Exposition – Triple exposition de découpages très originaux à Château-d’Oex
Le Pays-d’Enhaut est la patrie de l’art du papier découpé ! Nous vous proposons donc une excursion d’une journée dans cette région un peu périphérique du canton de Vaud.
Le matin, on pourra se balader dans les vieux villages historiques de Rougemont et de Rossinière. Dans ce dernier, on apercevra, entre les arbres, la façade richement décorée du Grand Chalet : il appartient à la famille du célèbre peintre Balthus, qui y résida. En fait, toute la région comporte de magnifiques et opulentes demeures de l’époque bernoise. Sans parler des églises à l’origine romane.
Après un repas de spécialités fromagères locales dans un restaurant de la région, on consacrera l’après-midi au musée du Pays-d’Enhaut, à Château-d’Oex. Ce bâtiment, qui a été agrandi de façon très réussie, nous plonge d’abord dans la vie traditionnelle de la région. Une cuisine ancienne, une salle à manger bourgeoise, une forge, une chambre de séjour où l’on dormait aussi, une cuisine paysanne, avec leurs meubles, leurs objets de bois et outils, nous donnent une bonne idée vivante des métiers et traditions d’autrefois.
Mais c’est surtout la riche collection de papiers découpés qui fait l’intérêt de ce musée. L’art du découpage, qui demande une extraordinaire virtuosité, nous est venu de Chine il y a environ 400 ans. Son précurseur dans le Pays-d’Enhaut fut Jean-Jacques Hauswirth (1808-1871), un bûcheron pauvre. Longtemps, cet art a été considéré comme naïf et vieillot. Il fut oublié, voire méprisé. Il a heureusement été redécouvert. Car il comporte de véritables chefs-d’œuvre ! Hauswirth et ses successeurs ont représenté la poya (la montée à l’alpage), les animaux, les chalets en bois, les forêts de sapins, puis est venue dans cet art l’intrusion du monde moderne, comme les tracteurs, les automobiles, les avions…
Actuellement, le musée présente trois expositions temporaires
Markus Blum propose des travaux assez classiques, mais très plaisants à l’œil par leurs couleurs, dans un art que l’on associe le plus souvent au noir-blanc. Son épouse Toshiko Blum vient du Japon, un autre pays où le découpage a aussi une longue tradition. La culture nippone l’a bien sûr fortement imprégnée. D’où des œuvres non « réalistes », mais qui révèlent plutôt des motifs allégoriques ou symboliques, avec des titres comme Chance, Beauté ou encore Zen, et contenant des idéogrammes.
Claude Yersin, quant à lui, renouvelle complètement l’art du découpage. Ayant travaillé pendant plusieurs années aux Seychelles, dans l’Océan indien, il avait introduit dans ses œuvres des thèmes locaux : palmiers, tortues, chars à bœufs, vues de l’océan avec ses barques, fleurs et faune locales. Il réside maintenant au Portugal, en Alentejo, le pays des chêne-liège, qu’il a souvent représentés, ainsi que le travail des ouvriers pour extraire leur précieuse écorce. Mais ses œuvres ont aussi été influencées par l’art arabe, qui fut bien présent au Portugal, et par l’histoire et la culture de ce pays riche en civilisations différentes. Sa dextérité technique est tout simplement extraordinaire, notamment quand il évoque les motifs des somptueux tapis arabes. Une vidéo permet de voir l’artiste au travail, dans son atelier, pénétré par la concentration extrême que requiert ce travail très minutieux. On appréciera la grande variété des thèmes qui l’ont imprégné : pressage de l’huile d’olives, monastères, villes modernes, expéditions maritimes portugaises, et bien d’autres. Délaissant la symétrie axiale stricte de nombreux découpages, les siens constituent parfois de véritables tableaux ou des sortes de BD, s’inspirant de récits mythologiques ou historiques, que l’on peut « lire » par l’image. Quant aux entourages de ses travaux, ce sont des thèmes géométriques, floraux ou faits d’arabesques d’une grande finesse. Yersin n’hésite pas à aborder aussi les problèmes médicaux et scientifiques de notre temps (il est vrai qu’il fut médecin pendant des décennies), tels que celui du Covid, où l’on voit les chevaliers à la seringue vaccinale combattre les vilains petits démons de la pandémie !
Par son œuvre et celle d’autres refondateurs actuels du découpage, on constate que cet art qui avait un peu vieilli a acquis une véritable modernité !
« Toshiko Blum, Claude Yersin, Markus Blum »,
Musée du Pays-d’Enhaut & Centre suisse du papier découpé, Château-d’Oex
Jusqu’au 28 juillet, MA-DI 13h30-17h30
Un magnifique catalogue d’œuvres de Yersin, enrichi par des poèmes en portugais et en français, est vendu à la réception