C’est à lire
2024 : Les 100 ans du surréalisme
Thibaud Mivelaz, Jonas Montenero et Titouan Menétrey, pour le Club de lecture d’Oron | En 1924, la ville de Paris – et on ne parlera pas des Jeux olympiques – est le théâtre d’un moment marquant pour l’histoire des arts et notamment de la littérature : aux Editions du Sagittaire, André Breton (1896-1966) publie le premier Manifeste du surréalisme. Mais le surréalisme ne se résume pas à une ville et un auteur, puisqu’il est non seulement collaboratif mais aussi transdisciplinaire. A Lausanne, le MCBA propose ainsi, à l’occasion du centenaire du Manifeste, une exposition (qui s’achève le 25 août) consacrée au surréalisme. Outre faire un peu de publicité, nous profitons donc de l’occasion afin d’évoquer deux auteurs – à lire absolument ! – du mouvement, mouvement qui sans arrêt questionne notre rapport au langage, à l’imagination ou plus largement à la vie.
Le Pape du surréalisme
Comment parler de l’église surréaliste sans en évoquer le Pape : André Breton. Il est impossible de ne pas relever l’immense influence qu’il a eu sur la littérature française et plus généralement sur le milieu artistique parisien du XXe siècle. Poète, écrivain, théoricien, personnage public, collectionneur ; son génie ne se lit pas uniquement dans l’œuvre qu’il a laissée derrière lui, mais également dans cette capacité qu’il avait de découvrir des artistes et de les inciter à créer. C’est bien simple, de 1924 jusqu’au début des années 30, tout lui tourne autour. Plus encore, tout ce qui lui tourne autour est auréolé de succès !
Vous aimeriez une porte d’entrée dans l’énigmatique littérature surréaliste ? Ne cherchez pas plus loin. Nous ne pouvons que vous recommander la trilogie que forment Nadja (1928), Les vases communicants (1932) et L’Amour fou (1937). Les trois livres, tous autobiographiques, sont dédiés à la recherche de ce fameux « hasard objectif » qui obsède Breton et qu’il définit comme « la manifestation de la nécessité extérieure qui se fraie un chemin dans l’inconscient humain ».
Robert Desnos, poète narcoleptique
Autre grand écrivain surréaliste, celui qui, dit-on, était capable de s’endormir sur commande, Robert Desnos (1900-1945), occupe une place particulière dans ce courant littéraire. Son recueil Corps et biens, publié en 1930, rend compte d’une décennie d’écriture, de 1919 à 1929, durant laquelle il rejoint et puis quitte le groupe surréaliste. Divisé en douze sections, il faut lire ce recueil dans l’ordre pour apprécier l’évolution de l’auteur. En effet, alors que les premières sections comprennent des poèmes en alexandrins classiques, surtout parodiques, dans les suivantes, où Desnos fait partie du groupe, il s’adonne à toutes sortes de jeux de mots qui viennent court-circuiter la langue, et écrit des poèmes empreints de mystère et de rêve, témoins de l’influence que le surréalisme exerce sur lui. Ensuite, les dernières sections, qui datent de la rupture avec le groupe, reviennent à l’alexandrin et font montre d’un poète qui, riche de ses expériences passées, a trouvé sa propre voix.