Puidoux – Boxe en Lavaux
Le vendredi 24 octobre prochain, un événement inédit aura lieu à la salle Forestay, à Puidoux : un gala international de boxe, avec la participation des meilleurs amateurs (6 combats) et professionnels (5 combats) de Suisse romande. Une grande première pour la région Lavaux, dédiée au triple champion de Suisse des années 1950 Ernest Monnier, dit Roméo, vigneron à Grandvaux (1931-2018). Portrait.

Ernest Monnier n’est plus
Bertrand Duboux | Indestructible sur le ring au temps de sa gloire, l’ancien champion suisse Ernest Monnier a tout de même fini par perdre son dernier combat, celui pour la vie. Il s’est éteint le 21 juin 2018 dans sa 87e année, à Chexbres, huit mois après avoir été admis dans un établissement spécialisé pour une infection pulmonaire. La boxe romande porte le deuil de ce combattant généreux et physique, au propre comme au figuré, qui lui a procuré tant de grandes et belles émotions.
Dans les années cinquante, ce puissant frappeur, surnommé Roméo, avait mis à l’honneur le Club lausannois de boxe (CLB) en conquérant de haute lutte trois titres de champion suisse des super-welters (1955-57-58). En 1956, diminué par une angine, il avait dû déclarer forfait pour la finale, à Genève. Le sacre fut pour le Bâlois Neuenschwander, que le Lausannois avait plus tard battu en match qualificatif pour le championnat d’Europe 1957 à Prague, où il fut éliminé par le grand Laszlo Papp, triple champion olympique hongrois (1948-52-56) et futur champion d’Europe professionnel des poids moyens en 1962 ! En 1956, sélectionné pour les JO de Melbourne avec Neuenschwander et les Zurichois Hans Buchi et Max Meier, Ernest Monnier avait déjà vu son rêve s’évanouir suite au boycott imposé par la Suisse après l’intervention de l’armée soviétique à Budapest !
Solide, dur au mal, ce fils de vigneron-tâcheron de Grandvaux, né de père valaisan et de mère italienne, a disputé quelque 120 combats entre 1950 et 1959 et écrit quelques-unes des plus belles pages du CLB. Affecté par une jeunesse douloureuse et agitée, il a mis dans ses matches toute la hargne et la dureté que lui inspiraient ces années difficiles. Un battant au grand cœur, un bagarreur au style peu académique mais diablement efficace et très fair-play. Spectaculaire sur le ring, il a souvent été appelé à boxer à Genève où les meetings étaient nombreux à l’époque et attiraient toujours plus d’un millier de spectateurs.
En 1952, à 21 ans, Ernest Monnier était parti six mois à Paris chez l’entraîneur Dupin avec l’espoir de faire carrière chez les professionnels. Mais, malgré le soutien de Henri Perren, président du CLB, et quatre combats disputés à son avantage (3 succès, 1 défaite), l’aventure avait tourné court, car le jeune lausannois, sans formation et sans travail, n’avait pas voulu être à la charge de son entourage. Il avait reporté ses ambitions sur le sport amateur où il s’était taillé une belle réputation. Souvent sélectionné en équipe suisse pour disputer à l’étranger des matches internationaux, il fut durant ces années 1950 l’un des meilleurs amateurs du pays. Il s’enorgueillit d’ailleurs de ne jamais avoir été battu par KO.
En 1959, alors qu’il était en pleine forme, une hernie discale l’avait empêché de disputer le championnat d’Europe organisé à Lucerne et avait précipité sa fin de carrière. Il se consacra alors au travail de ses vignes, au cœur de Lavaux, et fut l’un des fidèles de la fanfare de Grandvaux et de la société de sauvetage de Villette, où sa robuste constitution en fit un rameur très apprécié jusqu’à plus de 70 ans !
A la retraite, il coulait des jours heureux dans sa maison de Grandvaux, avec vue imprenable sur le lac Léman et les Alpes savoyardes, après avoir remis ses vignes à son fils Stéphane (Stef, le fameux dessinateur de presse) qui veillait affectueusement sur lui. En 2014, à l’occasion du championnat suisse, organisé à Lausanne par le CLB, il avait offert personnellement une prime de 100 francs à chacun des dix vainqueurs titrés.