Ni fous ni morts
Collectif / Editions de l’Aire
Josée Martin | Tsunami dans notre vie quotidienne avec l’arrivée du Coronavirus. Il y a quelques jours encore, assister à un film, participer à un anniversaire, à une conférence, tout cela était banal.Aujourd’hui, dans la crainte, dans le respect des mesures sanitaires, on se parle entre voisins, on fait les courses pour les autres, on propose son aide. La solidarité revient importante et surtout elle nous donne du courage. Le livre « Ni fous ni morts » qui paraît ces jours aux Editions de l’Aire est la démonstration que, même dans les situations de survie les plus extrêmes, la solidarité nous sauve. De 1974 à 1979, 1153 militants argentins ont été incarcérés dans le Pavillon 5 de la terrible prison de Coronda. Ce livre, dont la version originale a connu un grand retentissement en Argentine, constitue un formidable témoignage de victoire de l’être humain sur la folie et la mort, grâce à une lutte collective de tous les instants contre l’injustice et l’arbitraire. Grâce à notre ami Sergio Ferrari, qui a vécu, alors qu’il était jeune militant politique, 3 ans de conditions de détention terribles dans cette prison, devenu journaliste en Suisse à sa libération, j’ai eu la chance de participer au projet collectif pour la parution du livre en français. Je souhaite vous le faire découvrir ici.
Ni fous, ni morts
« Si vous sortez d’ici, ce sera fous ou morts ». Par ces mots adressés aux détenus, le directeur de la prison de Coronda, résumait les objectifs du régime appliqué aux prisonniers politiques pendant la dernière dictature argentine (1976-1983). Poursuivis en justice, les anciens responsables de la prison ont été condamnés en 2018 à des dizaines d’années de prison. Le livre original en espagnol a été une pièce maîtresse de cette condamnation. Extrait : « Nous ne nous considérons pas comme des victimes. Nous étions et nous sommes toujours des hommes engagés dans l’action. Nous voulons des changements de fond, pour lesquels nous luttons. Nos récits témoignent d’une profonde souffrance, mais l’humour y est souvent présent car il était une arme fatale contre nos bourreaux. Face aux gendarmes et aux gardiens prisonniers de leur peur, nous étions des hommes vraiment libres, en dépit de notre enfermement dans les cellules où nous passions vingt-trois heures par jour. »
Communiquer pour survivre
Dans ces conditions, les jeunes militants détenus ont usé de stratagèmes: un périscope, fait d’un brin de paille de balai, avec un éclat de miroir, pour surveiller, à travers les trous de la porte, les allées et venues des gardiens, l’usage de la tuyauterie des wc pour communiquer d’une cellule à l’autre… « La communication était notre arme de base pour résister, garder le moral et conserver notre santé mentale. Les gardiens en étaient conscients et leur principale préoccupation était de l’entraver autant qu’ils le pouvaient, de l’empêcher totalement si possible. Ils sont parvenus à la freiner, mais jamais ils n’ont pu y mettre fin. Je ne crois pas qu’il y ait eu un seul jour où nous n’ayons pu communiquer d’une façon ou d’une autre. A peine la grille de la cage était-elle refermée que le tac-tac-tac signalant que tout était dégagé se répétait d’un bout à l’autre du pavillon, comme un écho obstiné, le bruit de dominos qui s’abattent ». Bonne lecture… Prenez soin de vous et des autres ! Livre disponible dans votre librairie ou à commander à info@nifousnimorts.com