La petite histoire des mots
Obsèques
Les obsèques de l’acteur Alain Delon, icône du cinéma français, décédé le 18 août dernier à l’âge de 88 ans, ont été célébrées samedi dernier, dans la plus stricte intimité, dans sa propriété de Douchy, dans le Loiret, conformément à ses dernières volontés. De nos jours, le mot « obsèques » est devenu synonyme de funérailles et d’enterrement. Mais rares sont celles et ceux qui en connaissent le sens exact.
« Obsèques » nous vient bien sûr du latin. Mais il est issu non pas d’un seul mot, mais de deux qui se sont confondus, avant de se fondre en un seul. Le premier de ces termes est « obsequiae », le neutre pluriel d’ « obsequium » qui signifie « conformité », dans le sens de « suivre docilement ». Issu du verbe « sequor », qui veut dire « suivre », il prit en bas latin le sens de « cortège ». Le second de ces mot est « exsequiae », qui signifie tout simplement « funérailles ».
Le substantif « obsèques » a donc été forgé par le mariage de ces deux mots. En vieux français, on le retrouve indistinctement, dès le XIIe siècle, sous la forme « oseque », au masculin singulier, ou « obseque » au féminin singulier. Ce n’est qu’au XVIe siècle que l’usage du féminin pluriel s’imposa. Si, en ce temps-là, le pluriel a prévalu, c’est que les obsèques ne furent plus perçues comme une cérémonie isolée, mais comme une suite de rites.
Au sens strict, les « obsèques » désignent une cérémonie qui précède l’inhumation ou la crémation. Cependant, cette cérémonie destinée à rendre hommage au défunt, peut prendre diverses formes, selon les convictions de la personne décédée. Elle peut revêtir une forme civile, très sobre, ou se dérouler selon les rites, plus ou moins complexes, propres à chaque religion. Le dictionnaire de l’Académie française définit les obsèques comme une cérémonie funéraire ayant « un certain caractère de solennité ». Le Littré, quant à lui, va même jusqu’à décrire les obsèques comme un « convoi pompeux ».
Le mot « funérailles », souvent employé comme un synonyme d’obsèques, a en fait un sens différent. Si les obsèques sont la cérémonie qui précède l’inhumation ou la crémation, les « funérailles » désignent plutôt le cortège qui accompagne le corps du défunt. « Funérailles » nous vient du latin « funeralis » (funèbre). Le mot « enterrement », de son côté, désigne uniquement le moment de l’enfouissement du corps dans la terre. Il est synonyme d’ « inhumation ».
Le qualificatif « obséquieux », qui s’attache à un individu complaisant, flagorneur ou qui témoigne d’une déférence excessive, ainsi que le substantif « obséquiosité », dont le synonyme est servilité, ont la même étymologie. Eux aussi sont issus de « sequor » (suivre). Les contraires d’obséquieux sont « hautain », « cassant » ou « irrévérencieux ». Ces adjectifs furent souvent attribués à Alain Delon, notamment par ses détracteurs. Désormais, à tort ou à raison , ils font partie de sa légende.