La chronique de Denis Pittet
Kirsty Coventry ne doit rien au hasard

Jeudi 20 mars dernier à Costa Navarino en Grèce, près d’Olympie, vers 15h50, Kirsty Coventry a été élue à la tête du CIO. La jeune femme est la première femme à accéder au poste de Présidente ; elle est la 10e dans l’ordre (Demetrius Vekelas, Pierre de Coubertin, Henri de Baillet-Latour, J. Sigrid Estrom, Avery Brundage, Lord Killanin, Juan Antonio Samaranch, Jacques Rogge et Thomas Bach).
Kirsty Coventry – un peu à la surprise générale – a été élue au premier tour, laissant pantois les autres candidats – et pas des moindres – en particulier Lord Sebastian Coe et Juan Antonio Samaranch junior, dit Juanito. Le Français David Lappartient, sauf faute grave de parcours, sera sans doute le favori de l’élection suivante, en… 2037. Mme Coventry est jeune, 41 ans, et également la première représentante du continent africain, puisqu’elle est née au Zimbabwe.
Kirsty Coventry a récolté 49 voix, Coe 8 et Samaranch 28. La majorité absolue était de… 49. Ce résultat apparaît comme un triomphe mais une autre interprétation est aussi possible. En effet, à une voix près, on partait pour un deuxième tour – et désormais ce n’est que pure spéculation – et les choses auraient pu tourner totalement différemment. En d’autres termes, la favorite du président sortant Bach ayant fait un brillant premier tour aurait pu voir ensuite ses voix s’échapper au deuxième. Beaucoup d’insiders avaient prévu ce scénario. On allait jusqu’à dire que le second du premier tour serait le premier du second. Si de fins stratèges s’étaient appuyés sur cette issue, eh bien, ils se mordront les doigts encore longtemps en se demandant qui a voté faux ou n’a pas voté selon leurs consignes. Bref.
Mais ne nous y trompons pas. Kirsty Coventry n’est pas arrivée où elle est par hasard. D’abord c’est une olympienne aux multiples médailles en natation (5 médailles aux JO, dont 2 d’or et 2 médailles d’or aux championnats du monde), donc une sportive de très haut niveau avec tout ce que cela implique : une volonté de fer, un réseau énorme au sein du sport mondial (membre de la commission des athlètes) et une parfaite connaissance des rouages du CIO où elle est siège depuis 2013. Elle a surtout été membre de la commission exécutive du CIO durant trois ans, une condition sine qua non pour prétendre à la charge suprême. D’ailleurs, à s’attarder sur son parcours complet et diversifié au CIO, on conclura qu’elle a été préparée à la charge qu’elle occupe désormais. Ce n’est pas Thomas Bach qui dira le contraire.
Le CIO est une sorte de grande muette. Les non-dits sont la règle et les dits sont pesés avec un art et une rigueur absolue. Kirsty Coventry a donc logiquement présenté un programme assez lisse et sans relief. Les mauvaises langues disent que Bach ne sera jamais loin d’elle tant elle incarne potentiellement la continuité de ce qu’a mis en place le Bavarois. On verra, comme disent les Vaudois.
A propos de Vaudois (et de Lausannois) tout le monde se demande si la nouvelle présidente va diriger le CIO depuis la Capitale olympique ou rester dans son Zimbabwe natal. Personne du staff en place à Vidy n’ose imaginer cette dernière hypothèse. Le très sérieux « Guardian » dans un article de dimanche dernier affirme que la nouvelle Présidente prend quelques jours de vacances chez elle et profite d’un safari. Puis le journal affirme qu’elle consacrera les trois prochains mois à se préparer à déménager avec sa famille et ses jeunes enfants. A déménager à Lausanne , donc . On verra.