notamment dans les visages de ses personnages. Ils ornent de nombreux espaces privés et établissements publics. La vigne jouant un rôle de premier plan dans son œuvre, il était normal qu’ils soient montrés dans le Château d’Aigle, qui abrite précisément le Musée de la Vigne et du Vin.
Mais les travaux de Géa ne se réduisent pas à cet aspect régionaliste ! Il fut un grand dessinateur de presse (plus de 7000 dessins publiés !), un « portraitiste-minute » de personnages célèbres, comme André Gide, Picasso, Cocteau, Stravinsky, Ramuz, un illustrateur de nombreuses œuvres littéraires, un peintre trop méconnu, dont les travaux sont proches du cubisme et du purisme de Le Corbusier.
Né Georges-Charles Augsburger à Yverdon-les-Bains, il se fera surtout connaître dès le début des années trente à Paris, où il vit une première carrière. Il y rencontre notamment Jean Cocteau et Max Jacob. En 1939, à cause du déclenchement de la guerre et de la Mobilisation générale, il doit rentrer en Suisse. Le caporal Augsburger dessine notamment La vie en images du général Guisan, un ouvrage hagiographique, et des scènes de la vie militaire, ce qui est curieux de la part d’un pacifiste. Mais il faut bien gagner son pain ! C’est ce qui le conduit aussi, de 1944 à 1956, à écrire et dessiner dans le Journal de la Maison Charles Veillon, revue d’une haute tenue culturelle. Retourné à Paris, il publie ses dessins dans les journaux les plus prestigieux, comme Libération, dont il illustre la page-titre en 1949. Il est alors dans l’orbite du Parti communiste français. En 1949, il fait un reportage aux Etats-Unis, dont il dénonce le racisme et notamment les lynchages de Noirs par le Ku-Klux-Klan.
De retour en Suisse en 1957, il collabore très régulièrement à Contacts, une revue de la gauche plurielle, où ses dessins polémiques s’attaquent notamment au projet de fabrication de la bombe atomique pour équiper l’armée suisse. Il effectue également de nombreux voyages, particulièrement dans les pays de l’Est (Roumanie, Chine), ce qui ne le met pas en odeur de sainteté. Mais il consacre surtout d’innombrables dessins à la vie locale et régionale et, on l’a dit, surtout à la vigne. C’est l’aspect de son œuvre le plus connu.
On découvrira tout cela à travers l’exposition, dans le bel environnement du château savoyard d’Aigle. Un petit bémol cependant : l’exposition est présentée dans la tour, sur plusieurs étages, où l’on accède par un escalier assez raide, donc elle n’est pas recommandée aux personnes à mobilité réduite.
« Géa Augsbourg », Château d’Aigle
Jusqu’au 17 août 2025
Pour celles et ceux qui veulent en savoir davantage sur l’artiste, je recommande l’ouvrage remarquable et richement illustré d’Antoine Baudin, Géa Augsbourg 1902-1974, Lausanne, éd. d’en bas, 2002, 192 p.
On peut l’acquérir à la réception du château.