Courrier de lecteur
Baisser les coûts de la santé par la fin du libre choix de son soignant ?
Christa Calpini, pharmacienne | En 2008, le peuple disait sèchement NON (69,5 % des voix) à un article constitutionnel touchant au libre choix de son soignant. Rebelote en 2012 avec un NON cinglant (76 % des voix) pour un changement dans la LAMal obligeant les assurés à s’affilier à un réseau de soin, les assureurs choisissant quels réseaux et quels médecins seraient remboursés.
2025, le Parlement revient à la charge en acceptant, pour faire baisser les coûts, une motion touchant l’obligation de contracter. Les assureurs auraient le pouvoir de choisir les prestataires (médecins, pharmaciens, physiothérapeutes, laboratoires…) avec lesquels ils seraient liés. Ils décideraient en parallèle du lieu où un médecin peut s’installer alors qu’actuellement ce sont les cantons qui pilotent les admissions en fonction des spécialités et du nombre maximum autorisé sur leur territoire. Laissons ce rôle aux cantons, rôle par ailleurs renforcé par le Parlement en 2021 !
Que les assureurs jouent le leur, à savoir, encaisser nos primes, contrôler les factures, dénoncer les abus et payer les soins délivrés aux patients. Si les assureurs pouvaient un jour choisir les soignants qu’ils remboursent, ce choix ne pourrait se faire que selon des critères économiques et non de qualité. Les médecins s’occupant en majorité de personnes âgées ou de malades chroniques requérant des traitements lourds et onéreux seraient pénalisés par rapport à ceux ayant une patientèle jeune et occasionnellement malade. Pris en otage, les malades n’auraient d’autre solution que de changer de médecin ou d’assureur, voire payer une assurance complémentaire. Or la relation de confiance entre un patient et son soignant est primordiale pour comprendre et accepter sa maladie. La qualité d’une relation humaine est une notion dont le coût ne peut pas être évalué. Le monde politique n’accepte pas que la concurrence ne s’applique pas dans le domaine de la Santé.
En effet, le patient peut choisir son pain, sa salade ou sa voiture mais pas sa maladie. La fin du libre choix signifierait aussi que ceux qui pendant des décennies ont financé pour d’autres, par leurs primes, cette liberté, ne disposeraient plus pour eux-mêmes de ce droit. Cela correspond à une violation de contrat entre générations et une rupture de solidarité. Pour tenter de maîtriser les coûts, pensons à davantage de coordination dans les soins, plus de prévention et de promotion de la santé, et des échanges entre professionnels d’horizons divers afin de trouver la solution la plus adaptée pour le patient.