Opinions
Deux initiatives non souhaitables
Initiative pour des vaches à cornes
Jean-Rémy Chevalley, Municipal et député, Puidoux | Cette initiative qui émane curieusement du milieu agricole peut prêter à sourire. Au travers de subventions, les initiants veulent encourager les détenteurs d’animaux à remettre l’accent sur les parures cornées. Pour un grand nombre de Valaisans, la question ne se pose pas, une reine sans corne serait la risée des amateurs de combats. Mais pour les éleveurs qui détiennent des animaux en stabulation libre, mode de détention largement encouragé par notre politique agricole, la vision n’est pas tout à fait la même. Si sur de grands espaces de pâture, les belles cornées restent plus ou moins pacifiques, il n’en est plus de même lorsque les frimas hivernaux rassemblent les troupeaux dans des espaces plus restreints. Certains animaux se souviennent soudain quelle est la destination des attributs cornés et peuvent devenir très agressifs avec leurs congénères ou avec les personnes qui veillent à leur bien-être. Chaque année en Suisse de nombreux accidents sont signalés voire des drames ayant entraîné la mort d’une personne. Le fait d’avoir des animaux cornés ou non doit rester un libre choix du propriétaire en fonction du mode de détention. De plus, ce serait tout de même une aberration que de voire quelques millions distribués sous forme de subventions pour des cornes qui engendreraient une augmentation des accidents entre les animaux ou avec des personnes, enfin, un tel texte n’a rien à faire dans une constitution fédérale. Il faut clairement refuser cette initiative.
Initiative pour l’autodétermination
Cette initiative veut donner plus de souveraineté à notre petit pays. Certes, il est louable de vouloir rester indépendant sans avoir à traiter avec les autres, mais il faut aussi savoir regarder la réalité en face. Notre situation géographique veut que nous soyons quasiment au milieu de l’Europe, aucun moyen d’atteindre une mer ou un océan sans passer par un ou l’autre pays européen. Aucun moyen de se ravitailler en différents biens sans passer par l’un ou l’autre pays voisins, aucun moyen d’exporter sans passer par l’un ou l’autre état limitrophe. Notre économie est très dépendante de l’étranger, 1 franc sur deux est gagné à l’extérieur, donc remettre en cause certains accords passés avec l’UE dont nous ne faisons pas partie, pourrait avoir des conséquences catastrophiques pour notre pays. De plus, notre démocratie est reconnue pour sa parole donnée son sérieux et son intégrité, si nous remettons en question quand bon nous semble des accords passés, qui aura encore intérêt à traiter avec nous? Nos outils démocratiques nous permettent de veiller au maintien de notre indépendance, n’en rajoutons pas, au risque de se retrouver tel Robinson sur une île déserte et inconnue. Il faut refuser sans hésiter cette initiative.
Loi sur la surveillance des assurés : ne laissons pas les pleins pouvoirs aux caisses-maladies
Jean Christophe Schwaab, municipal en charge des affaires sociales, Riex (Bourg-en-Lavaux) | Les caisses-maladies nous en font voir des vertes et des pas mûres: hausses de primes aussi injustifiées qu’inexplicables, tracasseries sans fin envers les assurés et leurs médecins, gaspillage de l’argent des primes en publicités, salaires mirobolants et autres cadeaux aux parlementaires. Or, le Parlement fédéral vient de décider de donner d’énormes pouvoirs de surveillance aux assurances sociales, y compris aux caisses-maladies. Au prétexte de «combattre la fraude», la droite du Parlement a, en quatrième vitesse, accordé aux assureurs privés des pouvoirs d’investigation dont même la police ne bénéficie pas: traqueurs GPS, photos et vidéos de l’intérieur des appartements, des balcons et des jardins (s’ils sont visibles depuis l’extérieur, par exemple depuis le trottoir d’en face… ou à l’aide d’un drône). Souvent, ces surveillances pourront être menées sans l’aval d’un juge, alors que cela est indispensable lors d’une procédure pénale, y compris antiterroriste. Ces dernières années, plusieurs assureurs ont déjà tentés de mettre en œuvre de telles mesures, avant que le tribunal fédéral n’y mette le holà. Ces surveillances ont été particulièrement traumatisantes pour de nombreux assurés dont la sphère privée a été violée alors qu’ils n’avaient pourtant rien à se reprocher. Ces mesures sont totalement disproportionnées. D’une part, parce que la fraude aux assurances sociales ne représente que 0,5% des montants en jeu. D’autre part, cette fraude peut – et doit! être combattue par des moyens beaucoup moins invasifs. En outre, il est pratiquement garanti qu’avec de tels moyens de surveillance, les assureurs finiront bien par trouver, chez chacun d’entre nous, un prétexte, même minuscule, pour justifier une réduction des prestations. Enfin, ces mesures vont à n’en pas douter coûter très cher… un coût qui se reportera sur les primes! Il faut enfin préciser que cette nouvelle loi ne permet pas de lutter contre la fraude à l’aide sociale (même si certains élus de droite, qui n’ont visiblement pas lu la loi qu’ils soutiennent, prétendent le contraire). En effet, cette nouvelle loi ne concerne que les assurances sociales fédérales et pas l’aide sociale, qui est du ressort exclusif des cantons. Cette loi est fermement combattue par la gauche, les syndicats et les organisations de défense des assurés. Mais elle est aussi combattue par un comité libéral, qui dénonce à juste titre une atteinte inacceptable au droit fondamental à la sphère privée. Je voterai NON le 25 novembre et vous recommande d’en faire autant.