Cinéma – Michel Blanc, une dernière fois sur les grands écrans
« La cache » de Lionel Baier

Décédé en octobre dernier, l’acteur des Bronzés fait sa dernière apparition dans « La cache » de Lionel Baier, un film retraçant le vécu d’une famille juive pendant les événements de mai 68.
Le souvenir d’adultes
Adapté du roman éponyme de Christophe Boltanski, le dernier opus de Lionel Baier raconte les événements de mai 68 en les gardant hors-champ. La caméra se réfugie ainsi aux côtés de Christophe (Ethan Chimienti), âgé de neuf ans, que ses parents ont confié à leurs aînés le temps de mener à bien la révolution. Le petit garçon vit ainsi en compagnie de ses grands-parents (Michel Blanc et Dominique Reymond), de ses oncles et de son arrière-grand-mère communément surnommée « Arrière-pays » dans la famille. Cette dernière, encore plus que les autres, est vue avec des yeux d’enfants. Retirée dans ses appartements, elle vit magistralement en écoutant des grands disques et en mangeant des raviolis apportés par l’enfant. Les oncles laissent, quant à eux, un souvenir flou, interchangeables comme le sont parfois les adultes du même âge dans un regard d’enfant. Mère-grand a elle aussi la profondeur d’une figure mystique, incarnée par une Dominique Reymond au regard toujours aussi perçant tout en étant par instants comique, parcourant toujours la ville dans sa voiture, habillée de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Ces points de vue fantasques sur les adultes de la famille Boltanski évoquent dès lors le souvenir, avec toute la nostalgie que ce sentiment contient, sans avoir besoin de le mentionner.
De 39-45 à mai 68
Hors-champ de la vie familiale pleine de surprises, Paris est en émulation, ce qui est la raison de la présence de Christophe auprès de ses grands-parents. A force d’errance dans l’appartement familial, on y découvre des recoins, dont une cache qui vient rappeler le passé de père-grand, juif qui a dû se cacher pendant la guerre. De manière profondément originale, le film de Lionel Baier parle dès lors de la seconde guerre mondiale par ce qu’il en reste vingt ans après. En effet, si on a l’habitude de voir des films sur ce chamboulement tragique de l’histoire, rares sont les films qui créent un lien entre 39-45 et mai 68 au public de 2025.
Lionel Baier encadre son récit d’une voix-over énoncée par lui-même, qui promet de raconter rien que la vérité sur cette famille. Cette représentation sonore du pacte usuellement tacite entre le film et son public est bénéfique à un long-métrage qui reste parfois un peu impénétrable
« La Cache » fiction de Lionel Baier
Suisse, France, Luxembourg
2025, 85’, VF, 16/16 ans