Nationaliser…
Issues d’une bonne volonté entrepreneuriale, les caisses de secours mutuels ont vu le jour dans la seconde moitié du 19e siècle. Locales ou régionales, elles n’offrent alors qu’une protection minimale cantonnée à la maladie, l’invalidité ou le décès. Ne couvrant qu’à peine 5 % de la population, la manne commerciale que représente ce marché ne sera comprise qu’au 20e siècle… et quelle manne !
En se fédérant vers 1890, les caisses-maladie prendront conscience de leur marge de progression potentielle. Les autorités politiques ne seront pas lentes à légiférer, qui pour l’aspect social, qui pour l’économie, les caisses-maladie regroupant en effet tous les aspects de la société, elles intéressent la gauche tout autant que la droite.
La loi fédérale sur l’assurance-maladie sera adoptée par le peuple en 1912. Mais, ce n’est qu’en 1996 que la population avale la couleuvre et adopte la loi de l’assurance-maladie obligatoire. La Confédération donne le cadre… et les privés la gèrent. Une situation contre nature qui perdure encore aujourd’hui et dont Berne ne se séparera pas : les Conseils d’administration de ces sociétés privées étant à majorité constitués de parlementaires. Un hold-up splendide !
Pour mémoire, les caisses-maladie étaient pourtant passées tout près du jackpot déjà en 1974… en soumettant au vote populaire un contre-projet soutenu par le Parlement, qui prévoyait des cotisations obligatoires, mais pas d’obligation de prestations. Qui n’essaye rien n’a rien, dit-on…
Ces batailles homériques n’ont d’autre couleur que celle des Chambres fédérales. La droite comme la gauche, certes pour des raisons déjà évoquées, abondent quant à la nécessité des caisses-maladie. La question de donner la confiance à des entreprises privées pour la gérer est toute autre.
Pourtant, la caisse publique d’assurance-maladie avait déjà été soumise au peuple en 2007 et 2014… et rejetée de manière cinglante par deux fois. Aux yeux des votants, l’économie de marché semblait avoir bien plus de valeur que leur économie quotidienne… et nationaliser ces entreprises… c’est mal, c’est communiste !
Quant à l’assurance vieillesse, qui ronronne dans les Chambres, qui disent oui, qui disent non… eh bien, on l’attend.