A la rencontre des gens d’ici
Petar à Lutry
« Déjà ado à l’école, je mitraillais tout le monde avec mon appareil de photo, au risque d’exaspérer mes camarades. Mais je ne pensais pas devenir photographe. J’ai décidé d’en faire mon métier, il y a un peu plus de dix ans, en imaginant une campagne contre la discrimination intitulée One Word (un mot). Elle consistait à photographier le visage de personnes de toutes provenances, après leur avoir demandé d’écrire sur leur front un message de tolérance en un seul mot. Ce travail m’a valu une certaine notoriété. »
La discrimination, Petar Mitrovic en a fait la cruelle expérience. Né à Zagreb, en Croatie, il a juste 11 ans lorsqu’il débarque en Suisse avec sa famille, pour échapper aux violences de la guerre. Il endure alors les pires moqueries xénophobes. Mais il ne capitule pas… Après des études de commerce, il songe à une carrière dans les forces de l’ordre, devient inspecteur stagiaire et suit des cours dans une école de police. « J’ai finalement renoncé. En ce temps-là, s’appeler Mitrovic était rédhibitoire pour devenir policier. Depuis, heureusement, les choses ont changé. Je suis juste arrivé trop tôt… »
Les insuccès et les vexations ont nourri sa force mais aussi sa sensibilité artistique. Aujourd’hui, Petar est un photographe au talent unanimement reconnu. Ses travaux lui ont même valu d’être distingué en tant que « Personnalité suisse romande », dans le cadre du Forum des 100 en 2020. « Du fait de mon parcours de vie, je suis avant tout attiré par l’humain. Les visages me fascinent. Chacun est le refuge d’une histoire que je m’efforce de saisir et de raconter à travers l’image », explique-t-il, ajoutant qu’il ne refuse pas les sollicitations pour couvrir des évènements du quotidien comme une fête ou un heureux mariage.
Cet affamé de rencontres se partage désormais entre Lutry, où il vit avec sa souriante compagne, Fatima, son studio de photos, où se succèdent celles et ceux qui veulent être saisis et immortalisés dans son objectif, et le reste de ce monde qu’il aime parcourir à la recherche d’une humanité dont il sait, d’instinct, capter chaque expression d’espoir ou de douleur. Dans sa mémoire et ses archives, les souvenirs de ses séjours en Israël, en Palestine, au Burkina ou en Corée du Nord, par exemple, sont autant de trésors.
Attablé sur une terrasse de Lutry, devant une tasse de café, face au lac, il raconte : « Là, je reviens du Festival de Cannes. Ce ne fut pas facile d’obtenir les autorisations. Mais c’est toujours un grand moment pour un photographe ». Et puis il ajoute : « Je travaille aussi pour ma commune… Lorsque je regarde autour de moi, c’est marrant ! Je vois plein de gens dont j’ai réalisé le portrait. »
Merci de ce moment partagé, Petar.
Et tous nos vœux pour la suite…
Info : www.petar-photos.com