Les vaches produiraient trop de CO2 ?
Tribune libre autour de la pollution
Daniel Grand est agriculteur à Puidoux-Village. Il n’est pas issu d’une famille paysanne et a créé pas-à-pas son exploitation agricole. Son activité est diversifiée, il fait du travail de bûcheron, de la réparation de machines, des travaux pour des tiers en plus de la ferme.
Jacques Delafontaine est agriculteur depuis toujours. Il s’occupe de l’alpage, de l’atelier de machines. Inventeur autodidacte, il montait voilà plus de 30 ans sa propre station biogaz.
Quant à moi ( Isabelle Goumaz ), j’ai récolté les dires et résumé les riches dialogues empreints d’expériences pratiques et d’observation.
Daniel Grand, Jacques Delafontaine (agriculteurs) et Isabelle Goumaz | Habitant tous trois la commune de Puidoux, le trio s’est retrouvé autour de thèmes chers à chacun, à savoir: l’agriculture et l’environnement. Tout a commencé par un coup de fil: « Dis donc, aurais-tu des informations concernant le CO2 soi-disant produit en trop grande quantité par les vaches? Qu’en penses-tu? Sais-tu où trouver des informations ?… » La fragile passerelle entre le monde des « citadins » et celui des agriculteurs était lancée. Reflexions.

La vache et le CO2
Si nous faisons le bilan CO2 pour les vaches, ce bilan n’est pas neutre mais complètement positif. Ceci, uniquement lorsque nos chers ruminants consomment du fourrage produit sur le domaine. Une vache consomme par année en moyenne la production d’un hectare (ha) de terrain soit 10’000 m2. Cet hectare absorbe à lui seul en moyenne 6 tonnes de CO2 par la croissance des plantes et émet beaucoup d’oxygène. Cette même vache rejette environ 125 kg de CO2 par an. Pour produire le fourrage destiné à cette vache, il faut environ une dizaine d’heures de tracteur ce qui correspond à 100 litres de carburant. Comme ces 100 litres produisent à peu près 300 kg de CO2, nous pouvons en déduire qu’une vache et son alimentation génèrent 425 kg de CO2. Nous avons maintenant tous les « ingrédients » du bilan à savoir d’un côté, la production de CO2 de la vache et du tracteur et de l’autre, l’absorption/consommation du CO2 par le végétal par hectare. Ce bilan montre clairement une différence de 5575 kg de CO2 qui est absorbé par la plante. Pour arriver à un bilan équilibré, il faudrait bien quelques vaches de plus sur ce même hectare ! De plus, tous nos alpages et pâturages sont broutés par des vaches et des moutons. Cela provoque la repousse de l’herbe donc: la consommation de CO2 et la production d’oxygène. Nous pouvons alors, sans trop d’arrières pensées manger du bœuf ( local évidemment ) !
La voiture et le CO2
Savez-vous combien il y a de vaches et de voitures en Suisse ? Les vaches sont au nombre de 555’500 alors que le parc de voitures immatriculées se chiffre à 4’500’000 véhicules. Cela nous donne 8 voitures pour une vache. Pouvons-nous mettre sur une balance imaginaire les productions de CO2 que provoque ces deux parties ? Une vache rejette 125 kg de CO2 dans l’atmosphère par année, à savoir pour l’ensemble du cheptel bovin, 69’437 tonnes de CO2 / an. Une voiture parcourant environ 10’000 km par année avec une consommation de 6 l / 100 km va consommer 600 litres de carburant par an. Cela donne, d’après les données du constructeur, une production de 130g / km de CO2 ou 13 kg de CO2 au 100 km. Pour 10’000 km: 1300 kg de CO2. A cela, il faut ajouter 30% pour l’extraction et l’acheminement du carburant. Nous arrivons à un total de 1690 kg de CO2. Lorsque nous considérons seulement le parc automobile ( sans compter les machines de chantier, les camions, les bateaux, les avions et le chauffage… ) nous articulons le chiffre de 7’689’500 tonnes de CO2/an. Si nous comparons ces deux chiffres, les voitures en Suisse rejettent environ 110 fois plus de CO2 que les vaches. Pour conclure, la voiture n’a jamais absorbé du CO2 ni fourni d’oxygène. La vache, par le fourrage qu’elle absorbe, l’herbe qu’elle broute, permet une absorption de CO2 et une production d’oxygène.
L’humus, un puits de carbone
L’humus pourrait être qualifié d’« infatigable laborieux » lui qui, sans cesse transforme la matière organique grâce à la collaboration de multiples micro-organismes, de la terre, de l’eau, de l’air, de la lumière, de la chaleur. Il accumule en lui des quantités gigantesques de carbone provenant du végétal en décomposition. Cet humus pourrait se comparer sur toute la surface de notre terre végétale à une « immense pile d’énergie », cette énergie étant accumulée et
réutilisée sans fin. Le carbone et l’azote contenus en lui, sont la base pour toute croissance de l’ensemble des plantes qui couvrent notre terre et qui nous donnent aliments, matières premières, énergie, air frais, oxygène et climat modéré… Pour améliorer notre terrain et augmenter la couche d’humus ( puits de carbone ), le labourage peu profond, une couverture végétale, l’épandage de compost sont indiqués. Un tel terrain verra sa consommation de CO2 augmenter. Plus on arrive à enfouir du carbone dans le sol, plus la production végétale sera importante. Le carbone est utile dans le sol comme dans l’atmosphère sans oublier que le CO2 est la nourriture principale des plantes. Celui ou celle qui a déjà touché de ses mains une bonne terre de jardin aérée, humide, structurée comme des grains de semoule grossiers aura fait l’expérience de l’humus et aura peut-être humé son odeur!
Conclusion
Notre texte fait référence à des expériences vécues localement et nous permet de conclure que la vache est plutôt « amie » de notre climat, si elle ne consomme que le fourrage produit sur le domaine. Elle permet indirectement une absorption du CO2 et une production d’oxygène par les plantes qu’elle consomme. Elle pollue 110 fois moins q u’une voiture ! La couche d’humus de la prairie a la possibilité de s’enrichir par le fumier ( riche en micro-organismes et enzymes ) qu’elle y laisse. Merci la vache !