Cinéma – « Rimini » de Ulrich Seidl
Autrichiens ringards en station balnéaire

Visible au cinéma d’Oron dès cette semaine, Rimini parle d’une star autrichienne déchue, Richie Bravo, errant dans Rimini en quête des restes de sa gloire passée. Entre tragique et comique, cette œuvre d’Ulrich Seidl est assez inédite.
Richie has been
Avec Rimini, on a tout d’abord affaire à un crescendo d’humour un peu amer mais très réussi. On se réjouit du tragi-comique de pointe auquel on a affaire avec cette ancienne star autrichienne qui erre dans Rimini en attendant les cars de touristes de son pays, encore plus vieux que lui, et qui ont fait le déplacement pour le voir chanter l’amore à l’italienne dans une vieille salle à manger d’un hôtel aussi vide que has been. Rimini explore ainsi très bien le ringard, par son esthétique et par son ton, au moment de contextualiser son protagoniste. Le personnage est écrit sur mesure pour son acteur Michael Thomas, qui incarne à merveille le personnage, tant par sa grande voix que par sa stature.
Hiver maudit à Rimini
Rimini a aussi pour lui des représentations assez inédites et bien pensées, telles que celle d’une station balnéaire en perte de vitesse, hantée par de vieilles personnes désespérées, ou encore des scènes de sexe entre personnes âgées qui perturbent nos habitudes de spectateurs et spectatrices. L’image est à relever aussi puisqu’elle est particulièrement réussie. On retrouve beaucoup de cadrages larges et frontaux, avec des belles symétries et lignes de force. Les couleurs pâles relaient, quant à elles, la morosité de l’hiver à Rimini. Richie marche ainsi sans cesse le long des plages, touchées par les couleurs de l’hiver comme par une malédiction, et lui, à l’automne de sa vie, fait tout aussi pâle figure. C’est que le réalisateur mène la vie dure à son protagoniste. Les coupes sont acerbes. On dirait parfois que Seidl dit à son acteur qu’on a compris, comme s’il lui ordonnait d’arrêter son charabia. Ainsi au milieu d’une chanson, on coupe, et Richie rejoint un hôtel où se trouve l’une de ses clientes. Le tout fonctionne bien pour caractériser un personnage haut en baratin.
Wild child peu crédible
Néanmoins, la nécessité de lui plaquer un schéma narratif classique réussit moins au film de Seidl. Petit à petit se détache en effet une jeune silhouette de femme dans le fond des salles qu’il anime. Elle est perchée sur des talons, tient toujours au bout de son bras un petit sac à main et regarde fixement la scène derrière des lunettes de soleil noires. Avec ses cheveux décolorés et son style année 2000, elle rappellerait presque la fille de wild child, la richesse en moins. En effet, là où l’histoire aurait pu prendre un tour encore plus rocambolesque, elle s’étiole dans une histoire assez clichée : cette jeune femme est la fille de Richie Bravo. Elle est venue lui réclamer dix-huit ans d’allocations familiales qu’il n’a jamais versées. Cette trame narrative permet de montrer l’égoïsme de Richie. Il sera ensuite montré dans tous ses aspects les plus bas lorsqu’il s’agira de trouver l’argent qu’il lui doit. Ulrich Seidl n’écrit pas ses dialogues, et c’est peut-être dans le jeu de la fille de Richie que cela se voit le plus : elle semble paniquer devant la caméra, et répète les mêmes mots comme pour se libérer de la séquence à jouer. L’authenticité de Richie face à sa fille est ainsi difficilement jugeable, dans un contexte de jeu aussi étrange. Certains éléments de mise en scène restent aussi mal compris à l’issue du film : pourquoi insister par exemple sur la présence de requérants d’asiles à Rimini ? Durant les longues traversées à pied de Richie, des silhouettes emmitouflées se détachent sur le bas-côté à de multiples reprises. Richie s’en fiche, on l’aura compris, il est égoïste comme le film ne cesse de le souligner.

