Servion – Les parades du Zoo de Servion en cas de canicule

Glaces de fruits, air frais, petites douches: Durant tout l’été, les animaux du Zoo de Servion ont eu droit à des traitements spéciaux pour les aider à supporter la chaleur. Petit tour du parc animalier juste avant que les températures ne redescendent.
Texte et photos Diane Zinsel | Martine fait les cent pas en attendant l’heure du nourrissage ; elle marche et se baigne pour tromper la faim. Martine est une oursonne, née à Goldau dans le canton de Schwytz, qui partage son espace avec son partenaire de jeux Koda, un mâle originaire de Montpellier en France. Lorsqu’enfin leur pitance est là, c’est lui qui s’attaque en premier à l’un des énormes glaçons remplis de pommes, de demi-melons et de carottes.
« En été, nous faisons particulièrement attention à ce que les animaux puissent se rafraîchir », explique, depuis le bord de la fosse, Pierre Ecoffey, responsable animalier au sein du Zoo de Servion. Les ours et les sangliers raffolent de ces grosses glaces faites d’eau, de fruits et de légumes entiers. C’est un moyen de les faire boire davantage, mais aussi de leur faire découvrir de nouvelles sensations tout en incluant une dimension de jeu, ajoute le biologiste. Ce n’est pas Koda qui dira le contraire. La portion gelée de 25 kg, tout juste démoulée du seau, roule sous ses coups de patte et finit sa course dans le bassin, où il plonge à sa suite. « Il sait qu’avec la chaleur de l’eau, les fruits vont se libérer », commente en riant Virginie Grivel, l’une des deux sœurs à la tête du parc animalier, qui pointe la manière très élégante qu’a l’ours de porter une pomme bien rouge sur le dos de sa paluche.

Rafraîchissements ponctuels et à la demande
Les morceaux glacés ne sont pas bons pour tous les pensionnaires du zoo. Les petits primates, originaires de zones tropicales, ne digéreraient pas du tout la gourmandise. S’ils supportent bien la chaleur, ils ont quand même le droit à « un effet fraîcheur » diffusé par une simple boîte en plastique congelée et suspendue à une branche. « Tous les individus ne vont pas forcément s’en approcher, mais l’idée est de leur offrir la possibilité de le faire. Les animaux savent très bien ce dont ils ont besoin et adaptent aussi leurs envies à la météo », relève Pierre Ecoffey.
Dans la volière, des perroquets aux plumes multicolores dédaignent le brumisateur sous lequel ils ont pourtant adoré se prélasser les jours derniers, quand la température était encore plus élevée. Seuls les émeus australiens, toujours prêts pour une bonne douche, se laissent asperger par le jet d’eau que Pierre Ecoffey leur offre. Le biologiste ne s’explique pas l’amour inconditionnel que vouent à l’eau ces deux grands volatils, originaires de zones arides, mais la nature a aussi ses petits secrets. Après tout, Tinka, la tigresse de Sibérie, ne se baigne jamais alors que les tigres sont d’excellents nageurs et les poneys Shetland pleurent dès qu’il pleut pour rentrer à l’écurie.
Entre-saisons plus difficiles pour les nordiques
Les espèces que présente le Zoo de Servion sont pour la plupart plus résistantes au froid qu’à la chaleur, mais elles sont capables de très bien s’adapter aux températures allant jusqu’à 35 degrés, ajoute la codirectrice. Les espèces nordiques ont du mal avec les changements brutaux, comme cette année avec le passage radical d’un printemps frais à la canicule. En réaction, les bêtes se mettent à muer et à perdre leur gras de protection, mais le processus n’est jamais assez rapide quand elles ont chaud, reconnaissent aussi les responsables. Dans ce genre de situation, rennes, lynx ou autres renards polaires se mettent à l’ombre des grands arbres, ou restent à l’intérieur, sur les dalles plus fraîches. Si le parc a su trouver des parades pour atténuer les vagues de chaleur, les animaux ne manquent pas non plus de bon sens.
D’où vient l’eau ?
« En cas de canicule, on aimerait mettre des brumisateurs ou des jets dans chaque enclos, mais cela ne serait ni écologiquement ni économiquement viable », explique Virginie Grivel, codirectrice du parc animalier. Le Zoo de Servion dispose de deux points d’approvisionnement en eau : une citerne de 110’000 litres alimentée par une source sur les hauteurs du parc et une zone de captage de l’eau de ruissellement sur les bas. Cette eau, qui n’est pas filtrée, est utilisée pour les animaux et pour les toilettes. « Il y a quelques années, cela nous suffisait. Mais aujourd’hui, la situation est plus tendue : les sources s’assèchent à un moment ou à un autre de la saison et l’on doit se connecter au réseau d’eau potable de la commune », ajoute Virginie Grivel.
D’où vient la nourriture ?
30 tonnes de foin, autant de viande, et de fruits, 16 tonnes de graines, 300 kilos de poissons et des kilos d’insectes : c’est ce que les 200 animaux de 60 espèces du Zoo de Servion dévorent par année. Des quantités qui demandent une certaine logistique. « Le zoo récupère des fruits et légumes invendus de la grande distribution. Une partie est utilisée tout de suite, une autre est parfois congelée pour être utilisée durant l’hiver, lorsque le choix est moindre », indique Virginie Grivel, codirectrice du parc. Dans les coulisses du zoo, des gardiens s’appliquent à préparer chaque gamelle. « Tout est pesé et enregistré dans le carnet de bord. Nous nous assurons que les animaux mangent des portions équilibrées en termes de sucre, de protéines et de minéraux », commente Pierre Ecoffey, biologiste du parc.
Ces rations sont aussi ajustées aux demandes des pensionnaires. Les gros mammifères mangent beaucoup plus en automne pour se créer une couche de graisse qui servira d’isolation et de réserve, alors qu’à la fin de l’hiver, ils se mettent à jeûner. A titre d’exemple, la part des ours oscille entre 8kg de fruits, légumes et viande à la fin de la saison froide et plus de 50 kg en automne, note le responsable des animaux. Et la viande alors, d’où vient-elle ? « On en récupère dans les abattoirs lorsqu’un lot est considéré comme impropre à la consommation humaine », note Virginie Grivel. Certains agriculteurs les appellent aussi, quand une de leurs vaches ne peut être transportée jusqu’à l’abattoir. « Nous avons dans notre petite équipe un ancien boucher qui se charge de la débiter dans nos locaux. Une fois,le zoo a aussi reçu le contenu de deux camions réfrigérés transportant des poissons de toutes sortes. Une erreur d’étiquetage l’avait rendu invendable, se rappelle Virginie Grivel. Cette année-là, Martine et Koda ont pu manger des guirlandes de poissons ».