C’est à lire: Le peintre Claude Monet à Belle-Ile

Vous aimez les tableaux de Claude Monet (1840-1926), qui fut certainement le plus important et le plus génial des Impressionnistes ? Alors ne manquez pas de lire ce petit livre très enrichissant. Un peu lassé de ses toiles réalisées en Normandie (notamment ses fameuses représentations des falaises d’Etretat,) et y trouvant la Manche trop calme, Monet décide en 1886 de se rendre à Belle-Île-en-Mer, en Bretagne. Là, il va trouver ces assauts furieux de l’océan qu’il recherchait ! Il y séjourne de septembre à novembre. Il y réalise l’un de ses chefs-d’œuvre, Les Pyramides de Port-Cotton. Le livre de Jean-Baptiste Gauvin, à la jonction entre la critique d’art et le roman, rend cette expérience picturale mais aussi humaine avec talent et de manière vivante. L’ouvrage fait appel à tous nos sens : visuel, auditif, olfactif (les embruns de l’océan), et même gustatif, car Monet aimait la bonne chère. L’atmosphère de Belle-Île est superbement évoquée : terre agricole pauvre battue par les vents, fracas des vagues contre les rochers « comme les béliers au Moyen Âge », leur donnant des formes ciselées, et quasi fantastiques, pêcheurs penchés au café sur leur eau-de-vie.
Car Monet vit aussi à Belle-Île de riches rapports humains. Avec le peintre anglais John Peter Russell, et sa belle épouse, dont la présence finit cependant par l’importuner : Monet est un solitaire, hanté par son travail artistique. Mais sont surtout évoquées ses relations avec un ancien pêcheur très fruste, Poly, qui devient son porteur dévoué et s’intéresse à son travail. L’artiste finit par se lier d’amitié avec lui et en réalisera l’un de ses rares portraits. En filigrane, l’amour profond que Monet porte à son épouse Alice Hoschédé, à qui il écrit tous les jours, et qui s’impatiente un peu de sa longue absence. Le livre nous apprend beaucoup sur l’artiste, sur sa méthode de travail, sur sa quête inlassable de la perfection, sur sa personnalité et ses relations humaines, mais surtout sur l’air marin de Belle-Île. Quant au tableau évoqué et bien reproduit en double page, on peut dire qu’il est l’équivalent pictural des Travailleurs de la mer, œuvre d’un autre géant, Victor Hugo.
Signalons que cet ouvrage fait partie d’une collection intitulée « Le roman d’un chef-d’œuvre », où l’on trouve une trentaine de titres. Alors, si vous voulez redécouvrir Klimt, Goya, Fra Angelico ou encore Van Gogh…
Jean-Baptiste Gauvin, La mer terrible
selon Monet, Paris,
Ateliers Henri Douglas, 2024, 143 p