Ancilla,la jeune fille qui souriait aux étoiles
Ancilla Vitelli, écrit par Ardélita Genoud – Editions Favre

Monique Misiego | Je trouve paradoxal en ce dimanche soir sous le brouillard de vous parler du parcours de cette jeune fille. Parce qu’aujourd’hui, le peuple suisse vient de refuser une initiative pour les entreprises responsables et une autre visant l’interdiction du financement du matériel de guerre. Bizarre, vous avez dit bizarre. Mais la façon de voter de nos concitoyens me surprendra toujours. On va dire que c’est la faute des Suisses-allemands. Vous comprendrez mon désarroi à vous parler du parcours de cette jeune fille qui est une victime directe de la guerre, guerre dont les armes sont certainement vendues par des fabriques d’armement suisses. Donc on va faire comme si, et glisser la poussière sous le tapis, circulez, y a rien à voir ! Mais ça n’empêche pas la déception. Ancilla est une jeune fille rwandaise, dont ses parents, Tutsi, ont été massacrés. Elle-même sera recueillie avec sa plus jeune sœur par une femme Hutu, cette même ethnie qui massacrait les Tutsi. La partie supérieure droite de son visage est abîmée. Comment, on ne le sait pas. Trop petite pour s’en souvenir. Alors qu’elle a 18 mois, son destin croise la route d’Edmond Kaiser, qui décide de la ramener avec lui pour la faire soigner. Quelques années plus tard, elle va rencontrer un autre médecin tout aussi important pour elle, Wassim Raffoul, qui lui rendra une partie de son visage. Lui-même dira dans la préface : « les dirigeants du monde devraient lire ton histoire, Ancilla. Ils devraient la lire le soir avant de dormir. Les étoiles du firmament pourraient alors leur parler. » Ce n’est pas seulement son histoire qui est racontée dans le livre. Racontée d’ailleurs à la première personne car la journaliste Ardélita Genoud lui prête sa belle plume. Des documents de « Sentinelles » certifient de la rencontre d’Edmond Kaiser et d’Ancilla, de son parcours, des étapes traversées pour rejoindre la Suisse, de l’accès aux soins, de son adoption. L’histoire d’Ancilla peut résonner en chacun de nous. Parce qu’elle nous montre que qu’elles que soient les épreuves qui nous sont imposées, nous avons en nous un instinct de survie, une volonté de vivre qu’un tout petit souffle peut raviver. Que doit penser Ancilla au soir de ce dimanche de novembre ou de nouveau les résultats des votations nous déçoivent ? Peut-être pense-t-elle que nous devrions avoir un peu plus d’empathie, comme cette femme sensée être une ennemie et qui s’est occupée d’elle ? Peut-être pense-t-elle que les intérêts financiers priment toujours sur les intérêts humains ? Peut-être pense-t-elle que dans les épreuves que nous traversons actuellement, on aurait pu espérer que le monde devienne meilleur ? Que lui répondre ? Comment lui répondre ? en lisant son histoire qui nous fera peut-être un peu réfléchir, mais trop tard. Je vous souhaite tout de même une bonne lecture.