La petite histoire des mots
Appartement

Mauvaise nouvelle pour les locataires : le taux hypothécaire de référence passe à 1,75 %, ce qui promet une nouvelle hausse de certains loyers de 3 %, dès le mois d’avril prochain. En Suisse, selon les dernières statistiques, près de deux ménages sur trois sont locataires et vivent en appartement. Et cette proportion est encore plus importante dans les zones urbaines.
De nos jours, le mot « appartement » désigne le plus souvent la partie d’un immeuble comportant plusieurs pièces formant un ensemble destiné à l’habitation. Autrefois, cependant, lorsqu’il était utilisé au pluriel, ce terme désignait uniquement la partie privée d’une vaste demeure, un palais par exemple, où les occupants cherchaient un peu d’intimité. On disait alors que tel ou tel personnage important, une fois ses devoirs accomplis « se retirait dans ses appartements ».
Etymologiquement, mais aussi phonétiquement, il existe un lien entre le mot « appartement » et la formule « à part ». Attesté en français dès le milieu du XVIe siècle, sous la plume du poète angevin Joachim Du Bellay, qui vécut quelque temps à Rome, le mot « appartement » a été emprunté à l’italien, « appartamento », dérivé de l’espagnol « appartamiento », issu lui-même du verbe « appartarse », qui signifie « se mettre à part ». Dans son ouvrage « Les Regrets », publié en 1559, le poète écrivait : « Aux Muses je bastis, d’un nouvel artifice, un palais magnifique à quatre appartements ».
À cette époque, et pendant les siècle suivants, les appartements désignaient exclusivement cette partie d’un palais ou d’une riche demeure où le maître des lieux pouvait se retirer « à part », loin des pièces ouvertes aux visiteurs. Il faudra attendre le début du XXe siècle et la démocratisation des appartements dans les immeubles des cités pour que le terme perde progressivement de son lustre d’antan et devienne synonyme de logement, parfois modeste.
Le plus petit des appartements est un « studio », un logement dans lequel le salon, la chambre à coucher et la cuisine, notamment, sont réunis en une seule pièce. Le français a pris ce terme à l’anglais qui l’avait lui-même emprunté à l’italien « studio » qui signifie « étudier ». Jusqu’à un passé récent, ce mot désignait un lieu d’étude ou l’atelier d’un artiste. Aujourd’hui encore, les studios sont souvent occupés par des étudiants.
C’est en France qu’est né le concept d’appartements subventionnés pour les ménages modestes. En 1889, le maire du Havre, Jules Siegfried, créa les HBM, les Habitations à Bon Marché. Après la Seconde Guerre mondiale, les HBM changèrent de nom pour devenir les HLM : les Habitations à Loyer Modéré. C’est en 1976 qu’est attesté le premier emploi de l’abréviation « apart » avec un ou deux « p » pour désigner familièrement un appartement ; un retour involontaire à la notion originelle de « à part ».