Mobilité – L’hydrogène : une énergie sous exploitée ?
Depuis quelques années, l’hydrogène est présenté comme une alternative prometteuse aux carburants fossiles. Pourtant, cette technologie peine à se démocratiser auprès des constructeurs automobiles et des réseaux de stations-service. Explications.

En Suisse, le développement des infra-structures de ravitaillement en hydrogène a connu des avancées notables. En mai 2023, la société Avia Distribution SA inaugure sa première station-service à hydrogène de Suisse romande à Puidoux. Un mois après, la compagnie SOCAR emboîte le pas sur l’aire d’autoroute de Grauholz, près de Berne. Portant ainsi à 15 le nombre de stations en service dans le pays. Ce chiffre place la Suisse parmi les pays européens disposant du plus grand nombre de stations de ravitaillement en hydrogène par habitant. En 2024, 125 nouvelles stations ont été inaugurées de par le monde, portant le total à 1’160 installations réparties dans 45 pays. L’Asie est en tête avec 748 stations, suivie de l’Europe avec 294 stations, dont 113 en Allemagne et 65 en France.
Malgré le développement progressif des infrastructures, l’adoption des véhicules à hydrogène reste limitée. Selon un rapport de l’Agence internationale de l’énergie, le nombre de véhicules électriques à pile à combustible en circulation dans le monde a augmenté de 40 % entre 2021 et 2022, atteignant plus de 72’000 unités. Un chiffre faible comparé aux 10 millions de véhicules électriques ou hybrides rechargeables vendus sur la même période.
Inférieur aux prévisions
En Suisse, les projections indiquent qu’environ 200’000 véhicules à hydrogène pourraient être en circulation d’ici 2050, sur un total estimé de 4,7 millions de voitures de tourisme. Actuellement, le nombre de véhicules à hydrogène en Suisse est nettement inférieur aux prévisions initiales. Par exemple, sur les 1’600 camions Hyundai XCIENT Fuel Cell prévus, seuls 50 circulent aujourd’hui dans le pays.
Plusieurs obstacles freinent la popularisation de l’hydrogène comme source d’énergie pour les transports. La production, le stockage et la distribution de l’hydrogène sont coûteux, ce qui se répercute sur le prix des véhicules (Toyota Mirai = 69’000.- / Toyota Corolla 33’000.-) et du carburant. Le prix d’un kg d’hydrogène coûte actuellement 10.80.- (Shell) net, sachant que la plupart des véhicules de tourisme peuvent comprendre 4 à 5 kilos. Un plein coûte donc environ 45 francs pour 550 à 650 kilomètres d’autonomie.
Le rendement global de la chaîne de l’hydrogène, de sa production à son utilisation dans un véhicule, est inférieur à celui des véhicules électriques à batterie. Bien que le nombre de stations-service à hydrogène augmente, il reste insuffisant pour assurer une couverture territoriale adéquate et rassurer les consom-mateurs. De plus, l’offre de véhicules à hydrogène demeure limitée, car peu de constructeurs se lancent sur ce marché et le prix d’une voiture de tourisme est plus ou moins doublé par rapport aux autres systèmes de propulsion.
En conclusion, malgré ses avantages potentiels, l’hydrogène peine à s’imposer comme une alternative majeure aux carburants fossiles. Le développement des infrastructures et l’adoption des véhicules à hydrogène progressent lentement, freinés par des défis technologiques, économiques et logistiques. Pour que l’hydrogène devienne une solution énergétique viable et largement adoptée, des investissements conséquents ainsi qu’une volonté politique forte seront nécessaires.
Comment ça marche ?
Les véhicules à hydrogène utilisent une pile à combustible pour produire de l’électricité à bord. Leur motorisation est donc similaire aux véhicules électriques. L’hydrogène, stocké sous haute pression (env. 700 bars) dans un réservoir est acheminé vers la pile, où il réagit avec l’oxygène de l’air. Cette réaction électrochimique génère de l’électricité qui alimente un moteur électrique, tout en ne rejetant que de la vapeur d’eau. En termes d’autonomie, les constructeurs annoncent environ 650 km.
Le système de la pile à combustible chauffe rapidement lors du fonctionnement et doit être refroidi en permanence pour éviter toute surchauffe et perte d’efficacité. Un circuit de refroidissement (similaire à celui d’un moteur thermique) maintient la température de la batterie autour de 80°C pour garantir un fonctionnement optimal. Toujours en comparaison à un véhicule thermique, le ravitaillement en hydrogène s’effectue en quelques minutes. Toutefois, la production d’hydrogène reste un défi : elle peut être réalisée par électrolyse de l’eau, une méthode propre si elle utilise de l’électricité renouvelable, ou à partir de gaz naturel, un procédé plus polluant.