Les premières images pour James Webb
Texte Thomas Cramatte
La NASA a dévoilé lundi les premiers clichés du télescope spatial le plus abouti de tous les temps. Pour un coût de 10 milliards de dollars, en faisant ainsi le plus cher instrument spatial jamais conçu, sa mission est de remonter à la naissance de notre univers.
La première image capturée révèle un amas de centaines de galaxies : « Il s’agit de l’image infrarouge la plus profonde et la plus nette de l’univers lointain à ce jour », déclare la NASA dans un communiqué. Ces galaxies apparaissent telles qu’elles étaient il y a 4.3 milliards d’années, puisqu’elles se situent très loin de la Terre (4.3 milliards d’années-lumière).
Un premier cliché qui démontre une infime partie de l’univers, puisque pour se faire une idée de la zone photographiée par le télescope, il faudrait tenir à bout de bras un grain de sable, tout ce qui nous entoure correspondrait au reste de l’univers.
Danse gravitationnelle
Le « Quintette de Stephan » situé dans la constellation de Pégase, se trouve à environ 290 millions d’années-lumière. Quatre des cinq galaxies composant le quintette sont en interaction : « Sur la droite de l’image, on observe que ces galaxies sont dans une danse gravitationnelle », explique Hugo Lisoir sur sa chaîne YouTube. « Cela les étire et les déforme ». La galaxie se trouvant sur la gauche est de son côté plus proche de nous. L’instrument photographique à infrarouge moyen du télescope « MIRI », montre comment les galaxies qui se trouvent en interaction gravitationnelle stimulent la création d’étoiles.
Le « Quintette de Stephan » fut observé pour la première fois en 1878 depuis l’Observatoire de Marseille par l’astronome français, Edouard Stephan. Ce dernier avait répertorié sa découverte comme étant une accumulation de nébuleuses, pourtant, il s’agit bien de galaxies composées de milliards d’étoiles : « Ces images nous plongent dans l’immensité de l’espace », transmet Jean Aellen, passionné d’astronomie et membre de la société d’astronomie du Haut-Léman à Vevey (SAHL).
Les nébuleuses sont des nuages cosmiques composés de gaz et de poussières apparaissant lorsqu’une étoile meurt ou naît. Les galaxies, de leur côté, sont un groupe composé de milliers ou de milliards d’étoiles.
La nébuleuse de l’anneau austral
Cette nébuleuse est un nuage de gaz entourant une naine blanche, une étoile mourante, appelé aussi cadavre stellaire. La taille de la nébuleuse est estimée à près d’une demi-année-lumière de diamètre. Située à environ 2000 années-lumière de la Terre, elle est la nébuleuse planétaire la plus proche inventoriée aujourd’hui. En infrarouge moyen, les images démontrent qu’il n’y a pas seulement une étoile en son centre, mais bien deux astres.
Toujours au registre des nébuleuses, le télescope a photographié la nébuleuse de la Carène avec sa caméra à infrarouge proche (NIRcam) : « Cette nébuleuse ne nous montre pas la mort d’une étoile, mais plutôt comment les étoiles voient le jour », précise Hugo Lisoir. La découverte de la nébuleuse remonte à 1752, par l’astronome français Nicolas-Louis de Lacaille. La partie brune, présente sur le bas de l’image, correspond à des nuages de poussières et de gaz. C’est la matière première qui sert à former de nouvelles étoiles : « Les points brillants munis de huit branches sont des étoiles », commente le youtubeur.
Trace de vapeur d’eau
James Webb et les équipes de la mission ont dévoilé le spectre d’une planète en dehors du système solaire. Appelée exoplanète, ou extrasolaire, l’existence de ces dernières est évoquée depuis le XVIe siècle. Cependant, il faudra attendre le XIVe siècle pour que les scientifiques s’intéressent réellement à celle-ci.
WASP-96b est une planète géante située à près de 1150 années-lumière de la terre. Evoluant dans la constellation du Phoenix, son recensement remonte à 2013. Composée principalement de gaz, sa taille est environ 20 % plus grande que celle de Jupiter, cependant, sa masse est moitié moins élevée (0.48X). L’objectif pour le télescope était de sonder les composants chimiques formant l’atmosphère de WASP-96b. « Cela a permis de capturer la signature de l’eau dans l’atmosphère en question », communique la NASA. « Etre capable de dire ceci d’une planète située à plus de 1000 années-lumière de nous, est un exploit offrant des perspectives fascinantes pour ce télescope », ajoute Hugo Lisoir avec émotion. Futur prometteur pour James Webb, surtout quand on sait que ces premières images ont été réalisées durant une semaine, alors que l’instrument a été conçu pour tenir sa mission sur une vingtaine d’années.