La féra reprend du « poil » de la bête dans le Léman
Thomas Cramatte | Avec 542 tonnes de poissons capturés, l’année 2020 fut meilleure que les précédentes. Si la perche est l’espèce piscicole la plus pêchée, le corégone, plus communément appelé féra, a presque doublé l’année dernière. Entre espèces invasives et diminution de nutriments des eaux, la situation reste délicate sur le lac franco-suisse. Toutefois, malgré un poisson sans cesse en baisse durant les sept dernières années, cette nouvelle redonne un peu le sourire aux 138 pêcheurs professionnels exerçants sur le Léman.

La commission internationale de la pêche dans le Léman avait pour habitude d’annoncer une pêche en diminution depuis 2014. Mais les prédictions qui démontraient une légère tendance à la hausse à la fin 2019 se sont révélées exactes : « L’année 2020 présente un niveau de pêche en légère hausse avec 3.1 % de plus par rapport à celui de 2019 », a indiqué la commission consultative de la pêche dans le Léman dans un communiqué du 7 octobre dernier. Pour rappel, la situation n’était pas encourageante, car le rendement global avait baissé de 25 % en 2019 et de plus de 50 % par rapport à 2015. L’essentiel du rendement de la pêche lémanique professionnelle repose toujours sur les deux principales espèces piscicoles : la perche et la féra, avec respectivement 253 tonnes et 203 tonnes. Si la perche a baissé de 53 tonnes par rapport à 2019 (288 tonnes), le corégone a presque doublé. 120 tonnes de cette espèce avaient fini dans les filets des pêcheurs lémaniques. Pour la commission consultative de la pêche dans le Léman, il est intéressant de constater que le rendement de la féra a presque été multiplié par deux. « Cependant, la situation n’est pas stabilisée, puisqu’aujourd’hui, c’est essentiellement la génération de l’hiver 2017-2018 qui est pêchée par les professionnels ». Ce poisson phare du Léman semble confirmer son retour cette année, encore au lendemain de la fermeture de la saison de pêche (17 octobre). Du côté des pêcheurs amateurs, ce sont 6400 permis annuels qui ont été délivrés
en 2020.
Période de protection
La commission consultative a opté pour une stratégie de protection afin d’augmenter le nombre de spécimens des salmonidés : « D’entente avec les pêcheurs professionnels, la saison de pêche sera écourtée de deux semaines en 2022 afin d’augmenter la population de féra », indique par téléphone Yvon Crettenand, biologiste au service de la chasse, de la pêche et de la faune pour le canton du Valais. L’objectif de cette mesure vise à préserver environ 100 millions d’œufs en protégeant les femelles fera avant la période de frai, le tout en évitant un report de la pêche sur une autre espèce, les ombles chevaliers. « Nous avons observé une baisse de reproduction ces dernières années, cet arrêté préserve les femelles et apporte le maximum de chance pour que la nature puisse compenser les pertes ». Une seconde mesure à l’intention des professionnels vise à augmenter la taille légale de capture des corégones à 37 centimètres au lieu des 30 actuels. Trois autres arrêtés seront publiés dans les semaines qui suivent. Parmi ceux-ci, les dates précises de la saison de pêche professionnelle, son règlement et l’arrêté de protection des corégones. L’ouverture de la pêche des salmonidés dans le Léman est d’ores et déjà fixée au dimanche 16 janvier.
Autres espèces
Le bilan établi par la commission consultative de la pêche dans le Léman mentionne également l’état des autres espèces. A contrario de la perche et de la féra, le brochet continue de diminuer avec 28.9 tonnes contre 39.5 en 2019, l’omble-chevalier prend la même trajectoire avec 11.6 tonnes en 2020, contre 16.8 l’année précédente. Les truites et les écrevisses signal (espèce exotique envahissante) apportent de leur côté un peu plus de réjouissance, puisque la commission enregistre huit tonnes de truite capturée en 2020 contre 6.69 en 2019. L’écrevisse invasive diminue, quant à elle, à 5.9 tonnes contre 12.5 en 2019.
