Un géant préhistorique Le dragon de Komodo
Luc Grandsimon | Le nouveau couple de dragons de Komodo (Varanus komodoensis), présenté au public depuis le 9 août 2014, est très vite devenu la star du Tropiquarium. Baptisés Florès et Padar – noms de leurs îles d’origine – ces deux dragons proviennent d’un élevage des îles des Canaries. Ils ont été élevés ensemble, c’est une grande particularité de ce couple.
Son aire de répartition est endémique à quatre îles de l’archipel indonésien: l’île de Komodo, l’île de Rinca, l’île de Gili Motong et certaines parties de l’île de Florès.
Une technique de chasse imparable!
Le dragon de Komodo possède de véritables glandes à venin, installées dans la mâchoire inférieure, et non dans la supérieure comme chez les serpents. Ce venin est similaire à celui de nombreux serpents mais aussi à celui du Monstre de Gila (Heloderma suspectum), une des deux seules espèces de lézards venimeuses. Le mélange de sa salive infectée de bactéries et de son venin rend mortelle sa morsure.
Grâce à sa langue et à ses organes olfactifs, ce varan repère ses proies à plusieurs kilomètres de distance. Sa technique de chasse est très efficace et imparable dans la nature. Sans combattre, il mord simplement sa proie en lui inoculant un mélange toxique de venin anticoagulant et de salive emplie de bactéries. La proie mordue va s’affaiblir, s’infecter et mourir, il la retrouve sans problème pour en faire son festin. C’est un carnivore et un redoutable prédateur qui domine son écosystème.
Les mâchoires du dragon de Komodo sont armées de soixante dents crénelées, qui peuvent s’ouvrir démesurément grâce à une grande flexibilité des os crâniens. Les études ont montré que cette morphologie leur permet de dépecer et d’ingurgiter rapidement d’énormes quantités de viande: un buffle de 800 kg est dévoré en 4 heures par 10 dragons de Komodo. Selon les quantités ingurgitées, ces lézards peuvent digérer pendant des mois et ne plus avoir besoin ni de chasser, ni de s’alimenter. Au Tropiquarium, ils sont nourris une à deux fois par semaine avec des poulets, des rats, des lapins d’élevage qui sont toujours donnés morts.
Il est appelé par les locaux «le crocodile de terre». Il peut atteindre des vitesses de pointe de 20 km/h en une fraction de seconde. Il nage très bien mais ne se nourrit apparemment pas de poissons.
Le plus gros lézard de la planète
Ce lézard peut atteindre plus de 3 mètres de long et peser jusqu’à 130 kilos; seuls les mâles atteignent cette grande taille et ce poids gigantesque pour un lézard. Padar, le mâle, âgé de six ans, mesure déjà 2 mètres et pèse pour l’instant 40 kilos; d’ici quelques années, il va rapidement atteindre sa taille de géant. L’espérance de vie du dragon de Komodo est de 20-30 ans.
Le dôme, leur terrarium de 160 m², est prévu pour qu’ils puissent y grandir à l’aise, au plus proche de leurs conditions naturelles; il est prévu d’y adjoindre un parc extérieur d’ici l’été prochain. «Il est rare qu’un couple soit élevé ensemble, car à maturité sexuelle, le mâle devient très agressif en période de reproduction et peut tuer les femelles. Pour éviter au maximum ce genre d’agression, nous avons installé deux espaces de rétention afin de pouvoir les séparer si nécessaire», explique Philippe Morel.
Les dragons de Komodo n’ont pas de prédateurs directs à part l’homme. L’exploitation des terres et les diverses activités humaines détruisent leur habitat, entraînant progressivement une chute de leur population.
Pour un zoo, présenter un couple de dragons de Komodo est aussi exceptionnel que de présenter des pandas.
«Ce couple de varans est unique en Suisse.» Philippe Morel ne cache pas sa joie de pouvoir présenter au public Florès et Padar.
L’espèce est en voie de disparition, elle est inscrite sur la liste rouge de l’IUCN (Union internationale pour la conservation de la nature). Il est dénombré un peu plus de 5000 individus dans le monde, de plus les scientifiques s’inquiètent, car ils ont trouvé des traces de consanguinité chez certains spécimens. La consanguinité est le produit de la reproduction entre deux membres de la même famille. Elle entraîne un pourcentage de mortalité plus important et un fort risque de dégénérescence de l’espèce.
Le dragon de Komodo a la particularité de pouvoir se reproduire aussi grâce à la parthénogenèse. Un individu femelle peut se reproduire sans intervention du mâle. L’ovule n’a pas besoin d’être fécondée. Le dragon de Komodo est ovipare.
Padar, le mâle du Tropiquarium, a déjà débuté ses tentatives de séduction vis-à-vis de la femelle, Florès. «Nous espérons avoir de la progéniture d’ici un ou deux ans. S’il y a des œufs, ils seront placés en incubateur, car le mâle risquerait de les sentir et de les déterrer pour les manger» nous informe Philippe Morel.