Votations du 13 juin 2021 – Avec deux initiatives et trois référendums, le menu était copieux !
Christa Calpini | Parlons tout d’abord des deux initiatives communément appelées phyto extrêmes par les opposants. La première, « Pour une eau potable propre et une alimentation saine-Pas de subventions pour l’utilisation de pesticides et d’antibiotiques à titre prophylactiques » a été refusée à 60,7% des voix. Le titre, déjà, était mal choisi: le mot « potable » n’y avait pas sa place. Faire croire à la population qu’elle boit une eau sale alors que la grande majorité la consomme quotidiennement et fait confiance au service des eaux de sa commune, c’est choquant. Comme de vouloir priver de paiements directs les agriculteurs achetant des aliments pour nourrir leurs animaux… Même celui qui nourrit son bétail avec du fourrage provenant de sa propre exploitation peut être victime d’une mauvaise récolte et n’avoir pas de quoi passer l’hiver… Interdire l’utilisation de pesticides, quels qu’ils soient, est aussi excessif… Rapporté au domaine humain, que feraient les familles dont les enfants ont des poux ou des matelas avec des punaises de lits ? Idem pour les antibiotiques en prévention: les personnes porteuses de valve cardiaque ou de stents sont obligées d’en avaler avant des soins dentaires. Les progrès de la science nous permettent de combattre efficacement des maladies chez les humains, les animaux, les plantes et c’est heureux! Le problème est l’emploi non adéquat ou abusif de ces substances. C’est à l’Etat de protéger la santé des citoyens et de prendre les mesures qui s’imposent. C’est ce qu’il fait en devenant plus rigoureux sur l’homologation et l’utilisation de tous les pesticides et pas seulement ceux destinés à l’agriculture. Pour l’heure, la population a dit NON à un texte sans nuances, irréaliste et ne visant que les agriculteurs, injustice criante envers ceux qui nous nourrissent et dont le métier est difficile.
La deuxième initiative « Pour une Suisse libre de pesticides de synthèse » a été refusée à 60,6% des voix. Elle demandait l’interdiction générale des pesticides de synthèse et de l’importation à des fins commerciales de denrées alimentaires produites avec de tels pesticides. Cette interdiction ne concernait ni le tourisme d’achat privé, ni les aliments pour animaux. Le contenu de ce texte m’a interpelée à plusieurs égards. En effet, un produit de synthèse n’est pas forcément toxique, tout comme un produit naturel n’est de loin pas toujours inoffensif… L’activité biologique et la toxicité d’une substance est fonction de sa structure chimique et des doses utilisées, et non pas de son origine (naturelle ou créée par l’humain). De plus, comment contrôler que tout ce qui nous vient de l’étranger ait réellement été produit sans pesticide ? Autre constat, si l’agriculture est mise sous pression, c’est dû au comportement du consommateur qui ne veut pas de bêtes dans sa salade et ses pommes et aux distributeurs qui ne paient pas le juste prix au producteur! Bref, rien n’est simple… La votation sur ces initiatives aura permis de débattre et mettre en lumière que des progrès non négligeables sont en cours pour rendre nos eaux plus propres. Les quantités de pesticides ne cessent de diminuer grâce à divers programmes encourageant une production durable et des investissements sont faits dans la recherche. Nous ne sommes plus dans le système intensif des années 1980 et c’est en partenariat avec le monde agricole que les avancées doivent se faire.
La « Loi Covid » est le troisième objet et elle a été acceptée à 60,2% des voix. Cette base légale est nécessaire pour que les aides financières destinées aux victimes économiques de la pandémie, notamment celles pour les cas de rigueur, perdurent au-delà du 25 septembre prochain. Sont concernées, les entreprises ayant dû fermer pour protéger la santé publique, celles dont l’activité s’est effondrée à cause du contexte ou les personnes ayant perdu leur revenu.
Le quatrième objet est la « Loi sur le CO2 ». Avec 51,6 % de NON, le résultat est serré. Si la population a bien compris l’objectif de la loi, à savoir protéger le climat en réduisant nos émissions de gaz à effet de serre et remplir ainsi nos engagements pris dans le cadre de l’Accord de Paris, elle a eu de la peine à en admettre le mode de financement par taxes ! De plus, le système de redistribution était compliqué. Etait-ce judicieux de redistribuer ? N’aurait-il pas fallu moins encaisser et tout mettre dans un fonds pour le climat ? Autre constat, celui habitant en altitude, sur le revers avec peu de soleil en hiver, ayant investi il y a peu dans une chaudière à mazout plus propre et ne bénéficiant pas de transport public ? Comment et quand serait-il aidé pour changer de voiture, changer de chauffage, mieux isoler sa maison? Les réponses floues à ces questionnements légitimes expliquent en partie le NON.
Dernier objet, la « Loi fédérale sur les mesures policières de lutte contre le terrorisme » a été acceptée sans problème à 56,6 % des voix. Prévenir le radicalisme et l’extrémisme est l’objectif de cette loi. Elle permettra à la police d’intervenir plus rapidement et éviter des endoctrinements menant parfois à des tragédies. Chaque année, le nombre de cas de radicalisation augmente en Suisse. Certes, pour lutter contre ce fléau, nous disposons d’un arsenal pénal et des mesures éducatives du plan national contre l’extrémisme mais il manquait une base légale permettant d’agir préventivement. Désormais, la police pourra le faire dès que des indices concrets et actuels laissent penser que quelqu’un va commettre un acte malveillant. Au nom de toutes les victimes innocentes tuées et de la douleur des familles, c’est un pas nécessaire et salutaire que la population a souhaité dans son ensemble.
Christa Calpini, pharmacienne, ancienne députée au Grand Conseil VD