Votations Fédérales – Qu’est-ce qui nous attend dans les urnes le 9 juin
Loi sur l’électricité

Vers plus d’autonomie en électricité ?
La Loi sur l’électricité changera les paradigmes en matière d’approvisionnement en énergie. Car il sera plus facile de construire des centrales hydroélectriques, solaires et éoliennes, au grand dam des défenseurs de l’environnement.
C’est un monde de compromis qui attend le peuple en juin prochain. D’un côté, améliorer et garantir la sécurité de l’approvisionnement en électricité à court et moyen terme, et de l’autre, éviter de saccager la nature en suivant la voie du referendum.
Après l’acceptation de la Loi sur l’énergie en 2017, les Suisses se prononcent cette fois-ci au sujet de la Loi sur l’électricité. Le Parlement et le Gouvernement sont à l’origine de ce texte. Si le projet vise une sécurité énergétique, il aspire également à une décarbonisation, puisque la loi sur le climat pousse notre pays à devenir climatiquement neutre d’ici 2050. La Suisse s’est également engagée à sortir du nucléaire à la suite de la catastrophe de Fukushima en 2011.
« La menace de voir des surfaces gigantesques de panneaux solaires défigureront
notre paysage »
Magdalena Martullo-Blocher, conseillère nationale UDC
opposée à la loi
Pour atteindre les objectifs de la décarbonisation et d’un approvisionnement assuré, surtout en hiver, la loi sur l’électricité met l’accent sur les énergies renouvelables. Le soleil, le vent et l’eau sont des éléments permettant une production locale. Pour Berne, les expériences du passé et le conflit entre Russes et Ukrainiens démontrent que se fournir à l’étranger est risqué et quasi incontrôlable du point de vue économique.
Le challenge est de mise, sachant que nous sommes toujours plus gourmands en matière d’énergie : « La Suisse a besoin de plus d’électricité. Par exemple pour l’économie, les voitures électriques ou les pompes à chaleur » détaille le site du Gouvernement.
Qu’est-ce qui changerait en cas d’acceptation ?
Le développement de l’énergie solaire continuera d’être encouragé financièrement. Les toits et les façades des bâtiments resteront les surfaces de prédilection pour la pose de panneaux photovoltaïques. La Confédération estime que la production d’électricité via le solaire peut être multipliée par cinq d’ici 2035. Pour autant que des parcs d’intérêt national voient le jour dans des zones appropriées.
Du côté des projets éoliens, le constat est similaire : « La Loi sur l’électricité instaure des conditions de facilité pour les éoliennes. Toutefois, chaque projet sera examiné et autorisé au cas par cas en tenant compte de la nature et du paysage » détaillent les explications accompagnant ce vote.
Pour l’hydraulique, seize projets de rehaussement de barrage ou de nouvelles constructions sont déjà au programme. Même en cas de recours, leurs chances d’aboutir sont élevées, puisque la loi inclut une planification facilitée et leur inscription dans la législation limitera leur examen par les tribunaux.
Que demande le referendum ?
« La loi est une grave atteinte à la nature » s’offusque le comité référendaire. « Elle fait primer la production d’électricité sur tout autre intérêt, facilite le défrichement des forêts, saccage le paysage et anéantit des biotopes protégés ». La crainte de voir apparaître des parcs solaires géants dans les Alpes, sur le Plateau et dans le Jura est bien présente pour les opposants à la loi. Ces derniers craignent également que des zones naturelles soient submergées par les eaux de nouveaux barrages et du rehaussement des géants de béton déjà existant.
Pour la conseillère nationale UDC, Magdalena Martullo-Blocher, la protection du paysage serait mise de côté avec cette loi : « On estime que 9000 nouvelles éoliennes verront le jour et la menace de voir des surfaces gigantesques de panneaux solaires défigureront notre paysage ». Fait assez rare pour être cité, le parti de droite se retrouve derrière l’association Franz Weber en matière de poids des opposants. « Il s’agit d’une goutte d’eau dans l’océan. La loi ne permettra pas, et de loin, de répondre aux besoins en électricité du pays » ajoute la fille de Christoph Blocher interrogée par Swissinfo.
Pour les référendaires, la loi limite également le peuple, les communes et les cantons à s’opposer à un projet au niveau local.
Initiative « Pour la liberté et l’intégrité physique »

Exclure toute obligation vaccinale
Fruit des mesures prises durant la pandémie, l’initiative veut renforcer l’intégrité physique et psychique des citoyens. En d’autres termes, il s’agit de laisser la liberté à chacun de se faire vacciner ou non, et ce, sans subir de désavantages sociaux ou professionnels.
Ce n’est pas un parti politique qui se cache derrière ce texte, mais un groupement citoyen. Le Mouvement suisse pour la liberté (MSL) se bat pour que tout le monde puisse disposer librement de son corps. Rappelez-vous, durant la première vague de Covid-19, la Confédération avait pris des mesures radicales pour contrer le virus et éviter de surcharger les hôpitaux.
Dans ce contexte d’urgence mondiale, la course au vaccin fait rage et le protocole de vérification avant la commercialisation d’un vaccin est raccourci. Dès le 13 septembre 2021, le pass sanitaire devient obligatoire pour accéder à certains lieux comme les restaurants, les espaces dédiés à la culture ou encore les discothèques. Dans la foulée, l’initiative qui est soumise aux urnes dans deux semaines avait été déposée à la Chancellerie fédérale en décembre 2021 avec plus de 125’000 signatures.
Qu’est-ce qui changerait en cas d’acceptation ?
Autre argument avancé par les partisans de l’initiative, les injustices professionnelles. Lors de sa dernière conférence de presse, les membres du MSL ont rappelé que la compagnie aérienne Swiss avait licencié 150 collaborateurs refusant de se faire vacciner. « En cas de nouvelle pandémie, nous voulons empêcher que des employeurs puissent prétériter leurs employés jugeant qu’une vaccination n’était pas nécessaire » détaille Charly Pache au micro du 19h30 le 7 mai dernier. « Il ne s’agissait pas d’une obligation formelle étatique de se faire vacciner. C’était lié à une sorte de chantage que nous ne voulons plus voir à l’avenir » ajoute l’initiant. L’affaire des licenciements de Swiss n’est pas terminée, puisque ces employés ont engagé des poursuites judiciaires contre leur ancien employeur.
Si l’initiative souhaite adapter la législation afin que l’Etat laisse la liberté à chacun de se faire vacciner, le texte ne se concentre pas qu’aux injections : « Ni la politique, ni l’industrie pharmaceutique, ni l’OMS ne doivent pouvoir porter atteinte au corps humain. Qu’il s’agisse, par exemple, de puces sous-cutanées, de nanoparticules, ou d’une manipulation générique » précise le portail web du gouvernement.
En cas d’échec dans les urnes ?
Le Parlement et le Conseil fédéral s’opposent à l’initiative. Contrairement aux deux textes sur les coûts de la santé, aucun contre-projet n’a été évoqué en cas de refus par le peuple. L’initiative a été jugée comme ratée par l’assemblée fédérale : « Il a fallu relativement longtemps pour qu’un comité du non se forme, probablement parce que l’initiative a peu de chance d’aboutir » indique Giannis Mavris, auteur à Swissinfo.
Pour le Conseil fédéral et le Parlement, cette initiative est inutile, car le droit à l’intégrité physique et psychique est déjà inscrit dans la Constitution. « De ce fait, le corps humain est déjà protégé contre toutes atteintes de l’Etat » évoque le site du Gouvernement. Comme mentionné précédemment, le texte de l’initiative ne se concentre pas que sur la vaccination, mais englobe toute action de la Confédération, des cantons et des communes. Pour les opposants, l’initiative manque de précision et n’informe pas sur les conséquences de son application, comme par exemple le travail de la police en cas d’arrestation ou l’exécution des peines.
Initiative d’allègement des primes

Plafonner le coût de son assurance maladie à 10% de son salaire
Si les primes d’assurance-maladie obligatoire (LaMal) ont plus que doublé au cours des 20 dernières années, ce n’est pas le cas des salaires. C’est ce qu’avance le parti socialiste (PS), à l’origine de cette initiative. Un texte qui demande que les assurés ne consacrent pas plus de 10 % de leurs revenus à ce système. Instauré en 1996, le mécanisme LaMal prend en charge les coûts de la santé afin de permettre un accès pour chacun aux soins médicaux, et ce, sans tenir compte du salaire des citoyens.
Au fil des années, l’augmentation des coûts de la santé s’est répercutée sur les primes d’assurance. Si l’on compare la courbe des salaires et celle des primes de la LaMal, on constate une flambée des prix de cette dernière depuis 28 ans. Et pour cause, un Suisse payait 128 francs par mois en 1996, contre 334 aujourd’hui. Soit une hausse de 180 %. Rappelez-vous, en automne dernier, une augmentation de 8.7 % était annoncée pour 2024. Il s’agissait alors de la troisième hausse la plus élevée de l’histoire.
« Les primes ont plus
que doublé au cours
des 20 dernières années, mais pas les salaires »
Plus d’un quart des assurés (2.1 millions) rencontrent des difficultés à payer leurs primes d’assurances. Pour soulager ces personnes, les cantons et la Confédération accordent une réduction de primes sous forme de subsides. Des aides qui varient selon les régions, car ce sont les cantons qui décident des personnes ayant droit à ces soutiens.
Qu’est-ce qui changerait en cas d’acceptation ?
L’initiative d’allègement des primes veut accorder des subsides pour chaque assuré dont les primes excèdent 10 % de leurs revenus. Ces aides supplémentaires seront financées à raison de deux tiers par Berne, tandis que les cantons se chargeront du solde. Si, actuellement, les personnes à faibles revenus bénéficient déjà des subsides, le texte de la gauche profitera principalement à la classe moyenne.
Pour le Parlement et la Confédération, l’initiative entraînerait des dépenses supplémentaires de plusieurs milliards de francs, sans pour autant créer d’incitation à faire baisser les coûts de la santé. Le Conseil fédéral estime que la majeure partie des assurés dépenseront plus 10 % de leur salaire pour payer leurs primes. Selon les estimations de l’Office fédéral de la santé publique, l’initiative pourrait coûter entre 3.5 et 5 milliards par année de plus pour la Confédération et les cantons. Le gouvernement craint ainsi des augmentations d’impôts ou d’autres mesures économiques pour faire face à ces contributions. C’est la raison pour laquelle Berne rejette le texte et s’y oppose via un contre-projet.
En cas d’échec dans les urnes ?
Autant le dire tout de suite, le contre-projet qui s’oppose à l’initiative entrera en vigueur en cas de refus dans les urnes, pour autant qu’aucun referendum ne l’attaque. Pour Berne, ce texte inciterait également les cantons à freiner la hausse des coûts de la santé en consacrant un montant minimum accordé aux subsides ou au moyen d’une planification hospitalière efficace. Le Parlement et le Conseil fédéral estiment que cela permettraient de réduire les primes de 360 millions de francs.
Sources Swissinfo
Initiative pour un frein aux coûts

pour payer leurs primes d’assurance maladie – © STAR Ambulances Sàrl
Freiner les coûts de la santé
A la différence de l’initiative pour l’allégement des primes du PS, le parti du Centre veut lutter contre les disparités du système de santé suisse. Si le prix des médicaments et les interventions hospitalières superflues sont au programme, il s’agit également de faire payer tous les acteurs des soins pour assumer l’évolution des coûts. Explications.
La santé est au cœur de ces votations fédérales. Avec son initiative « Pour un frein aux coûts », le Centre s’attaque à l’ensemble du système pour faire baisser les coûts : « On pourrait faire 6 milliards d’économies par année, sans toucher d’un iota à la qualité des soins » affirme Vincent Maître, vice-président du Centre suisse et conseiller national genevois. « Le problème, c’est que lorsqu’il faut prendre des décisions, tous les acteurs de la santé, les médecins, les hôpitaux, les pharmas, les assureurs se renvoient tous la balle ». Pour le Centre, ce mécanisme n’est profitable que pour les professionnels et non pour la population, qui doit elle, passer à la caisse.
« Le texte du Centre préconise plus d’interventions en ambulatoire et veut imposer une conscience des coûts »
On estime aujourd’hui que 2.2 millions de personnes en Suisse n’arrivent plus à payer elles-mêmes leurs primes d’assurance maladie : « Cela représente une personne sur quatre » précise le site du Centre. Du côté de Swissinfo, on apprend que la santé constitue 11.8 % du PIB de notre pays, plaçant ainsi la Suisse dans le groupe de tête des pays les plus dépensiers en la matière. En inscrivant un frein aux coûts dans la Constitution, l’initiative du Centre veut obliger les acteurs de la santé à prendre des mesures pour que les coûts de la santé n’augmentent pas plus fortement que les salaires.
Qu’est-ce qui changerait en cas d’acceptation ?
Le frein aux coûts se base sur les mêmes principes que celui à l’endettement. Ce dernier limite les dépenses de la Confédération en se basant sur l’état de santé économique du pays. Un système qui a fait ses preuves depuis son instauration en 2003. « Si les coûts de la santé augmentent de plus de 20 % par année par rapport aux salaires, la Confédération et les cantons devront intervenir » détaille le portail web du Gouvernement. Dans le système actuel, les acteurs peuvent fixer eux-mêmes les prestations qu’ils fournissent et les prix qu’ils facturent. Le texte du Centre préconise plus d’interventions en ambulatoire et veut imposer une « conscience » des coûts : « Nous voulons une Suisse avec un système de santé de qualité et abordable » explique Benjamin Roduit, conseiller national valaisan membre du Centre. Son parti politique met aussi l’accent sur la numérisation pour réduire les coûts. A titre d’exemple, le dossier électronique du patient permettrait d’éviter les doublons et offrirait une meilleure coordination entre les divers acteurs de soins. L’initiative veut également baisser le prix des médicaments qui est jugé excessif.
En ce qui concerne le personnel soignant, le texte veut améliorer les conditions de travail en mettant rapidement en place l’initiative sur les soins infirmiers. Acceptée par le peuple en novembre 2021, la première étape du projet encourage, entre autre, la formation d’infirmiers diplômés. Si le texte deviendra réalité le 1er juillet de cette année, aucune date n’est encore connue pour la deuxième phase, qui doit améliorer les conditions de travail dans le secteur des soins.
En cas d’échec dans les urnes ?
L’initiative pour un frein aux coûts subit le même sort que celle de l’allégement des primes, à savoir que le Conseil fédéral et le Parlement lui collent un contre-projet. En liant l’augmentation des coûts de la santé à l’évolution des salaires et de l’économie, le texte est jugé trop rigide. Pour Berne, le frein aux coûts ne tient pas compte de facteurs importants comme le vieillissement de la population et l’évolution de la médecine. Le contre-projet maintient la volonté d’une transparence en exigeant que chaque acteur de la santé justifie ses choix en matière de coûts.