Chexbres – Présence polonaise à la Maison des Arts
« Joseph Czapski, l’existence dans la peinture »
Pierre Jeanneret | La vie du patriote polonais, écrivain et peintre Józef Czapski (1896-1993) a épousé toutes les tragédies du 20e siècle. Né à Lvov dans une famille aristocratique, il fait la guerre de 1914-18. Après ses études aux Beaux-Arts, il fonde en 1919, dans la Ville Lumière, le Komitet Pariski qui réunit les Kapistes, un groupe d’artistes polonais qui réagit contre la tradition de l’académisme et de la peinture historique ou religieuse. Ils sont inspirés par Cézanne, Van Gogh, les Fauves et Matisse. Ce n’est plus le sujet qui leur importe, mais la peinture pure et la couleur. Mais l’Histoire rattrape Czapski. En 1939, il rejoint comme officier l’armée polonaise, pour tenter de résister à l’agression hitlérienne. Fait prisonnier par les Russes (en vertu des accords secrets entre l’URSS et l’Allemagne liés au Traité Ribbentrop-Molotov), il est l’un des rares officiers qui échappent au massacre de Katyn, œuvre du NKVD soviétique, ce qu’il sera l’un des premiers à révéler au monde. Mais il est détenu dans un camp soviétique … où il donne aux prisonniers des conférences sur Marcel Proust. Puis, après un long périple à travers le Moyen Orient, il rejoint les unités polonaises du général Anders qui combattent l’Allemagne. Après 1945, il s’installe définitivement à Paris et participe au mensuel Kultura, qui rassemble les Polonais en exil pendant le régime communiste. Il est en contact avec l’intelligentsia parisienne, et notamment avec Camus et Malraux. Penseur et écrivain, Józef Czapski a laissé plusieurs ouvrages importants, dont Terre inhumaine, où il évoque son vécu des années sombres de la Deuxième Guerre mondiale. A la Maison des Arts de Chexbres, c’est le peintre qui est mis en valeur, grâce à la collection de Richard Aeschlimann, qui fut le galeriste de Czapski en Suisse et l’un de ses grands amis pendant des décennies. Toutes les œuvres d’avant-guerre ayant été détruites, on verra ici sa production des années 1960 à son décès. Comment qualifier son art ? D’abord il est résolument hors des modes et figuratif. Le sujet importe peu. Il peut s’agir d’une simple petite table de chevet portant un vase, voire d’un chiffon. Ses vues d’intérieurs rappellent celles de Vuillard et Bonnard. Tandis que ses natures mortes évoquent Jean-Baptiste Chardin. Czapski est un peintre du quotidien, des choses banales qu’il sublime en les rendant éternelles. Il y a un côté artisanal dans sa peinture, au sens le plus noble du terme. On trouve aussi dans son œuvre des paysages vivement colorés. La figure humaine est souvent absente de ses tableaux. Le peintre adopte volontiers un cadrage original. Homme habité par une profonde foi catholique, il n’a cependant jamais voulu représenter le Christ, sinon en s’inspirant de Rouault, c’est-à-dire de manière indirecte. Celles et ceux qui voudront en savoir plus sur Józef Czapski se rendront à la Fondation Michalski, à Montricher, où une exposition parallèle lui est consacrée. Tant l’écrivain que le peintre y sont à l’honneur. « Joseph Czapski, l’existence dans la peinture », Maison des Arts Plexus, Chexbres
Attention ! L’exposition ne se visite individuellement que sur rendez-vous par tél. au 021 946 28 30 et aux dates des visites communes les 24 octobre, 15 novembre, 12 décembre et 17 janvier