Viticulture – En apprendre davantage sur la taille
A la découverte des travaux de la vigne

Le printemps arrive à grands pas et l’on voit souvent des vignerons s’affairer dans leurs vignes, sans trop savoir ce qu’ils font. Après tout, les vendanges ne sont que dans six à sept mois. Même s’il est vrai que la récolte est une grande partie du métier de vigneron, d’autres travaux en amont sont tout aussi importants pour préparer la vigne au nouveau millésime.
La taille est très importante car c’est à ce moment-là que l’on recommence l’année à zéro et que la vigne est remise à neuf pour la nouvelle année. Pour Arthur Duplan vigneron-œnologue à la Tour de Marsens, « c’est le moment de tourner la page sur le millésime. On voit tout ce qui s’est passé pendant l’année viticole, on voit les cicatrices. C’est à ce moment-là que l’on remet à neuf et que l’on voit déjà ce qui nous attend ».
Au niveau du calendrier viticole, il n’y a pas de date précise pour débuter la taille. Il est toutefois important de commencer la taille après la chute des feuilles et d’attendre que la sève soit totalement descendue dans le cep et en comptant environ deux-trois semaines à partir de ce moment-là. Généralement la date limite est fixée au 12 mars, ce qui correspond à la Saint-Grégoire, avec comme objectif d’être prêts pour le printemps.

Un travail de réflexion et de précision
Avant de mettre les premiers coups de sécateurs, il faut observer son cep et prendre en considération plusieurs éléments :
• La branche à fruit est l’élément central de la taille. C’est elle qui portera les grappes de la saison. Son choix est déterminant, car il influence directement la récolte et la structure de la vigne.
• Le canal de sève permet la circulation des nutriments depuis les racines jusqu’aux bourgeons. Une taille bien réalisée veille à ne pas perturber ce flux essentiel, garantissant ainsi une croissance harmonieuse et une fructification optimale.
• Le courçon de réserve joue un rôle fondamental dans la gestion de la vigueur du cep. Il s’agit d’un bois de taille courte, portant généralement un à deux yeux, qui servira à renouveler la branche à fruit lors des cycles futurs. Il permet de garder la pérennité de notre cep.
• Les yeux, ou bourgeons, sont les points de départ des pousses futures. Selon la méthode de taille utilisée (guyot, cordon permanent, gobelet, etc.), le nombre et la disposition des yeux laissés sur le cep varient. En Lavaux, la taille guyot simple ou double est souvent privilégiée.

La sélection de la branche à fruit et du courçon de réserve demande une certaine réflexion pour préparer la vigne aux prochains travaux (ébourgeonnage et effeuilles) mais également anticiper la prochaine récolte. Comme l’explique Jean-François Wuillemin, sociétaire à l’Union vinicole de Cully : « la taille permet de prévoir le prochain travail qui est l’ébourgeonnage, si on laisse trop d’yeux cela donne plus de travail pour le prochain travail de vigne ».
Pour Arthur Duplan, « la taille se démarque des autres travaux car on ne peut pas la déléguer. Il faut sélectionner les bourgeons pour les prochaines récoltes. En comparaison avec l’internationale, on prend cela au sérieux et il y a aussi la précision suisse dans les vignes ! ».
Une fois la taille terminée, il faudra tirer les bois, palisser la branche à fruits, c’est-à-dire la plier sur le fil et éventuellement retendre le fil. Les sarments, les bois enlevés du cep, sont posés en tas le long des vignes puis broyés et utilisés comme fumure pour la vigne.
Pérenniser le cep
En Lavaux, nous distinguons deux manières principales de tailler : en guyot ou en cordon permanent. Il existe encore quelques vignes avec une taille en gobelet mais celles-ci sont de plus en plus rares. Entre la vigne et le vigneron, il y a une réelle histoire et lorsque Arthur Duplan a repris les vignes de la Tour de Marsens, il a dû comprendre la manière de travailler de son prédécesseur, comme il l’explique : « Tailler d’une autre manière peut prendre quelques années pour obtenir le résultat que l’on veut. Parfois on ne peut pas modifier et il faut accepter la taille du précédent ».
Le travail de la taille est d’autant plus important que la vigne ne cicatrise jamais et que chaque coup de sécateur doit être réfléchi, comme l’explique Jean-François Wuillemin : « Chaque blessure de taille peut entraîner des maladies. Comme la vigne ne cicatrise pas, des nécroses peuvent se former. Notre but est de faire des entailles les plus petites possible et de préserver notre cep aussi longtemps que possible ».
La taille est bien plus qu’une simple coupe de bois : c’est un travail de précision qui engage l’avenir de la vigne et conditionne la qualité des récoltes à venir. Entre tradition et savoir-faire, elle témoigne du lien étroit entre le vigneron et son terroir, garantissant la pérennité des ceps et l’excellence des millésimes futurs.
