La fondue : un mets nationalqui rassemble et régale le palais

Gérard Bourquenoud | Une bizarrerie qui s’écarte du commun et pourtant c’est une réalité, voire même une tradition. « Plus il fait froid, plus le fromage fond dans le caquelon. » Et aucune frontière ne résiste à ce mets national suisse. Avec le retour de l’automne, puis de l’hiver, il est affiché dans chaque foyer, dans les esprits, dans l’âme profonde de notre pays. Et pour quelle raison ? Parce que la fondue moitié-moitié au gruyère et vacherin fribourgeois ou tout simplement à ce vacherin, crée de la bonne humeur, pour ne pas dire une certaine euphorie de bon aloi. Onctueuse, crémeuse, collant au palais, elle s’accompagne agréablement d’un coup de blanc de Lavaux ou des Faverges.
La fondue au label d’origine est démocratique, citadine et sans aucune hésitation également campagnarde. Tout un chacun touille avec sa fourchette et son pain le délice dans le caquelon qui fume et dégage une odeur alléchante. « Quand la fondue va mal, c’est la Suisse qui est malade », disait un chef de cuisine qui mijotait près de trente fondues au quotidien dans son restaurant. Il allait lui-même choisir son fromage chez des artisans-fromagers de la campagne vaudoise, pour être convaincu de la qualité et du goût du fromage. Un mets dit national qui ne s’offusque jamais et s’accommode fort bien dans le cadre modeste d’une pinte. Par contre, il ne se savoure pas en plein air comme la raclette à l’ombre des pins, mais à l’intérieur, je veux dire « d’une maison » ou d’un « carnotzet », en pleine communion avec les convives.
Sa seule coquetterie est d’être parfois chauvine. Il y a celle qui se vante d’être gruérienne ou fribourgeoise et qui aurait tendance à se croire la meilleure. Une réflexion qui ne saurait masquer la vaudoise ou la neuchâteloise, ni le label suisse de la famille. Au fil des décennies, la fondue au fromage est devenue patriotique le jour de la Fête nationale et même gastronomique pour les touristes. Et ce qui est fort réjouissant, elle est partie à la conquête de son salut, du salut de la Suisse dans le monde.