14 et 15 juin 2025

Inaugurer un nouvel abattoir de campagne chez un agriculteur n’est pas chose courante, d’autant plus avec les lois contraignantes régissant les constructions en zone agricole.

Pour avoir un bon éclairage sur cette situation particulière, il faut revenir en arrière de quelques années. Le 1^er novembre 1989, Georges Martin recevait l’autorisation municipale d’ajouter à son exploitation agricole un abattoir qui lui permettait de transformer directement à la ferme la viande de ses animaux et de la vendre en direct dans un magasin ouvert aux particuliers. En 1998, avec l’arrivée de son fils Pascal, boucher de métier, cette activité s’est peu à peu développée.

Tout se passait bien quand, en 2014, le Service vétérinaire cantonal vaudois demande une mise en conformité de cet abattoir en regard de nouvelles normes régissant l’abattage des animaux et l’équipement y relatif. Et cela dans un délai de 2 ans, soit jusqu’en 2016. Cette condition était aussi à mettre en parallèle avec la cantonalisation du contrôle des viandes qui devait dorénavant être effectué uniquement par des vétérinaires au détriment des contrôleurs locaux.

Face à cette situation et en fonction du développement croissant de la ferme et du nombre d’animaux abattus, la famille Martin dépose un projet en 2015 avec la création d’un nouvel abattoir en transformant un bâtiment existant.

Ce projet est contesté par le Service vétérinaire cantonal qui envisageait plutôt la construction d’un abattoir régional. Ce qui équivaudrait à la fermeture de l’abattoir existant.

Dans la recherche d’une solution, la Municipalité de Puidoux a entrepris une enquête dans les communes environnantes et auprès des bouchers qui pourraient être intéressés à la construction d’un nouvel abattoir. Devant le peu de réactions favorables, ce projet fut abandonné.

Ce qui incita la Famille Martin, en 2016, à déposer une demande préalable élaborée par le Bureau de géomètres Gémétris auprès du service de la Direction générale du territoire et du logement (DGTL) du canton de Vaud. Cette demande est refusée en invoquant la transformation d’un bâtiment en zone agricole et son activité d’abattage alors qu’il pourrait être accepté en zone industrielle.

Il s’en suit une série de discussions et aussi de rencontres, même sur place, avec le chef du service de la DGTL responsable des constructions en zone agricole. Mais le refus persiste, malgré la présence et l’approbation du conseiller d’Etat Philippe Leuba à la tête de la Direction générale de l’agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires (DGAV).

Avec l’aide de Prométerre et de sa Société rurale de Protection Juridique représentée par Michael Molnar, après plusieurs discussions, un projet concret est accepté par le Service vétérinaire et il pourrait être prêt pour une mise à l’enquête publique.

Avec l’appui de la Municipalité de Puidoux, de députés de la région et toujours de Prométerre avec Michael Molnar, il est décidé de déposer la mise à l’enquête officielle du 30 janvier au 28 février 2021, qui n’a rencontré aucune opposition.

Mais la DGTL conclu que le projet de transformation d’un bâtiment et l’activité d’abattage en zone agricole, afin d’y créer un abattoir, ne peut être admis et refuse de délivrer une autorisation pour ces travaux, avec un délai de recours de 30 jours.

Le 2 juillet 2021, Georges et Pascal Martin, représentés par la Société rurale d’assurance de protection juridique FRV SA à Lausanne, décident de faire recours auprès de la Cour de droit administratif et public du Tribunal cantonal à Lausanne.

Le 18 novembre 2021, une commission du Tribunal cantonal est venue sur place à Puidoux pour une inspection locale et examiner de visu la situation.

Dans son Arrêt du 9 février 2022, la commission constate que le projet qui consiste en la transformation et l’agrandissement d’un bâtiment afin d’y créer un abattoir, répond à des besoins agricoles objectivement fondés liés à une exploitation agricole reconnue. L’abattage est reconnu comme une activité indissociable de l’agriculture comme les procédés exigeant beaucoup de ressources comme le pressurage du vin et la fabrication des produits laitiers.

En outre, la DGAV exige un agrandissement de l’abattoir pour le conformer aux normes vétérinaires en vigueur. La construction projetée permettra à l’évidence de répondre aux besoins susmentionnés.

Le recours est donc admis et a pu entrer en force le 18 mars 2022.

En 2023, la construction de l’abattoir a enfin pu débuter à la satisfaction de la famille Martin après 10 années de lutte et de tractations diverses.

Ainsi, l’abattage des animaux continuera à se faire sur place sans le stress préalable d’un transport en camion.

Cette réussite mérite bien une inauguration, le samedi 14 juin durant l’après-midi, en invitant tous les acteurs de ce long projet qui fera date, car il marque un tournant important dans les droits d’un agriculteur à valoriser sa production sur son lieu de travail.

La banque Raiffeisen de Lavaux s’est aussi jointe à la Famille Martin pour organiser, à la ferme, un événement sur invitation pour marquer les 125 ans de Raiffeisen Suisse.

Et le dimanche 15 juin de 10h à 17h la Famille Martin, Boucherie de campagne, organise une journée Portes ouvertes.

Les personnes intéressées pourront visiter le nouvel abattoir, mais aussi la partie de la ferme dédiée à la production de biogaz et de biométhane soutenue par le plan Climat vaudois.

Il sera aussi possible de se désaltérer et de se sustenter en déboursant un léger pécule couvrant les frais d’organisation.