Retour dans le passé
Ce 6 septembre 1924 ma mère s’était réveillée en sueur au beau milieu de la nuit. Elle a secoué mon père qui dormait à ses côtés.
– Vite Louis, je sens qu’il sera bientôt l’heure de serrer notre enfant dans nos bras. Dépêche-toi, va chercher la sage-femme qui habite dans le canton voisin.
Il faut penser qu’à cette époque peu de monde avait un véhicule, tous les déplacements se faisaient surtout en vélo ou à cheval.
Une longue heure s’est écoulée avant que l’accoucheuse arrive toute essoufflée avec Louis.
Elle n’était pas en forme, d’après ce que mon papa a raconté à ma maman plus tard, elle n’avait pas pu fermer l’œil de la nuit; un autre accouchement qui s’était mal passé dans son village l’avait retenue.
Elle ronchonnait que pour un premier enfant ce n’était pas la peine de la faire venir si vite, il fallait laisser faire la nature et elle est repartie sur son vélo pour ne revenir qu’en début d’après-midi. Et je suis née au moment où il sonnait 15 heures au clocher du village. Quelques minutes plus tard, la sage-femme, perplexe, lui annonça la venue au monde d’un autre bébé.
Ma mère, très enchantée, ajouta à mon attention:
– Je te promets, ma petite Césarine, si c’est une sœur elle s’appellera Sarah, si c’est un garçon, il se prénommera César.
Malheureusement ce bébé est venu au monde sans pousser un seul cri, et la sage-femme, dans la panique, a pris la petite en répétant à maman que peut-être en se rendant vite chez le médecin à Oron il pourrait la sauver. Et elle s’en est allée avec le nouveau-né dans un balluchon.
Le soir, en rentrant, mon père a été très heureux de me serrer contre lui, cependant en apprenant la suite il s’est mis à pleurer.